Les chiffres sont alarmants : la population de saumons comptabilisée dans l’Allier ne cesse de décliner. Le conservatoire du saumon tire la sonnette d’alarme.

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Il n’y a pas eu aussi peu de saumons dans l’Allier depuis 30 ans. C'est l’observation inquiétante que fait le conservatoire du saumon, qui voit la population décliner depuis 2015. Sur l'ensemble du bassin Loire, 113 saumons ont été comptabilisés en 2023 contre 261 en 2022 et 1 431 seulement huit ans auparavant, en 2015. La moyenne des années précédentes s'établit à 627 spécimens. Sur la seule station de comptage de Vichy (Allier), la plus représentative, 96 poissons ont été recensés en mai, selon Patrick Martin, président du conservatoire du saumon : “Ce n'est pas une surprise. Les chiffres de 96 saumons, on les connaît depuis le mois de mai dernier. La tendance est à la baisse depuis 2015 où on avait une année record avec 1 177 saumons.”  

Les difficultés du saumon

Après s'être nourris de petites crevettes au large du Groenland, les saumons reviennent pondre à l'endroit même où ils sont nés, remontant la Loire et l'Allier, deux à trois ans plus tard, selon un mécanisme instinctif encore inexpliqué. Si ça ne va pas très bien pour le saumon depuis une trentaine d'années c’est parce que le saumon ne rencontre pas, tout au long de son parcours, d'assez bonnes conditions, notamment en mer. “Il ne trouve pas sa nourriture toujours au même endroit, en quantité suffisante et en qualité suffisante. Il est obligé de faire des milliers de kilomètres en plus pour essayer de la trouver. Ça s'est effondré globalement parce que le climat a changé. En mer, il mange du poisson ou ce qu’il peut trouver. La qualité et la quantité de nourriture ont complètement chuté à certains endroits. Les choses évoluent, les conditions, les courants marins changent, on a trouvé des poissons qui vont beaucoup plus au nord pour leur alimentation”, explique Patrick Martin.  

Des conditions climatiques défavorables

La souche Loire-Allier du saumon atlantique est la dernière d'Europe capable de parcourir ces milliers de kilomètres mais sa population est gravement menacée par les activités humaines, la pollution, le réchauffement climatique et les nouveaux prédateurs. “Le problème, c'est que s'ils montent 1 500 km plus au Nord, il faut qu'ils fassent 1 500 km supplémentaires dans leur parcours et ils arrivent de plus en plus en retard. En eau douce, l'environnement a aussi pas mal changé, c'est à dire que la température a augmenté. Les débits chutent. À côté de ça, l'explication de la chute drastique depuis 2007 est pour nous totalement en lien avec l'action de soutien et de repeuplement qui a été modifiée à ce moment-là.” 

Des aménagements sur les barrages

Sur l'Allier, à Poutès (Haute-Loire), où EDF avait reconstruit en 2021 un barrage "sur mesure" pour faciliter le passage des saumons, deux ont été comptés dans l'ascenseur spécial installé sur le barrage. “Il y a eu des des des travaux de fait comme les travaux qui ont été faits sur le barrage de Poutès en amont, avec un très gros investissement qui a permis de réduire les retards de la migration des saumons, notamment à la descente. Ils perdaient presque 3 semaines et on est passé de 3 semaines à 3 heures. Ça va dans le bon sens”, se félicite malgré tout Patrick Martin.  

Aleviner de manière plus précise

Pour lui, "iI faut considérer qu'on est des producteurs de graines.” Il détaille : “Ces graines, ce sont des petits saumons. On sème des graines pour que ça germe et puis que ça donne des résultats. La population va bien, mais on la soutient. Le problème, c'est quand on nous demande de mettre de moins en moins de graines et de les mettre au mauvais endroit, c'est un peu comme semer des graines sur des parkings du supermarché. Ça ne marche pas. Quand on nous demande de déverser les poissons dans la zone avale, proche de la banlieue de Clermont-Ferrand, ça donne 10 fois moins de résultats que si on avait mis ces alevins dans la partie amont du bassin. À partir du moment où vous en mettez moins et vous en mettez au mauvais endroit, il ne faut pas vous attendre à ce que ça donne des résultats. On avait anticipé et annoncé cette chute drastique des populations à partir du moment où cette stratégie nous a été imposée.” 

Gérer la population de saumons comme un jardin

Patrick Martin considère qu’il faut envisager la rivière comme un jardin. "Il faut arrêter de faire rêver les gens et leur faire croire qu'on va retrouver un environnement totalement sauvage et naturel. La France n'est pas un environnement sauvage, c'est un grand jardin. Il faut qu’on accepte qu'on ne pourra jamais retrouver les conditions idéales, parce que ça voudrait dire ne plus avoir d'agriculture, ne plus avoir de barrage, ne plus avoir centrale nucléaire, aménager tous les obstacles. On peut gérer un jardin de façon raisonnée, de façon la plus respectueuse possible, mais dans un jardin, pour récolter, souvent, il faut semer et quand on a la présence de prédateurs, comme c'est le cas avec des oiseaux piscivores ou les silures, on régule.” Il insiste sur le fait que le salut des saumons se trouve dans “des objectifs sérieux et ambitieux.” 

Tant que les programmes sont gérés par des contraintes et pas par des objectifs, on ne pourra que constater des échecs.

Patrick Martin, président du conservatoire du saumon

Pour lui, cette situation était prévisible : “On a 96 saumons l'an passé, on en avait 240, l'année d'avant, 263 ans et avant 700 par an, donc on est sur une descente. Ce n’est pas une année où il fait a plus chaud, ça, c'est une approche totalement farfelue. Le cycle du saumon, c'est 5 ans. Pour remonter la pente d'une population, ça va prendre entre 8 et 10 ans. Il faut se donner des objectifs beaucoup plus ambitieux et ne pas juste mettre le minimum pour éviter la disparition, parce que ça démobilise tout le monde. J'ai l’impression qu’on a complètement perdu le sens de ce projet et les objectifs de départ en 1994, lorsque le ministère de l'Environnement a initié ce projet : lancer la construction du conservatoire et définir des objectifs clairs quant aux quantités aux résultats. En 1994, nous étions partis à une centaine de saumons au départ. Ensuite, on est monté à 1 200 saumons. On retombe à 100 saumons, il n'y a pas plus de démobilisateur que ça !" Le conservatoire a pourtant travaillé sur l'aménagement d'un obstacle, sur la qualité de l'eau, sur les rejets... Au début du XXe siècle, les captures avoisinaient 4 000 à 5 000 saumons dans la Loire. 

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