Faux gardien, serrures changées, locataire viré : ils sont soupçonnés d'avoir organisé des squats chez leurs voisins

Ce jeudi 12 octobre, deux personnes sont poursuivies devant la justice pour escroquerie à Annemasse, en Haute-Savoie. Elles sont soupçonnées de s'être accaparé des appartements et d'y avoir installé leurs propres locataires, organisant même un syndic auto-proclamé au sein de leur résidence.

"Je me suis dit : 'Il y a un malentendu, ce n’est pas possible ! C’est tellement hallucinant comme histoire !' Je n’arrivais pas à y croire." En septembre dernier, Christelle Combépine est sur la route quand elle reçoit un appel de l’agence immobilière à qui elle a confié la gestion de son appartement dans la résidence du Clos-Fleury, à Annemasse. Elle apprend que son locataire a été mis à la porte sans en avoir été informée. "Il est parti pour le week-end. Quand il est revenu le lundi, il avait les serrures changées et un mot sur sa porte lui disant : 'Veuillez récupérer vos meubles et vos effets personnels chez le gardien'."

Ce "gardien" lui intime de quitter les lieux. D’autres personnes sont installées dans l’appartement. Et le cas n’est pas isolé : si Christelle Combépine est parvenue à évacuer les squatteurs après intervention des forces de l’ordre, dans la résidence trois autres logements sont toujours occupés illégalement. À l’œuvre : des copropriétaires, qui auraient aussi mis la main sur des parties communes – jusqu’à apposer un cadenas sur l’ancienne loge, toujours en place ce jeudi 12 octobre.

"C’est un signe qui nous est donné", analyse Mickaël Richard, membre du conseil syndical. "Il y a un rapport de force et ils ne comptent pas s’arrêter là." Selon lui, la situation, "complètement ubuesque", se serait dégradée au fil des années. "On était très attentifs à ce qui se passait sur les parties collectives mais là c’est vraiment monté crescendo, témoigne-t-il. J’étais abasourdi que ça puisse arriver et que l’on puisse, en toute impunité […], s’accaparer en France, au 21e siècle, des appartements."

Syndic factice

"Ils ont pénétré dans des appartements libres, de propriétaires qui n’étaient pas dans la région ou qui étaient en vente", expose Florian Delarue. "Vous arrivez, détaille le directeur du syndicat de copropriété IBG, vous percez la serrure, vous faites entrer des locataires en vous faisant passer pour les propriétaires. […] Ils pensent avoir signé un bail avec le vrai propriétaire ou, ce qui est le cas de certains occupants illicites, ils sont dans l’escroquerie et participent activement." Des propriétaires auto-proclamés qui auraient même monté un faux syndicat de copropriété grâce à une attestation obtenue de l'Agence nationale de l'habitat (Anah) sur une base déclarative.

Une fois que vous avez ce "vrai-faux" [document, NDLR], la porte est ouverte. Vous pouvez récupérer la signature sur les comptes en banque de la résidence, devenir le nouveau titulaire des contrats, envoyer des ordres de service aux entreprises…

Florian Delarue, directeur du syndicat de copropriété IBG

Plusieurs plaintes ont été déposées. Une enquête a été ouverte par le parquet de Thonon-les-Bains, qui a débouché mardi sur le placement en garde à vue de trois personnes. Ce jeudi, un homme et une femme ont été entendus et sont poursuivis, notamment pour "escroquerie par la mise à disposition lucrative d'un bien immobilier appartenant à autrui et violation de domicile" et placés sous contrôle judiciaire, précise le procureur de la République Bruno Badré. D’ici mars et leur convocation devant le tribunal correctionnel, ils ont interdiction d’entrer en contact avec les victimes et "d’exercer toute activité en lien avec les faits".

D’autres investigations sont également menées par le commissariat d’Annemasse, après des violences survenues en septembre. "Afin de sécuriser l’ensemble des résidents et éviter la réitération de ces actes inadmissibles, des effectifs de police patrouillent régulièrement aux abords de l’immeuble", précise la préfecture de la Haute-Savoie. Les appartements toujours occupés doivent désormais être vidés sous 10 jours sous peine d’expulsion. "On est dans l’attente que ça se finisse, appuie Mickaël Richard, qu’on puisse retrouver la paix et la sérénité dans notre copropriété."

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