La cour d'appel de Riom examinait ce 19 mars l'appel de l'ancienne dirigeante de la laiterie Toury. Condamnée en 2014 par le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand, Annette Montfollet met en cause la responsabilité des banques. Décision de la cour d'appel de Riom le 18 juin prochain.
L'enjeu de l'audience de ce 19 mars était d'établir, ou pas, la responsabilité des banques dans le désastre financier de l'entreprise.Les deux anciens gérants de Toury avaient été condamnés en 2014 à rembourser 73 millions d'euros aux banques. Devant la cour d'appel de Riom, Annette Montfollet a estimé que ces mêmes banques étaient aussi responsables de la faillite et des fraudes.
Elle veut prouver la responsabilité des banques dans cette affaire. Un passif de près de 100 millions d'euros accumulés entre 2004 et 2007 qui, selon son avocat Jean-François Canis, serait dû à des manquements des banques : "elles ont failli à leur devoir de conseil, elles n'ont pas tiré la sonnette d'alarme".
Du côté des banques, on assure n'avoir pas vu venir le désastre. Renaud Portejoie, avocat de la Lyonnaise de Banque, affirme que le système fonctionnait "dans une opacité totale" et que l'entreprise Toury " a été accompagnée par les banques, mais la confiance qui lui était accordée pour des raisons historiques a été trahie".
La cour d'appel de Riom rendra sa décision le 18 juin prochain.
Retour sur l'affaire Toury:
A la mort de Michel Toury, en 2003, son frère Jean et sa soeur Annette reprennent les rênes de l'entreprise familiale, créée en 1916. MaisToury, géant de la filière laitière auvergnate depuis quatre générations est mis en redressement judiciaire en 2007.
Constatant des irrégularités dans les bilans de la laiterie Toury, les liquidateurs judiciaires font un signalement au procureur de la République de Clermont-Ferrand. En avril 2007, une information judiciaire est ouverte pour permettre de vérifier l'existence éventuelle d'irrégularités ou d'infractions pénales dans la gestion du groupe Toury. Le procureur de la République de Clermont-Ferrand, Michel Valet, précise alors qu'aucune plainte n'avait été déposée «à l'heure qu'il est». Les chefs d'infraction visés par l'information judiciaire, ouverte contre X le 27 avril sont banqueroute et d'escroquerie.
Le groupe familial Toury, qui emploie alors quelque 500 salariés répartis dans neuf entreprises, avait été placé en redressement judiciaire le 3 avril, peu après la démission de ses dirigeants, Jean Toury et sa soeur Annette, qui avaient déposé le bilan.
Le 9 octobre 2008, Jean Toury et sa sœur Annette sont mis en examen. La justice reproche aux ex-dirigeants d’avoir utilisé plusieurs fois des bordereaux de cession A l'escroquerie s'ajoutent la banqueroute, l'abus de biens sociaux, la présentation de bilans inexacts et la distribution de dividendes fictifs.
Après 6 ans d'enquête de police judiciaire, le procès s'ouvre en novembre 2013, devant le Tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand. Lors du troisième jour, Jean Toury finit par reconnaître "l'infraction de multi-mobilisation", réaffirmant "qu'il était dans un système".
Jean Toury,est condamné à 24 mois de prison avec sursis, à 60 000 euros d'amende et l'interdiction de gérer, directement ou non, une entreprise pendant 10 ans. Pour Annette Montfollet, sa soeur, la décision donne 18 mois avec sursis, 30 000 euros d'amende et la même interdiction de gérer, directement ou non, une entreprise pendant 10 ans. Ils ont par ailleurs été condamnés solidairement à verser plus de 70 millions d'euros aux treize banques portées partie civile. Les délits d'escroquerie, de banqueroute, d'abus de biens sociaux et de présentation de bilans inexacts ont été requalifiés par le tribunal en délit de banqueroute avec conséquence ruineuse, et ils ont été relaxés des deux autres charges retenues contre eux de faux et usage de faux, et de distribution de dividendes fictifs. Par ailleurs, tous les autres salariés poursuivis ont été relaxés.