Cassaniouze, Arnac, Lapeyro... en Auvergne, les communes au nom burlesque ne manquent pas. En France, il existe une association qui regroupe ces villages au nom amusant.
Connaissez-vous des villages au nom improbable ? En Auvergne, il existe quelques communes ou lieu-dit au nom amusant, pittoresque ou imprononçable. Pour rassembler ces villages, Patrick Lasseube a eu une idée : fonder le groupement des communes au nom burlesque. “Il est né en 2003, en pays toulousain dans un bourg qui s'appelle en occitan Minjocèbos, qui veut dire en français le lieu où habitent les mangeurs d’oignons. Et c'est à partir de ce nom pittoresque que l'idée m'est venue de regrouper d'autres communes.” La première commune sollicitée a été Clochemerle, qui avait déjà une notoriété européenne dans ce domaine. Après pratiquement 19 ans d'existence, pas moins de 43 mairies ont adhéré au groupement : "C’est comme une un groupement d'intercommunalité puisque les communes adhèrent par délibération municipale. C'est une affaire sérieuse”, insiste-t-il. “Nous ne courons pas après le nombre mais nous courons après des municipalités qui sont partantes pour, d'une part, maîtriser l'auto-dérision et d'autre part, faire parler d'elles.”
Des adhérents en Auvergne
L'intérêt pour Patrick Lasseube est de donner de la visibilité à ces communes qui ont un nom atypique : “ C'est profiter de son nom pour se faire un nom. Mais, au-delà de ça, on s'est rendu compte que finalement, ces territoires et ces communes de France ont toutes leur originalité, toutes leur richesse patrimoniale. C’est une façon de mettre sur le devant de la scène nationale ces petites communes.” En Auvergne Cassaniouze, Arnac et Vieillevie, toutes 3 des communes du Cantal, ont adhéré. Mais d’autres pourraient y prétendre. Cette carte recense quelques communes au nom atypique ou drôle, comme Pignols dans le Puy-de-Dôme, Lapeyro dans le Cantal ou encore Ouides en Haute-Loire. Il y a Montcocu par exemple : “ Nous, on a Cocumont dans le Lot-et-Garonne. Ce qui est marrant c'est qu'en toponymie. Ça s'appelle une tautologie, c'est une répétition, on a deux fois la même chose. Cocu et mont, ça veut toujours dire mont”, s’amuse Patrick Lasseube.
Michel Cabanes, maire d’Arnac, dans le Cantal, est ravi d’avoir adhéré au groupement : “C’était quand même intéressant de se retrouver tous ensemble au moins une ou 2 fois par an de façon à échanger. C'était une façon de communiquer sur nos communes qui ont un nom assez particulier.” Cet édile et ses administrés ont beaucoup d’humour en ce qui concerne leur gentilé : “La question qui nous est souvent posée c’est : comment s'appellent les habitants d'Arnac ? Alors évidemment, on répond les arnaqueurs, ce qui n'est pas le cas puisque ce sont les Arnacois et les Arnacoises”.
"Ah mais c'est l'arnaque"
Et souvent, les visiteurs s’en amusent : “Nous avons un village de vacances où passe quand même pas mal de monde. Au moment de payer, si on demande un petit supplément parce que les les résidents ont souhaité avoir un service en plus, par exemple au niveau du SPA, on dit, ça fera tant de plus. Alors tout de suite on nous dit : “Ah mais c'est l'arnaque ici !” Ça, c'est, c'est du réchauffé, mais bon ils ne peuvent pas s'empêcher de nous le dire”, raconte Michel Cabanes. Arnac compte 180 habitants et aucune rivalité avec Arnac-la-Poste : “ Pas du tout!”, s’offusque le maire. ”On s'échange du courrier parce que souvent il y a des erreurs. Le courrier d’Arnac, Cantal va à Arnac-la-Poste et vice versa. Il y a aussi Arnac-Pompadour. Je ne vous dis pas les confusions. On a même déjà des gens qui avaient réservé à un séjour à Arnac, Cantal et ils se sont retrouvés à Arnac-Pompadour. Au téléphone ils me disent qu’ils ne trouvent pas le village de vacances et c'est normal, ils étaient à 2h30 de chez nous.” Parfois, des moqueries leur reviennent aux oreilles, mais “c'est toujours bienveillant”, rassure Michel Cabanes. Il ajoute : “On traite cette association avec beaucoup de légèreté tout en étant sérieux sur les comptes bien entendu. On essaie de faire partager cette bonne humeur à tous les participants de notre de ces rencontres.” Du sérieux sur les comptes et donc pas de risque d'arnaque ? “Non, pas du tout !” assure le maire.
