Jardin : pourquoi les vers de terre sont les amis du potager

Peu ragoutant, tout gluant, le ver de terre n’est pas l’animal le plus attrayant. Pourtant, il est considéré comme un ingénieur de l’écosystème. On vous explique pourquoi le ver de terre est l’allié des jardiniers.

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Qui n’a jamais joué, enfant, avec un ver de terre tout gluant ? Le lombric est un animal méconnu du grand public. Mais savez-vous que c’est l’ami des jardiniers ? Didier Flipo, maraîcher bio dans le Cantal et fondateur de la chaîne YouTube Mon potager plaisir, explique pourquoi cet animal est précieux : « C’est l’ami du jardinier car c’est l’un des êtres vivants les plus efficaces pour travailler le sol, dans le bon sens du terme. En gros, il vient remplacer une charrue. On a tous les avantages de la charrue sans les inconvénients. Il va mélanger les différentes couches du sol pour permettre une bonne répartition des nutriments pour les plantes. Il va aérer le sol, grâce à ses petites galeries. Cette aération va permettre de faire rentrer de l’oxygène en profondeur dans le sol et de mieux gérer les excès d’eau. Le vers de terre va structurer le sol avec le mucus qu’il va produire. Le sol va mieux supporter les tassements et les excès d’eau ». Le jardinier ajoute : « C’est un des organismes qui est le plus facile à repérer. Du coup, quand on voit qu’il y a des vers de terre, cela veut dire que tous les autres organismes sont là. C’est une sorte de caractère indicateur qui montre la bonne santé du sol ».

Un animal à préserver

Le ver de terre peut s’avérer très utile : « Grâce à eux, je n’ai plus besoin de travailler mon sol. Je n’ai plus de motoculteur. De temps en temps, je mets un petit coup de grelinette mais c’est vraiment très rare. Il ne faut pas apporter de produits chimiques de synthèse, pas de produits phytosanitaires qui auraient un effet très négatif sur les vers de terre. Il ne faut pas non plus travailler le sol, parce que, par exemple, quand on utilise un motoculteur, on va réduire en miettes les vers de terre. Grâce à une démarche globale, petit à petit, on va avoir de plus en plus de vers de terre et on aura moins besoin de travailler le sol ».

"Très basiquement c’est un tube digestif avec du muscle autour"

Mickaël Hedde est directeur de recherche à l’INRAE (l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement). Ce spécialiste des vers de terre définit cet animal : « Un ver de terre est un invertébré qui appartient au groupe des annélides. On le définit par un certain nombre de caractéristiques qu'il présente : pas d’yeux, pas de pattes, pas de cerveau, plusieurs cœurs, plusieurs reins…Très basiquement c’est un tube digestif avec du muscle autour. Il y a actuellement entre 100 et 150 espèces décrites en France métropolitaine et on en découvre encore. On est en train de découvrir plein de nouvelles espèces en Guyane, entre 30 et 40. Dans le monde, il y a à peu près 4 000 espèces connues mais on suppose très fortement qu’on est entre 6 000 et 8 000 ».

Un animal primitif

Ce sont des animaux qui sont sur terre depuis très longtemps. Ils se sont diversifiés, avec plein d’espèces endémiques. C’est le résultat de millions d’années d’évolution. Cependant, on a du mal à dater cet invertébré : « Les vers de terre ne se fossilisent pas. On n’a que des traces potentielles de réactivité. On a quelques idées de datation car on peut avoir des horloges moléculaires sur l’ADN mais c’est assez controversé. C’est un groupe primitif ».

De nombreux bénéfices

La communauté lombricienne représente à elle seule la première biomasse animale terrestre. Une biomasse qu’il faut préserver : « Les humains peuvent tirer de nombreux bénéfices de ces animaux. C’est une des bases des réseaux trophiques aériens parce que de nombreux animaux comme les oiseaux, les sangliers se nourrissent de ces vers de terre. Ce sont des ingénieurs de l’écosystème. Ils modifient fortement le fonctionnement de l’écosystème. Ils ont des effets très positifs sur la croissance des plantes et globalement sur la diminution des aléas de l’érosion. Ils structurent les sols donc les sols vont moins se dégrader. Ils participent aussi à la limitation de certaines maladies dans le sol ».

