Patrimoine : une salle secrète du palais des évêques de Bourg-Saint-Andéol restaurée par des passionnés

En 2013, les propriétaires du palais des évêques de Bourg-Saint-Andéol (Ardèche) découvrent une pièce cachée au sein de l'édifice. Il s'agit d'une salle de justice, décorée à l'image du temple de Salomon. 10 ans plus tard, sa restauration est terminée et elle sera bientôt ouverte au public.

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C'est une découverte que Jacques Lextreyt est très heureux de pouvoir enfin présenter aux amoureux de patrimoine et d'histoire. Propriétaire avec sa femme du palais des évêques de Bourg-Saint-Andéol en Ardèche depuis 2000, il a restauré avec une douzaine de bénévoles la salle de justice du palais, résidence des évêques, comtes de Viviers du XIVe au XVIIIe siècle. 

8 années de restauration minutieuse ont été nécessaires pour rendre à cette galerie sa splendeur d'antan. Décorée sur commande de Monseigneur Louis François de la Baume de Suze, évêque de Vivier de 1628 à 1670, elle est inspirée des descriptions bibliques du temple de Salomon à Jérusalem. 

Redécouverte par hasard 

Pourtant, cette galerie a failli rester cachée encore de longues années. C'est tout à fait par hasard que Jacques Lextreyt en a fait la découverte. En 2013, la salle était séparée en deux et la fresque était totalement recouverte. Alors que, d'un côté, le propriétaire avait établi son bureau, sa femme a émis le souhait de se servir de l'autre côté pour en faire son office.

"Je lui ai dit que j'allais lui blanchir cette pièce", nous explique le propriétaire des lieux. "Je suis donc monté sur un escabeau et en grattant, j’ai découvert du bleu. On a commencé à gratter et petit à petit, on a découvert des peintures abîmées, trouées... On a tout de suite abandonné l'idée de l'office évidement !" 

Une salle multifonction

Très vite, les propriétaires et les bénévoles de l'association du Palais des évêques font le lien entre cette découverte et la salle de justice mentionnée dans les écrits portant sur l'édifice, mais inconnue jusque-là. 

"À Bourg-Saint-Andéol, l’évêque était également comte de Viviers, il avait donc tout droit de justice, la basse comme la haute", nous explique Hervé Orband, historien et bénévole de l'association. Dans cette salle, il traitait tous types d'affaires. "Seules les plus grandes étaient renvoyées au Parlement de Toulouse". 

Cette galerie s’inscrit dans les grands décors du milieu du XVIIème. Je pense qu’elle a son rang entre la galerie de Fontainebleau et la galerie du château de Versailles.

Hervé Orband, historien

Néanmoins, les écrits nous permettent de savoir que cette salle avait d'autres fonctions. "Cest aussi une salle politique. On sait par les textes qu’au moins par trois fois les États du Vivarais (région historique dont la capitale était Viviers, ndlr) s’y sont réunis, entre 1756 et 1760", poursuit l'historien "Il s’agit d’une cellule de décision politique, ils décidaient l’assiette de la répartition des impôts."

Enfin, la salle de Justice avait également une fonction honorifique. "Elle porte le nom de galerie, de ce fait, je suppose que l’évêque aimait à la montrer. C’est une salle de prestige", suppose le bénévole. "Cette galerie s’inscrit dans les grands décors du milieu du XVIIème. Je pense qu’elle a son rang entre la galerie de Fontainebleau et la galerie du château de Versailles".

Un style baroque typique de la Contre-réforme

La fresque, qui recouvre l'intégralité de la pièce, s'inscrit tout à fait dans son temps. Son style baroque est typique de la Contre-réforme, influencée par les peintres italiens et hollandais. 

"Ce qui est tout à fait représentatif, c’est le centre de la voute. Elle a une ouverture ovale. Elle permet à la lumière de se rependre par le haut", explique Hervé Orband. "C’est là tout à fait la peinture de Caravage, qui était révolutionnaire dans l’utilisation de la lumière."

8 ans de restauration minutieuse 

"La première fois que je l’ai vu, visuellement, c’était catastrophique. Il y avait plein de petits éléments de la fresque qui restaient", raconte Christian Frement, artiste peintre à qui Jacques Lextreyt a demandé de superviser la restauration. 

Il nous explique que le travail fut plus long et minutieux que compliqué. La documentation et quelques techniques de base lui ont permis de déterminer que la peinture était faite parfois à l'huile et parfois à l'eau. Ils ont également facilement déterminé les motifs effacés par le temps, du fait de la récurrence de certains motifs. "Comme nous étions en symétrie, nous avons pu recréer l’ambiance. Nous n’avons rien inventé. Nous sommes appuyés sur ce que nous voyons", explique le propriétaire des lieux. 

La tâche la plus ardue consistait à remettre en état les murs avant les premiers coups de pinceaux. Durant 4 ans, Jacques Lextreyt s'y est attelé à cette tâche. "Tout a été martelé au 18 ou 19ᵉ siècle. Il y a eu plein de coups de piolet pour faire tenir de la chaux dessus, par centaines de milliers", explique Christian Frement. "Il fallait donc tout enduire, tout doucement, tout bien nettoyer pour qu’on ait uniquement à retoucher.

Ce travail titanesque réalisé, il restait à l'artiste à repeindre la fresque. 4 nouvelles années furent nécessaires, à raison de 3 à 6h de travail hebdomadaire. L'occasion pour les bénévoles de replonger dans des temps anciens. "On en plaisantait, on se disait que juste là, il y a 300 ans, quelqu’un faisait la même chose que nous, ce côté-là est vraiment touchant", conclut l'artiste. 

Pour visiter la galerie, il faudra attendre le 15 juillet. Elle sera accessible jusqu'au 15 août.

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