Que s’est-il passé lors d’une battue au sanglier à Chanéac, dans le nord Ardèche, le 16 décembre dernier ? Sept chiens de chasse ont été tués sur une propriété privée alors qu’ils s’attaquaient aux cochons d’une communauté rurale. Inadmissible pour la fédération de chasse du département. Les membres de la communauté “Longo Maï” se défendent.
Le 16 décembre, c'est un carnage qui s’est déroulé en marge d’une battue au sanglier : sept chiens de chasse appartenant à des chasseurs d’Arcens ont été abattus. Les propriétaires des chiens sont sous le choc. La mort de ces sept chiens de chasse aurait-elle pu être évitée ? C’est ce que croit le patron des chasseurs de l’Ardèche. Les chiens ont été tués par des membres de la communauté agricole “Longo Mai”. Ces derniers ont donné leur version des faits : ils auraient voulu défendre leurs cochons attaqués par les chiens.
Rappel des faits
Samedi après-midi Benoît Brolles, un Ardéchois de 24 ans chassait le sanglier dans la campagne près de chez lui, entre Arcens et Chanéac. Il était en compagnie d'un ami, et les deux compères étaient épaulés par leurs sept chiens de chasse, pour lever les proies. Au cours de la battue, la meute s'est mise à poursuivre un sanglier à toute allure, jusqu'à sortir totalement du champ de vision des chasseurs. Lorsque ces derniers ont retrouvé leurs chiens, grâce aux balises GPS intégrées à leurs colliers, ils étaient tous les sept morts, sur le terrain non clôturé de la communauté Longo Maï, qui vit en autogestion.
Une scène macabre insoutenable
Pour les chasseurs, qui auraient mis un certain temps à rejoindre la dernière localisation de leurs chiens, la découverte est choquante. Ils retrouvent leurs animaux tués d'une balle dans la tête, ou même par des coups de lames dans les flancs et la gorge. Des photos des corps de ces chiens circulent sur les réseaux sociaux, mais nous avons fait le choix de ne pas les publier directement, pour ne pas heurter la sensibilité des lecteurs. Selon les deux amis, lorsqu'ils sont arrivés sur les lieux, plusieurs membres de la communauté recluse étaient en train d'ôter les colliers GPS des animaux. S'en serait suivi une vive altercation entre les camps, tous deux armés, mais les chasseurs ont finalement récupéré les corps des animaux avant de quitter les lieux.
L'association communale des chasseurs agréée d'Arcens , village d'où les chiens étaient originaires, a déposé plainte le jour même en gendarmerie. "Un tel déferlement de violence est inadmissible, j'espère que les associations de défense des animaux vont s'en emparer", a réagi Jacques Aurange président de la fédération des chasseurs du département, auprès de nos confrères de France Bleu Drôme Ardèche. Il a d'ores et déjà annoncé que la fédération ardéchoise de chasse se portait partie civile.
“On n’a pas eu le choix”
Dès l’arrivée des chasseurs, les membres de cette communauté, qui vit au lieu-dit Treynas sur la commune de Chanéac, ont indiqué qu'ils n'avaient fait que défendre leurs animaux d'élevage, en l'occurrence des cochons laissés en liberté, et qui auraient été frénétiquement pris pour cible par la meute de chien.
Sandra, membre de la communauté, raconte avoir été témoin de l'attaque des cochons par les chiens. Elle décrit une véritable scène de curée, d’une violence extrême avec des chiens qui mordraient les cochons. “Quand on est arrivés, les chiens étaient en train de manger nos cochons. C’était la panique. On a essayé de les sauver. On a sauté dans les buissons”. La jeune femme explique avoir essayé avec d’autres membres de la communauté tenter de “tirer les chiens”. En résumé, de leur faire lâcher prise. “Mais dès qu’on en enlevait un, il revenait. Certains chiens, on n’arrivait pas à les attraper (…) on a tiré un coup de feu en l’air pour qu’ils s’arrêtent mais ça les a excités encore plus”. “On n’a pas eu d’autre recours que de faire ça... de les abattre”. Elle explique qu’ils se sont retrouvés face à des chiens “faits pour tuer à crocs des sangliers et c’est ce qu’ils faisaient avec nos bêtes”. “C’est terrible d’en arriver là. On n’aurait jamais voulu que ça se passe comme ça”, explique la jeune éleveuse émue. “Les chasseurs auraient aussi pu réagir s’ils avaient été plus proches, ils sont arrivés une demi-heure après”, ajoute-t-elle.
Sandra, encore choquée, dit aussi comprendre l’émotion des chasseurs. “Je ne suis pas sortie indemne de cette histoire, je suis traumatisée aussi”. La communauté aurait reçu des menaces de mort, sur les réseaux et par téléphone. Elle entend porter plainte. Quant aux cochons blessés, un rapport vétérinaire doit être effectué a précisé l'éleveuse.
Sur ces terres particulièrement reculées, depuis les années 70 une vingtaine de personnes vivent en autosubsistance; presque coupés du monde, essentiellement grâce à l'agriculture. Il s'agit de la communauté "Longo Maï" de Treynas, que l'on dit descendante de la communauté du tueur fou d'Ardèche Pierre Conty, elle-même contrainte de quitter un autre hameau de Chanéac à la même époque où cette nouvelle communauté à vu le jour.
Des autopsies pour en savoir plus
Mais les chasseurs ont du mal à croire en cette version d'un sauvetage. Certains membres de la communauté auraient déjà menacé les chasseurs de tuer leurs chiens s'ils s'approchaient trop de leurs terres. De plus, toujours selon les propriétaires des chiens, certains indices sur les corps des animaux indiqueraient qu'ils auraient été tués un par un, à bout portant. Des autopsies vont être réalisées par la gendarmerie pour tenter d'en savoir plus.
Depuis les faits, un représentant de la communauté a toutefois sollicité une rencontre avec l'association communale de chasse agréée d'Arcens pour réamorcer un dialogue, et éviter qu'une "guerre de clan" ne s'instaure dans cette campagne reculée.