Le réchauffement climatique a un nouvel impact sur l'arboriculture dans la Drôme et l'Ardèche. En mars, les épisodes cévenols ont lessivé les pollens des arbres en fleurs bien trop tôt pour la saison. Les fruits trop précoces aussi vont subir à partir de cette nuit du 17 avril, le gel. Un double phénomène climatique qui va avoir un important impact sur les productions et les récoltes.
"Depuis quatre ans, ce phénomène est récurrent, un phénomène que l'on n'observait pas, il y a 10 ou 15 ans en arrière", explique Serge Zaka, agroclimatologue. Ce sont les conséquences du réchauffement climatique. En ce moment, les arbres fruitiers et plus particulièrement les abricotiers sont en souffrance avec le phénomène de "coulure" puis avec la prochaine arrivée du gel. Près de 80% de perte de récolte a été constatée sur notamment les abricots Bergeron en Ardèche.
#agriculture | Les aléas climatiques de l hiver ont fortement impactés la production d’abricots ardéchois. 💦❄️
— Préfète de l'Ardèche 🇫🇷 🇪🇺 (@Prefet07) April 16, 2024
🍑La préfète de l’#ardeche Sophie Elizeon s’est rendue auprès des arboricultrices et arboriculteurs de Colombier Le Vieux, accompagnée de Jean-Pierre Graule directeur… pic.twitter.com/gG3XmFUrg4
Cinq épisodes cévenols d'affilée
Début mars, la région a été balayée par cinq épisodes cévenols, avec de fortes pluies. "Habituellement, ces précipitations se déversent à l'automne et n'ont pas d'impact sur la flore", précise Serge Zaka, agroclimatologue. Au printemps, ces pluies diluviennes ont eu pour conséquence de "lessiver les fleurs des arbres fruitiers qui étaient précoces".
Excellentes nouvelles !
— Dr. Serge Zaka (Dr. Zarge) (@SergeZaka) March 10, 2024
Nos sols agricoles sont saturés en eau sur les 40 premiers centimètres (sauf dans les P.O.), ce qui nous garantit de l'eau pour les récoltes jusqu'au moins la moitié du printemps ! Ce début mars est très pluvieux dans le sud-est.
Plusieurs nuances :
-… pic.twitter.com/dd5lPZ46Cy
Pour comprendre ce phénomène, il faut aussi prendre en compte "une absence de froid cet hiver et des températures trop douces pour la saison, qui ont favorisé une floraison précoce des arbres fruitiers".
Ces fleurs avaient donc du pollen, et pour obtenir des fruits, il faut que les pollens volent et se déposent sur d'autres arbres." Pour la fécondation, il faut un mélange entre un arbre mâle et un arbre femelle", précise Serge Zaka.
Mais cette pollinisation n'a pas pu avoir lieu correctement car "la plupart des pollens ont coulé au sol à cause des pluies, avant de pouvoir s'envoler", explique le spécialiste. C'est ce que l'on appelle "la coulure".
[2/4] La coulure provient d'un excès d'eau pendant la floraison, qui fait "couler" le pollen (problèmes de fécondation). Cela engendre la chute des fleurs. Or, cette année, la floraison a eu lieu très précocement et s'est superposée à plusieurs épisodes cévenols hors saison. pic.twitter.com/lFKKOSzd9R
— Dr. Serge Zaka (Dr. Zarge) (@SergeZaka) April 16, 2024
Les fleurs ont donc fané sans produire de fruits, "on a observé une chute des fleurs en pleine floraison", raconte Serge Zaka, "ce qui va avoir un impact sur le rendement des notamment des abricots dans la Drôme et l'Ardèche".
La crainte du gel
Dès ce mercredi soir, les températures vont baisser fortement dans les deux départements, " avec du froid venu de l'est accompagné de vent", précise Serge Zaka.
La végétation est très en avance, "la vigne a deux semaines d'avance, les grandes cultures comme le blé, ont bien trois semaines d'avance, et les arbres fruitiers ont eux près d'un mois d'avance", constate l'agroclimatologue, " pour les rares arbres qui ont pu polliniser, il y a déjà de petits fruits, ce qui est très rare à cette période. Ils vont subir de forts dégâts", prévient Serge Zaka.
En effet, si la floraison était normale, les arbres seraient en fleurs, et " ils peuvent résister jusqu'à -2°, avant que cela ait un impact à cet état-là, sauf que les fruits subissent des dommages à partir de -0,5", explique Serge Zaka, agroclimatologue.
Ces deux phénomènes climatiques superposés vont donc avoir un impact important sur la production et les récoltes de fruits dans la Drôme et l'Ardèche.
Selon le spécialiste, cela fait environ quatre ans que l'on assiste à ces nouveaux phénomènes de dérégulation de la météo, entraînant de nouvelles conséquences sur les végétaux en lien avec le réchauffement climatique.