A Vichy, une enquête préliminaire ouverte sur la gestion de la Ville

Depuis août dernier, une enquête préliminaire est ouverte à la suite de "soupçons d'irrégularités" émis par l’association Anticor au sujet de la gestion de la Ville de Vichy, dans l’Allier, entre 2013 et 2018. La mairie entend déposer plainte pour « dénonciation calomnieuse ».

En août 2023, Anticor, une association anti-corruption qui existe depuis 2002, a déposé une plainte auprès du procureur de la République de Cusset au sujet de « soupçons d’irrégularités dans la gestion de la commune de Vichy ». Elle s’appuie sur un rapport de la Chambre régionale des comptes (CRC) qui date de mars 2021 et qui porte sur la période de 2013 à 2018, sous le mandat de Claude Malhuret (Horizons), puis de Fréderic Aguilera (LR). Eric Neveu, procureur de la République de Cusset, indique : « Je confirme qu’il y a une enquête préliminaire qui est diligentée depuis le mois d’août dernier, suite à une plainte déposée par Anticor. Elle a été confiée à la police judiciaire de Clermont-Ferrand. Elle est ouverte pour détournements de fonds publics et recel de détournement de fonds public ».

Le rapport de la Chambre régionale des comptes

Clarence Bathia, juriste à Anticor, explique pourquoi l’association qu’il représente a déposé plainte : « On a fait un signalement au mois d’août 2023 qui est fondé essentiellement sur un rapport de la Chambre régionale des comptes (CRC) de la région Auvergne-Rhône-Alpes qui date de 2021. En le lisant, on a vu que dans le cadre de la gestion du budget de la commune de Vichy, il y avait certains éléments qui nous semblaient incongrus. Ce n’est pas nous qui avons fouillé le budget et la comptabilité analytique de la mairie. Ce sont des personnes dont c’est le métier qui ont fait ça. A partir de là, on a estimé nécessaire d’alerter le procureur de la République sur certains faits qui pourraient être peut-être qualifiés comme des infractions pénales, en l’espèce des détournements de fonds publics éventuels ».

Ce qui questionne l'association Anticor

D’après lui, le rapport suscite diffférentes interrogations. Le juriste souligne : « Des indemnités de fonctions et des remboursements de frais auraient été indûment versés. L’exécutif municipal se serait réparti 15 000 euros de trop-perçus d’indemnités. Parallèlement, la CRC met en exergue des dépenses qui n’auraient pas dû être supportées par la commune : des frais de déplacement remboursés sur frais réels alors qu’une enveloppe forfaitaire aurait dû être votée par le Conseil municipal, ainsi que le remboursement de frais de mission au profit d’un élu pour une opération qui n’a fait l’objet d’aucune délibération ».

Frédéric Aguilera, maire de Vichy, n'a pas souhaité s'exprimé. C'est par un communiqué qu'il répond aux accusations d'Anticor : "Sur ces sujets, l’interprétation des textes par la CRC diverge de celle qu’en font un grand nombre de communes, dont Vichy.  La ville rappelle que sur la période contrôlée, les indemnités de fonction (validées par les services de l’Etat au titre contrôle de légalité) et versées individuellement aux élus ont diminué. La somme globale est restée stable, elle a permis d’indemniser les adjoints et les conseillers municipaux délégués, plus nombreux, du fait d’une volonté politique de confier des responsabilités à un plus grand nombre d’élus".

Clarence Bathia s'interroge également sur des avantages accordés à des agents de la municipalité : « En lisant le rapport de la CRC, on s’est aperçu que certains membres de la municipalité avaient des fonctions au sein de la mairie alors qu’ils ne devaient pas les avoir légalement. C’était notamment le cas de la cheffe de cabinet du maire de Vichy qui avait la qualité de collaborateur de maire alors qu’elle était également fonctionnaire territoriale. Cela concernait aussi la problématique des heures supplémentaires pour certains agents de la police municipale. Le rapport de la CRC indiquait un dépassement de la limite légale des heures supplémentaires, sans l’autorisation du supérieur hiérarchique ».

A propos du paiement d’heures supplémentaires à certains agents, le communiqué de la mairie précise : « Cela concerne 2 agents de police municipale qui, particulièrement sollicités, ont effectué pendant plusieurs mois, 5h supplémentaires au-delà du maximum prévu, pour lesquelles ils ont été rémunérés. Il ne s’agit absolument pas d’avantages irréguliers comme l’avance mensongèrement l’association ». 

La question d'un éventuel surclassement géographique

Enfin, Clarence Bathia met en avant un problème lié à un éventuel surclassement démographique : « Selon le recensement de 2016, la commune de Vichy comptait 24 794 habitants et appartient donc à la strate des communes de 20 000 à 40 000 habitants. Or, il apparaît que la municipalité se serait prévalue d’un surclassement pour employer davantage de collaborateurs, selon de meilleures rémunérations, sans justifier pourtant de l’existence d’un arrêté de surclassement. La commune aurait, en vertu de ce surclassement illégitime, employé de manière irrégulière et rémunéré de manière indue, pendant plusieurs années, un collaborateur du maire en exercice ».

Face à cette accusation, la mairie répond : « La ville a toujours contesté cette position de la CRC, qui est d’ailleurs très isolée : en effet, les services de l’Etat ont expressément confirmé (courrier de Mme la Préfète de l’Allier du 1er octobre 2020), que le surclassement démographique était bien fondé au regard des lois et règlements. Par ailleurs la commune rappelle qu’elle est classée « station de tourisme » par décret du 1er août 2013 ». 

Une plainte de la Ville pour "dénonciation calomnieuse"

Le juriste insiste : « Dans le signalement de ces irrégularités éventuelles, on n’indique pas qu’il y a une volonté d’enrichissement personnel d’un tel ou d’un tel. Mais il y a un nombre important d’éléments pour lesquels il y a un manque de sérieux de manière comptable. Le rapport de la CRC démontre une gestion à l’emporte-pièce de cette ville ». Le porte-parole d’Anticor se félicite de l’ouverture d’une enquête préliminaire : « On est contents qu’une enquête ait été ouverte. Cela prouve, je l’espère, le sérieux de notre signalement. Nous nous sommes fondés sur un rapport assez criant. Nous faisons confiance à la justice et aux différents services de police pour mener à bien cette enquête. Elle doit durer en principe deux ans ». 

A la fin de son communiqué, la Ville de Vichy précise qu’elle « saisira le procureur de la République d’une plainte en dénonciation calomnieuse contre les auteurs de cette dénonciation faite de mauvaise foi ». Une plainte qui n’inquiète pas le juriste d’Anticor. 

Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
Tous les jours, recevez l’actualité de votre région par newsletter.
choisir une région
France Télévisions utilise votre adresse e-mail pour vous envoyer la newsletter de votre région. Vous pouvez vous désabonner à tout moment via le lien en bas de ces newsletters. Notre politique de confidentialité