En Ardèche, Claude Fougeirol, photographe, meilleur ouvrier de France, part prochainement à la retraite. Il aura marqué le territoire par ses photos, ses portraits et notamment ceux qu'il mène depuis plus de trente ans autour d'anciens. A découvrir à Beauchastel jusqu'au 26 septembre.

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La lumière, la matière première du photographe. Claude Fougeirol la pratique depuis une bonne trentaine d’années. Un gros quart de siècle qui correspond également à sa connaissance des terroirs ardéchois. Car c’est appareil en bandoulière que Claude les a arpentés, prenant le temps de faire des rencontres avec les anciens dès que l’occasion se présentait.Au total, pas moins de trois cents personnes sont ainsi passées sous son regard, trois cents visages ont été incrustés dans le papier en noir et blanc. Trois cents révélations de face, de profil aussi, avec ces jeux d’ombre qui font ressortir les caractères, qui disent la dureté de la vie, mais cette vie vraie, le regard droit, toujours. Une grosse poignée vit encore, un peu moins de vingt personnes.

Gilbert Fayard, l'homme avec les bacchantes

Ces photos, on peut en découvrir une bonne quarantaine à l’Espace La Succulente, à Beauchastel, jusqu’à la fin du mois de septembre. Quarante portraits capturés où les paysans, femmes et hommes, constituent la majorité des gens auxquels s’est intéressé Claude Fougeirol.Parmi ceux-là, Gilbert Fayard, 72 ans, agriculteur retraité qui possède sa tanière à Saint-Jean-Chambre (Ardèche). C’est chez lui que Claude revient pour la sixième année consécutive pour continuer à lui tirer le portrait. Comme chaque fois, Claude apporte les dernières photos qu’il a réalisées de lui.

On prend un moment pour les regarder ensemble. Gilbert, pas trop bavard, aime ces moments. « On discute facilement, on se tutoie, c’est bien de pouvoir se regarder. » Dans une vie rude, la place du miroir était largement en retrait du quotidien. Alors, le fait d’être la cible d’un photographe amoureux du patrimoine, des vieilles pierres et des gens, ça change tout.

Pays dur comme la pierre

Le patrimoine, voilà qui tient à cœur à Claude. Des maisons comme on en verra bientôt plus, énumère Claude qui remonte la vallée de l’Eyrieux depuis une demi-douzaine d’années. C’est ici, explique le photographe, qu’il a appris tout ce qui était en lien avec la nature. « Les plantations dans les jardins potagers, les châtaignes, l’influence de la lune, les coupes de bois, quand et comment », confie Claude qui dit avoir eu la chance de rencontrer des « gens vrais. Des gens qui vivaient simplement, de manière dure mais sereine », sourit Claude. L’arpenteur de villages et hameaux perchés raconte comment il s’y prend pour nouer contact avec ses personnages.  « La première fois, je viens sans mettre l’appareil photo en évidence. On se présente. Et puis en partant, je leur dis que je vais une petite photo,. Alors, ils me demandent souvent pourquoi, et je leur réponds : je vous l’apporte dans 15 jours,. Et deux semaines après je viens avec une photo, parce qu’une photo on ne la vole pas ! » Après ces premiers contacts, on boit un café, une verveine et Claude est invité à rentrer dans les intérieurs.

La lumière directionnelle, lumière du cinéma

«  Ces gens me prêtent leur visage, une expression que j’aime bien. Quand au bout d’un moment ils sont prêts à se faire prendre en photo, ils se laissent faire, et à partir d’un certain âge, ils sont naturels. C’est là que je fais des photos avec la lumière directionnelle qui entre par les fenestrons, les lucarnes. Cette lumière est la plus belle, la plus difficile à capturer : c’est la lumière du cinéma.  On ouvre les volets, on éteint la lumière artificielle qui tombe du plafond, et alors le jeu d’ombres peut commencer. Le noir et blanc fait ressortir la personnalité des gens, ça les mincit, ça donne du modelé sur le visage. Il dilue aussi les défauts. On revient à l’essentiel, le regard. Pendant que je prends des photos, pour ne pas perdre le lien, je reste à côté de l’appareil une fois que j’ai fait mon cadre. Comme ça, on se voit, on se regarde. Ça compte beaucoup sur l’expression de notre interlocuteur. Une petite plaisanterie, on attrape une expression et on déclenche.»

 

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