A la tombée du jour, des milliers de grues cendrées rejoignent leur dortoir sur l’Allier et offrent un spectacle majestueux. Le plus grand oiseau migrateur d’Europe a choisi le Val d’Allier pour hiverner, pour le plus grand bonheur des observateurs.
La réserve du Val d’Allier, 1 450 hectares qui s’étendent le long de l’une des rivières les plus sauvages d’Europe de l’Ouest. Un territoire préservé qui en fait le paradis des oiseaux, selon Jonathan Duprix, animateur à la LPO (Ligue de Protection des Oiseaux) : « Sur la réserve du Val d’Allier, on recense à peu près 600 espèces d’oiseaux, toutes périodes confondues. Il va y avoir des oiseaux qui vont n’être présents que l’été, par exemple les oiseaux qu’on voit sur les gravières comme les sternes ou les gravelots. D’autres espèces ne vont être présentes qu’en hiver et d’autres toutes l’année, comme par exemple les hérons ou les cygnes. » Si ce site est remarquable, c’est grâce à la rivière qui est encore sauvage : « Comme la Loire, c’est l’une des rares rivières où il y a peu d’enrochement. Ça veut dire qu’elle a une liberté très grande pour pouvoir se déplacer. Là, par exemple, en période hivernale où il va y avoir de forts courants, elle va pouvoir arracher des morceaux de berge, ce qui va créer des méandres. Avec ces méandres, il va y avoir de nouveaux milieux naturels qui vont se créer et plus il y a de richesse en milieux, plus il va y avoir d’espèces présentes », explique Jonathan.
"Pendant la journée, elles vont se dispatcher un peu partout autour du val d’Allier pour chercher de la nourriture"
Jonathan Duprix
Parmi ces oiseaux, les plus gros sont les grues cendrées : « C’est la plus grosse espèce en Europe. Elle est présente depuis maintenant 10 ans en hivernage, c’est-à-dire qu’elle reste là. Avant, elle venait mais c’était juste une halte migratoire. Après, elle continuait jusqu’en Espagne. » Pour les observer la journée, il faut prendre la direction des champs, où les grues cendrées se nourrissent : « Pendant la journée, elles viennent dans les champs de maïs. Le maïs est très riche en énergie et l’hiver, elles en ont beaucoup besoin. C’est pour cela que, pendant la journée, elles vont se dispatcher un peu partout autour du val d’Allier pour chercher de la nourriture », indique Jonathan.
Pour reconnaître une grue cendrée, outre sa corpulence, il faut regarder son plumage, raconte le spécialiste : « Les adultes ont la tête rayée noire et blanche, avec le dessus de la tête qui est rouge. C’est très caractéristique. En fait ce ne sont pas des plumes mais l’absence de plumes, car le crâne est rouge. Ils font 2 mètres à 2,20 mètres d’envergure pour un mètre de hauteur. Ils ont à peu près la même taille qu’un héron, mais c’est l’envergure où il y a une grosse différence. Elles sont beaucoup plus imposantes. » En général, ces oiseaux se déplacent à plusieurs : « En voir isolés, c’est très rare. Il y a tout le temps des dizaines ou des centaines d’individus », affirme Jonathan Duprix.
Un oiseau venu du nord
Lorsque le soir tombe, les oiseaux retournent au dortoir près de la rivière : « Pour dormir, elles sont les pattes dans l’eau. C’est pour éviter que des prédateurs terrestres ne puissent venir jusqu’à elles. Ça peut être des renards ou d’autres prédateurs comme ça. Il n’y a qu’un seul dortoir pour toute la colonie. Il y a plus de sécurité, certaines peuvent surveiller. Comme elles sont plus serrées, il y a moins de risques. » La population de grues cendrées du Val d’Allier vient des pays Baltes, du nord de l’Allemagne, Finlande ou encore Norvège, où elles se reproduisent : « La période de nidification est au printemps. Elles font leurs petits là-bas et au moment de la migration, elles repartent avec les jeunes qui ont dû emmagasiner beaucoup d’énergie pour venir hiverner dans notre région », précise Jonathan. Si cet oiseau est imposant, il n’en est pas moins vif : il se déplace de 40 à 80 km/h en moyenne. Si les vents sont « porteurs et puissants », une grue peut atteindre 100 km/h. Selon la LPO, la grue peut donc traverser la France en une journée.
