Concours d'éloquence : "c'est une sacrée expérience", 6 détenus de la maison d'arrêt de Privas se donnent en spectacle

En Ardèche, ce mardi après-midi, le théâtre de Privas a accueilli un concours d’éloquence. En lice, des candidats hors du commun : des détenus de la Maison d’arrêt. Ce concours, organisé par le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation de l’Ardèche, a nécessité un gros travail de préparation.

"J'ai trouvé ce concours extraordinaire. J'ai été absolument séduite, émue. J'ai trouvé qu'ils étaient intéressants, sincères et convaincants (...) Dépasser le trac, le regard des autres, c'est une sacrée expérience", Christine Bolze. Cette spectatrice conquise est membre des "Rencontres Estivales autour des Enfermements" qui se déroulent à Dieulefit, dans la Drôme. Les jeunes gens qu'elle est venue applaudir ce mardi 5 mars, sont six détenus de la maison d'arrêt de Privas. Ils sont montés sur scène pour prendre la parole en public et en solo. 

Parcours chaotiques

"J'ai 19 ans, j'ai été remis en famille d'accueil à la demande de ma mère, j'ai été séparé de mon frère jumeau... " ainsi commence le jeune homme. Il est seul sur scène. La salle est plongée dans le noir.  Pas un bruit. Tout le monde écoute. C'est un jeune détenu de la maison d'arrêt de Privas qui parle de son parcours chaotique, de sa colère, de la prison "qui a mis fin à ses bêtises". Avec une voix calme et distincte, le jeune homme participe au premier concours d'éloquence organisé pour les détenus de la maison d'arrêt de Privas. Le concours s'est déroulé au théâtre de Privas.

Six jeunes hommes, condamnés à de courtes peines, ont pris publiquement la parole. Certains avaient le trac et pourtant ils se sont pliés à l'exercice. Une expérience largement positive. Beaucoup ont parlé de leurs parcours, de ce qui les a conduits derrière les barreaux. Des histoires d'enfants qui ont "mal grandi", piégés entre parents absents et mauvaises rencontres. "Je voulais parler de ces enfants-là, ça me tient énormément à cœur", explique un des candidats.  

Stressant et valorisant

"C'était impressionnant. C'est stressant, mais valorisant. Les gens sont là pour nous écouter, sont fiers de nous, c'est génial, ça donne envie d'avancer et de progresser", explique Anthony, l'un des six candidats. En évoquant leurs parcours respectifs, ces six détenus de la Maison d’arrêt de Privas, condamnés à des courtes peines, se sont mis à nu. Participer à un concours d'éloquence, l'exercice ne va pas de soi. Il relève de la performance. Les candidats ont cependant su séduire un jury attentif à leurs arguments, à leur sincérité et à leur verbe.

"C'est aussi pour montrer mon parcours que j'avais compris mes erreurs et sur quoi je devais avancer. Je voulais faire voir que je n'étais pas bête et que je pouvais passer à autre chose et avancer sur mes erreurs. C'est vraiment génial", ajoute Anthony. Dans la salle, la famille et les amis étaient là, nombreux pour écouter et encourager. 

"Je l'ai trouvé très stressé et ravi d'être là, de pouvoir dire ce qu'il avait à dire, d'avoir cette expérience", explique le cousin d'un des compétiteurs. "J'étais fier. Je trouve que c'est très courageux de leur part à tous", ajoute sa marraine.

À la fin de leurs prestations, les candidats ont été chaleureusement applaudis par la salle et les membres du jury.  

Parler, parler, parler

Expérience positive pour Christophe aussi : " j’ai retrouvé énormément confiance en moi. C'est quelque chose que j'avais perdu à l'extérieur. Ça m'a permis de recréer des liens sociaux. J'étais très stressé, c'est quelque chose que je n'aurais jamais fait dehors (...) Humainement, c'était une magnifique expérience. Je n'en tire que du positif", explique-t-il. 

Depuis le mois de septembre et pour la première fois en Ardèche, des ateliers d’éloquence sont proposés aux détenus de la maison d'arrêt de Privas. Vingt-trois d’entre eux en ont profité, six ont franchi le cap et sont montés sur scène pour affronter un public.

Au fil des mois, au sein de la prison ardéchoise, "parler" est devenu un mantra pour ces détenus. "Ce travail leur apporte de la confiance en soi, l'estime de soi", explique Marianne Schlegel, coordinatrice culturelle au Service Pénitentiaire d'Insertion et de Probation. "Ils apprennent à se connaître et à penser par eux-mêmes. Ils pensent par eux-mêmes, pas à travers leur enfance compliquée, pas à travers ce qu’on leur inflige ou impose par rapport à leur délit, mais ils réfléchissent par eux-mêmes".

Christophe et Talhal sont les gagnants ex æquo du concours. Mais tous les participants ont fait un beau geste : ils ont décidé que les 2000 euros du concours seraient partagés à parts égales. L'argent ira à trois associations caritatives du département

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