Le concept n’est pas nouveau, mais il reste méconnu. A mi-chemin entre l'habitat individuel et collectif, la pension de famille est un hébergement social où l’on peut prendre le temps de se reconstruire. En pleine semaine nationale des pensions de famille, nous avons visité des Vans, en Ardèche.
"Là, on a une grande salle de bain, et là une cuisine équipée, et on a chacun une chambre, c’est important", raconte Eric Joly en parcourant le T3 où il vient d’emménager avec son fils. Après un accident de travail, il n’avait plus les moyens de payer le deux-pièces qu’il occupait en centre-ville. Un logement décent, autonome, durable. C’est ce qu’il a trouvé à la pension de famille des Vans.
"En ville, les loyers sont très chers ici… Je sors d’un logement qui était devenu totalement insalubre, on avait des montées de salpêtre aux fenêtres. Et je payais le même prix que pour un trois pièces ici…"
Un lieu de réinsertion
Les pensions de famille permettent à des personnes qui ont des problèmes économiques, physiques ou psychiatriques, à des personnes isolées ou exclues, d'accéder à un logement privatif et autonome, mais toujours dans un cadre collectif. Un logement social donc, mais avec une particularité : n'imposer aucune date de sortie à ses habitants. Une étape pour se poser et se reconstruire. Se recentrer, se réinsérer à son rythme. Pas de pression, pas de dossier à renouveler pour pouvoir rester.
" C’est une tranquillité d’esprit, moi j’ai un gamin qui est à l’école, qui fait son CAP, et se retrouver à la rue avec un gamin de 16 ans, ce n’est pas possible. Arrivé à 50 ans et blessé d’une épaule, c’est un peu dur de retrouver du travail. Là, cela me permet de prendre le temps de me reconstruire. Et avec mes revenus, étant donné qu'ici j'ai peu de charges, ça va me permettre de rebondir "
Un accompagnement au jour le jour
Une réinsertion facilitée par le travail des associations qui gèrent ce genre établissement. "On est bien accompagnés, ajoute Eric Joly. S’il y a quelque chose qui coince on passe au bureau et on décoince ça ensemble".
Le bureau, c’est celui du directeur, ouvert tous les jours. "Quand ils ont besoin d'un accompagnement administratif, ou un problème personnel, ils viennent me consulter ici", précise Marc Thibaut, directeur et accompagnateur de la Maison Relais des Vans… Et d’ajouter :
" La majorité des résidents ici ont besoin de rencontrer quelqu’un tous les jours, de pouvoir parler, parfois de rien et parfois d’exposer leurs difficultés. Et nous avons du temps à leur accorder ".
Un rempart contre la solitude
Autre particularité, les pensions de famille associent logements privés et parties communes. Créer du lien, rompre la solitude. C’est aussi la mission de la structure. En évoluant dans un environnement sécurisant et dynamique, les pensions de famille offrent tous les chances d’une réinsertion durable à leurs pensionnaires. "L’été, on organise des apéros ou des repas dans la petite cour ", raconte Eric Joly, qui mentionne aussi les activités jardinage, qu'il apprécie particulièrement.
Monica Erhenberg, professeur retraitée, vit à la pension depuis une douzaine d’années. Victime d'un grave AVC qui a morcelé sa famille, elle s'est retrouvée seule, isolée. Ici, elle a trouvé un refuge.
"Je suis plus sereine, avant j'avais une vie un peu... pas tourmentée mais... je n’arrivais pas à trouver ma place... Et ici je l'ai trouvée".
Confortablement installée sur sa petite terrasse, elle ajoute en souriant, "c’est une nouvelle vie pour moi, et je retrouve mes enfants qui peuvent venir me voir ici".
An Ardèche, il existe quatre établissements comme celui-ci. Aujourd’hui en France, 20 000 personnes habitent dans ces logements, notamment après avoir connu la rue. L'État prévoit d'ouvrir 10 000 nouvelles places dans l’hexagone d'ici 2022.