Un rôle dans la fertilité des sols

Mickaël Hedde insiste : « Ils ont un rôle fondamental dans l’écosystème. Des travaux ont montré que lorsque les populations de vers de terre s’éteignent, cela engendre des problèmes assez importants de perte de fertilité des sols, de baisse de rendements des cultures. Cela cause aussi des problèmes de glissement de terrains car le sol n’est pas stable, va s’éroder plus facilement ». Aristote il y a 2 400 ans les appelait déjà « les intestins de la terre ». Le scientifique explique : « On considère qu’un ver de terre mange son poids de terre par jour. En quelques mois, l’ensemble d’une prairie auvergnate peut être consommé par un ver de terre, sur la première couche de sol, c’est-à-dire une trentaine voire une quarantaine de centimètres. C’est un moteur de l’environnement. Le dernier livre de Darwin était même dédié aux vers de terre. Il était assez embêté qu’il y ait assez peu de presse sur ce livre ».

Créer des vides et des pleins

Il souligne leur rôle capital : « Le ver de terre modifie le sol. Il organise le sol en créant d’un côté des galeries et en structurant le sol par des agrégats. Dans un sol homogène, les vers de terre vont créer des vides et des pleins, par leurs déjections. Ces vides et ces pleins vont favoriser la circulation de l’air et de l’eau dans le sol, ce qui est très important pour les racines. Dans ces déjections, il y a des microorganismes qui sont activés. Avec le fait de passer par le tube digestif des vers de terre, les bactéries vont se réveiller et vont participer à la minéralisation de la matière organique, à la transformation du carbone, de l’azote et du phosphore dans les sols. Tout cela va mettre ces nutriments, ces minéraux à disposition des plantes et va favoriser leur croissance ». Le ver de terre est important pour les plantes, mais pas seulement : « Cela a aussi un rôle pour les autres organismes du sol car en créant ces pleins et ces vides, cela va changer la capacité des organismes du sol à se déplacer. Il y a de la porosité qui va se créer, plus ou moins sèche. On parle d’ingénieur car il façonne le sol, il organise le sol ».

La menace des pesticides

Cependant, plusieurs menaces pèsent sur le lombric : « Les pesticides sont une menace très importante. Tous les vers de terre ne sont pas sensibles de la même façon. Mais en gros, il y a des vers de terre qui sont plus en surface, d’autres plus en profondeur. Ceux qui sont en surface sont plus exposés et plus sensibles. C’est un animal qui est exposé à de nombreuses menaces. Il se nourrit du carbone du sol. Quand on appauvrit le carbone du sol par des pratiques agricoles intensives, c’est difficile pour lui. Il est exposé à l’artificialisation. Plus on va bétonner, moins il aura d’habitat. Il est très exposé aux pratiques agricoles comme le labour, le travail du sol ». D’autre part, le ver de terre n’a pas de vie sociale : « Le ver de terre est hermaphrodite, à la fois mâle et femelle. Il n’y a pas un investissement énorme dans la recherche de partenaires, pas de cour entre les mâles et les femelles, pas de parade nuptiale. Il n’y a pas de tendance à l’agrégation, à la vie en société. Un ver de terre tout seul va être plus gros, il va investir dans la croissance mais pas dans la reproduction ». Mickaël Hedde conclut : « On a clairement un déficit de vulgarisation et de transfert de connaissances vers le public. C’est notamment pour cela que j’ai mis en place une opération de sciences participatives, #VERS2022. Elle propose aux bénévoles de retourner sur des lieux où un scientifique avait fait un prélèvement dans les années 70, pour pouvoir comparer 50 ans après ce qui s’est passé ».  Si vous souhaitez aider les géodrilologues à protéger les vers de terre et à poursuivre leurs travaux, voici le site.

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