Après la mort in utero du petit Aimé, le 18 février, à Die (Drôme), les parents avaient dénoncé la très longue prise en charge de la maman : l'enquête de l'ARS (Agence Régionale de Santé) dénonce officiellement des dysfonctionnements.
Pas de miracle, les autorités de santé ne rouvriront pas la maternité de Die (Drôme) après l'enquête sur la mort d'un bébé in utero, Aimé, en février, mais elles relèvent des dysfonctionnements dans la prise en charge de la maman.
La maternité de Die a fermé en janvier 2018, après 33 ans de mobilisation des habitants. Le 18 février, la mort du petit Aimé avait fortement ému dans toute la région, devenue un des symboles de la fuite des services publics. Sa mère, qui était à la fin de son 8e mois, souffrait, comme pour sa précédente grossesse, d'un décollement placentaire. Habitant à plus de 01h20 de route de la première maternité, les secours l'ont d'abord transférée aux urgences de Die, avant de l'héliporter à Montélimar.
L'Agence régionale de santé (ARS), qui avait déclenché une enquête, a exceptionnellement communiqué ses conclusions à trois médias, dont l'AFP, en présence du préfet Hugues Moutouh. Les deux médecins inspecteurs indépendants soulignent une prise en charge erratique pendant la grossesse avec 10 professionnels et 5 lieux différents dont le Centre Hospitalier de Montélimar.
Face à une grossesse à haut risque, "il faut une prise en charge par un professionnel". Là "il n'y avait pas de pilote", insiste Jean-Yves Grall, directeur général de l'ARS Auvergne-Rhône-Alpes. Même si ce "morcellement" peut en partie être imputable à la famille, le manque de coordination entre professionnels libéraux comme hospitaliers "n'a pas permis de garantir la vigilance nécessaire", détaille le rapport d'inspection, que l'AFP a consulté.
Et la maternité de Die n'aurait rien changé, insiste Jean-Philippe Gallat, l'un des deux médecins inspecteurs, car normalement elle "aurait dû être transportée à Valence (maternité de niveau 2B quand Die était seulement de niveau 1) dès la viabilité de l'enfant" en prévision d'un déclenchement d'accouchement.
Audit aux urgences de Valence
S'agissant du soir du drame, la famille avait souligné le défaut de prise en charge du bébé aux urgences de Die et la lenteur de l'arrivée de l'hélicoptère en provenance de Valence.
Son mari a appelé le 18 à 20h01. La patiente est prise en charge par les pompiers à 20h12. A 20h57 elle arrive aux urgences de Die. Elle est alors "intouchable" avec "un ventre de bois" et un risque de déclencher un accouchement fatal pour la maman, explique le médecin inspecteur.
L'hélicoptère lui n'arrive qu'à 22h00. La sage-femme embarquée constate par doppler mobile le décès du bébé. Il redécolle et la maman n'arrive finalement à Montélimar qu'à 22h47, soit près de 03h00 après l'alerte où elle accouchera, selon ses mots, "d'un magnifique petit garçon, mort né", qu'ils ont aussitôt décidé d'appeler Aimé.
Pour l'ARS, rien est à reprocher aux pompiers ou à l'urgentiste de Die.
En revanche, elle va mener un audit sur le fonctionnement de la régulation médicale aux urgences de Valence, qui gèrent le déclenchement de l'hélicoptère dans le cadre de la procédure de prise en charge censée pallier l'absence de maternité à Die.
"Le médecin régulateur n'a pas (eu) une appréciation appropriée de l'urgence de la situation" et il prenait en charge en même temps un patient aux urgences, souligne le rapport qui parle "d'un dysfonctionnement indiscutable". Même si un déclenchement du vol plus tôt n'aurait vraisemblablement pas permis de sauver l'enfant. Ce rapport qui "ne mésestime pas l'épuisement" des personnels de santé pourrait raviver les tensions dans ce service, en grève depuis plus de deux mois comme des dizaines d'autres en France.
Pour le Collectif de défense de l'hôpital de Die, l'ARS ne prend pas en compte "la spécificité du Diois" et "ne respecte pas le libre choix des femmes". "On a ici le plus fort taux d'accouchement à domicile de France donc la prise en charge doit être conforme à ce contexte", plaide auprès de l'AFP Philippe Leeuwenberg, président du collectif regrettant "la perte de chance" des femmes du Diois. Et il souligne la défiance locale vis-à-vis du centre périnatal mis en place à la place de la maternité. L'ARS a promis vendredi de mieux communiquer sur le fonctionnement de ce centre.