Des histoires pittoresques
Ces histoires amusantes sont légion, selon Patrick Lasseube : “Les 43 communes ont toutes des histoires aussi pittoresques que les unes que les autres, mais il y en a une en particulier qui m’a marqué parce que c'est une toute petite commune qui compte 50 habitants dans les Alpes. Elle s'appelle Longcochon, elle n’a pas d'Église, pas de Halle, il n'y a pratiquement pas de bourg-centre, c'est dans la ruralité totale. Le maire de cette commune a réuni les habitants dernièrement pour leur trouver un gentilé puisqu'il n'avait pas de nom pour les habitants de la commune de Longcochon. Finalement, après un référendum local, le nom des couche-tard a été adopté. “ Selon lui, c’est une des raisons qui poussent ces petites communes à les rejoindre, “c’est pour partager des choses sérieuses. Ne pas avoir de nom d'habitants, c'était quand même quelque chose à quoi il fallait remédier.”
Tirer du positif de son nom
Pour Patrick Lasseube, habiter une commune avec un nom décalé n’est pas source de gêne, bien au contraire : “Bien souvent, les gens qui habitent un lieu avec un nom pittoresque, c'est un peu comme un nom de famille. Celui qui le porte ce nom de famille ou ceux qui habitent dans ce village n'y prêtent plus attention. Pour eux, c'est une chose commune, c'est surtout le regard des autres : c'est le regard extérieur qui peut montrer du doigt ou rigoler, ou plaisanter avec ça. Beaucoup de personnes qui habitent ces communes sont totalement indifférents à ce que peuvent penser les autres jusqu'au moment où on met le doigt dessus”, indique Patrick Labeusse. Attention : s’ils ont de l’autodérision, pas question pour lui de tomber “dans le graveleux, le grotesque” : “Nous ne sommes pas non plus comme Montcuq avec Le petit rapporteur, pour se moquer de ces communes. Bien au contraire, c'est tirer tout le positif possible d'avoir un nom particulier."
Un tour de France des communes au nom burlesque
“ Il y a une commune dans l'Orne qui s'appelle Le Cercueil. Si vous habitez Le Cercueil, eh bien vous habitez Le Cercueil. Mais pour les gens du Cercueil ce n’est pas une originalité, c'est comme ça. C'est comme les patronymes, les noms mêmes les plus tordus, les familles y tiennent beaucoup et ne penseraient pas à le changer. Il en est de même pour les pour les communes ”, rappelle Patrick Lasseube. Et c’est même, selon lui, un atout touristique : “Il fut un temps où nous avions fait un passeport des communes, un peu comme le carnet de pèlerins. À chaque fois que vous passiez dans une commune, vous faisiez tamponner à la mairie et ça avait très bien marché. C'était pour vérifier justement s'il y avait un engouement à faire le Tour de France des communes aux noms pittoresques. On a aussi le témoignage des maires de ces communes. Des personnes disent : “On fait le tour des communes au nom burlesque, on veut voir comment est fait Arnac, Plumaudan, Beaufou” et j'en passe.” Certains se lancent donc dans un tour de France de ces communes.
De nouvelles adhésions
Pour recruter de nouvelles communes, 2 démarches existent selon Patrick Lasseube : “Nous lançons de temps en temps quelques campagnes de recrutement, mais bien souvent c'est par le volontariat direct que les maires nous contactent. On est de plus en plus attractif et de plus en plus de mairies nous contactent pour savoir comment adhérer à notre groupement.” Parfois, l’adhésion est elle-même burlesque : “Une des dernières recrues est une commune de la Meuse. Un petit village qui s'appelle Messein. On faisait justement un grand marché gourmand pour le grand public à Monteton en Lot-et-Garonne. Et le maire de Messein nous a contacté en disant “Mais si Monteton à une telle notoriété et est capable d'organiser cette fête, alors que notre petit village est complètement anonyme, eh bien nous voulons bien nous joindre à votre fête.” Une autre manifestation nationale aura lieu les 27 et 28 août dans le Lot-et-Garonne, dans la commune de Bourgougnague.