"On n’a encore rien produit de similaire" : face aux catastrophes naturelles, des scientifiques imaginent un "fascicule d'aide" aux acteurs locaux

Du 4 au 6 novembre dernier, sous la houlette d'un programme européen, une vingtaine de spécialistes des risques naturels se sont réunis à Courmayeur (Italie) pour confronter expériences et modes de gestion des conséquences du réchauffement climatique. Une première qui doit déboucher d'ici le printemps prochain par l'élaboration de fiches pratiques pour aider les gestionnaires du risque sur le terrain.

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"Ça nous est encore impossible de prévoir où et quand une catastrophe naturelle va se déclarer. En revanche, grâce aux connaissances scientifiques que nous accumulons les uns et les autres, nous pouvons certainement trouver le moyen d'aider à mieux gérer les situations d'urgence", l'ambition est grande pour Yves Bühler, coordinateur suisse du "Residency Living Lab".

Cette résidence scientifique a été organisée pendant trois jours à Courmayeur (Italie), du 4 au 6 novembre, et a eu pour objectif de faire naître un premier fascicule sur la gestion des catastrophes naturelles. Un document à destination des acteurs locaux.

En compagnie d'une vingtaine de confrères, venus d'Italie, mais aussi d'Inde, d'Alaska (États-Unis), d'Allemagne ou du Canada, Yves Bühler, également directeur du centre sur la neige et les avalanches de Davos (Suisse), a bien conscience que ce rendez-vous a été une sorte de première dans le monde scientifique.

Un catalogue des modes de gestion du risque qui n'existe pas

Olivier Gagliardini, professeur à l'Université de Grenoble et membre de l'Institut des Géosciences de l’Environnement, est rompu à ces rencontres entre scientifiques. Le spécialiste des risques d'origine glaciaire y arrive généralement pour parler de son expérience acquise sur des phénomènes tels que ce lac apparu au pied du glacier des Bossons, cette poche d'eau inquiétante sous celui de Tête-Rousse, ou encore la fonte, bien trop rapide, du glacier de Taconnaz... Mais, cette fois, il a eu le sentiment de participer à l'élaboration de quelque chose de neuf dans la gestion du risque. 

"Ce type de fascicule, que l'on doit élaborer pour l'année prochaine, ça n'existe pas pour l'instant, raconte-t-il. Des fiches numérotées à plusieurs entrées, par type d'aléas que ce soit des avalanches, des écroulements de glaciers ou par pays... On n’a encore rien produit de similaire à si grande échelle".

Face à une catastrophe naturelle, pourtant, le besoin d'une aide au comportement se fait sentir à chaque nouvel épisode dramatique. Le cas récent des inondations de Valence (Espagne) est encore là pour le prouver. 

"Nous sommes ici pour mettre au point, ensemble, une façon de mieux nous comporter face à ces phénomènes extrêmes ", rappelle aux participants, Jean-Pierre Fosson, directeur de la "Fondazione Montagna Sicura", l'hôte de la réunion et porteur du programme européen "Courmayeur Climate Hub".

À chacun sa méthode de gestion du risque

"Sur la gestion de la catastrophe naturelle, il faut savoir qu'il n'y a jamais une seule et bonne méthode : chaque cas est spécifique. Entre scientifiques, nous restons donc très humbles par rapport à ce que l'on connaît déjà et, surtout, vis-à-vis de ce que l'on ne connaît pas encore", explique volontiers Olivier Gagliardini, seul représentant français de la réunion. 

Dans ces conditions, il est difficile d'attendre du futur livret à destination des gestionnaires de crise, qu'il donne une parole universelle pour tous les pays et les cas de figure : "Pour mes confrères d'Alaska ou d'Inde, le lac que nous avons vidangé en 2023 au front du glacier des Bossons, à Chamonix, c'est une flaque d'eau. Pour nous, le risque est pourtant bien présent car les enjeux sont bien plus proches", remarque le scientifique grenoblois.

Car la "flaque des Bossons" plane tout de même au-dessus de routes, d'autoroutes, de voies de communication et surtout d'habitations. Rien à voir avec les dimensions d'autres pays aux allures de continents, où l'occupation du territoire est différente et ne permet pas de mettre en place les mêmes stratégies de gestion du risque naturel.

Un carnet de contacts utiles

Ce paramètre est une difficulté de taille pour rédiger ce fameux fascicule à destination des spécialistes de la protection civile italienne, des maires ou des responsables de la surveillance des risques géologiques.

Ces derniers ont répondu présent à ce "Residency Living Lab" de Courmayeur. Évidemment curieux et intéressés par les travaux des scientifiques, ils ont souvent avoué se retrouver un peu perdus dans un "océan" de publications scientifiques, au moment de définir une stratégie à adopter face à un écroulement, une inondation ou un glissement de terrain.

Le réchauffement des océans fait s'évaporer beaucoup d'eau. Une eau qui doit bien ensuite se déverser quelque part.

Yves Bühler, coordinateur scientifique.

D'où l'intérêt pour eux, dès les prochains travaux du rendez-vous de Courmayeur au printemps prochain, de disposer d'un document synthétique contenant des exemples, des cas d'école et aussi des fiches de contacts. Y figureront noms et coordonnées de chercheurs, bureaux d'études, responsables de laboratoire.

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