TEMOIGNAGE. "J'ai perdu des amis" : médecin urgentiste et guide de haute montagne, il raconte le secours en avalanche

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L'instantané avec Pierre Muller, médecin urgentiste et auteur du livre "Secours en avalanche" ©France TV / Céline Aubert

De l’avalanche de Val d’Isère à celle du Hameau de Montroc, Pierre Muller médecin urgentiste et guide de haute montagne revient dans un livre témoignage sur les grandes interventions qui ont marqué sa vie. Des drames qui ont permis une évolution du secours et de la médecine en montagne.

D’abord un bruit, un énorme grondement, puis la coulée de neige qui dévale la pente à toute vitesse, à près de cent kilomètres à l’heure, emportant tout ou presque sur son passage. "Pour qu’il y ait une avalanche, il faut qu’il y ait de la pente, au moins 30 degrés, explique le guide de haute montagne, il faut qu’il y ait de la neige en quantité suffisante, qu’elle soit mobilisable et qu’elle se déplace. Il faut un certain nombre de conditions qui permet de grader le niveau de risque en fonction de la quantité de neige qui est tombée, de son transport par le vent, de la métamorphose de ces grains et donc de l’historique du manteau neigeux."

C’est ce phénomène que Pierre Muller, médecin, urgentiste et aussi guide de haute montagne raconte dans son livre, médecin, guide, secouriste, il raconte, sorti aux éditions Glénat. Reçu sur le plateau de France 3 Alpes, il revient son ouvrage et sur ce qui a conduit à son écriture.

Si le médecin urgentiste s’est intéressé de si près aux avalanches, c’est parce qu’elles ont marqué le début de sa carrière emportant sur leur passage des amis à lui : "J’ai malheureusement perdu quelques amis, dont mon plus proche ami Jérôme, donc je me suis logiquement intéressé à ce sujet de près comme médecin secouriste, mais aussi comme guide à essayer de déceler les pièges qu’il peut y avoir en montagne."

Du drame au progrès

Dans son ouvrage, le médecin revient sur les tragédies restées dans les mémoires. L’avalanche du val d’Isère notamment en 1970 où 39 jeunes sont morts ensevelies sous la neige : "Cette avalanche a marqué les esprits, car c’était la plus meurtrière qui n’ait jamais eu lieu en France et parce qu’elle a touché des jeunes lors d’une semaine d’intégration alors qu’ils étaient partis pour faire la fête, faire du ski et s’amuser." 

Un an après ce drame, en 1971, l’Anena (association nationale pour l'étude de la neige et des avalanches) sera créée : elle a pour but d’analyser les risques et de sensibiliser les gens, et de faire progresser la connaissance en matière de nivologie.

L’avalanche du Hameau de Montroc, dans la vallée de Chamonix, a également marqué les esprits : "Elle a été un électrochoc dans la vallée de Chamonix, car elle a frappé des habitants dans la vallée, dans leur maison. Alors qu’on se sent à l’abri chez soi. La nature a montré encore une fois qu’il fallait prendre en compte le risque centennal avant de bâtir des maisons à certains endroits de la vallée."

Ces avalanches, aussi dramatiques soient-elles, ont permis de tirer des enseignements. On dispose d’"une meilleure connaissance de la neige, une organisation plus performante des dispositifs de secours publics et privés, la participation de médecin spécialisé dans ce dispositif de secours", explique le secouriste dans son ouvrage.

La montagne, entre audace et prudence

Mais avec tous les enseignements et les progrès du monde, pour Pierre Muller la montagne doit rester un équilibre entre audace et prudence : "Connaître son guide intérieur, savoir qui décide ou plutôt si cette décision a été prise en conscience est l’enjeu capital du skieur et de l’alpiniste quand ils choisissent de s’engager ou de renoncer. Pratiquer une forme d’intériorité plutôt que d’agir sans conscience de façon automatique, guidée par une voix trompeuse que l’on qualifie à l’occasion de biais cognitifs."

Pierre Muller revient sur la dernière avalanche, la plus meurtrière de la saison, sur le glacier d’Armancette aux Contamines-Montjoie où six personnes ont perdu la vie. Une preuve pour lui que la montagne reste un endroit imprévisible, car ce jour-là, le risque avalanche était de 2 sur 5 : "L’accident, c’est souvent le “pas de chance”, cela tue plus que l’imprudence, j’en suis convaincu," conclut le médecin urgentiste.

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