C'est dans les Dolomites italiennes, sur l'une des montagnes les plus iconiques des Alpes, que s'est produite la catastrophe de la Marmolada. Tout un pan du glacier s’est effondré, faisant au moins 6 morts et 8 blessés. Selon les scientifiques, ce phénomène serait amené à se répéter, alors que la fonte des neiges s’accentue. Côté français du massif, les risques sont-ils aussi importants ?
Dans le massif du Mont-Blanc, le glacier de Taconnaz est un site connu et répertorié pour ses avalanches. C’est là qu’a été installé un bassin de réception, le plus gros complexe paravalanche du monde. "Ce glacier a beaucoup reculé mais il est toujours alimenté par des cassures de glaces qui descendent du Dôme du goûter, explique le glaciologue Sylvain Cotterand. Le Dôme du Goûter, c’est un satellite du Mont-Blanc, un glacier qui prend naissance à 4300 mètres avec de la glace en dessous de zéro degré qui reste collée au rocher. Et c’est bien le problème aujourd’hui: ce glacier qui se casse lâche des gros blocs de glace en hiver, on appelle ça des séracs, et entraîne des grosses avalanches de neige qui vont remplir ce bassin de réception".
Cette structure protège les habitations situées en contrebas. Mais d'autres sites restent en alerte car la fonte des glaces n'épargne aucun massif des Alpes.
Ce genre d'accident peut arriver aussi en Vanoise ou dans le massif du Mont-Blanc
Bernard Francou
Dans le massif du Mont-Blanc, les cordées ne sont pas à l'abri des chutes de séracs et des effondrements qui, selon les experts, seront de plus en plus fréquents lors des étés caniculaires.
Chercheur en géosciences et co-auteur du récent ouvrage "Coup de chaud sur les montagnes", Bernard Francou juge d’ailleurs "vraisemblable" que le réchauffement climatique soit à l'origine de la catastrophe survenue sur le glacier de la Marmolada, dans laquelle au moins 6 personnes ont péri. "Ce genre d'accident peut arriver aussi en Vanoise (France) ou dans le massif du Mont Blanc. Il y a 2-3 ans le glacier de Planpincieux accélérait sur le versant italien du Mont Blanc. Une grande zone au pied avait été évacuée pour plusieurs jours".
Selon lui, ce risque d'accident va avoir tendance à se produire plus fréquemment en altitude. D’où l’importance de mettre en place une surveillance accrue des glaciers. "On peut le faire maintenant avec des méthodes modernes et éventuellement alerter les populations qui vivent au pied lorsque le danger se précise, ajoute Bernard Francou. Beaucoup de glaciers potentiellement dangereux sont suivis en Suisse par des glaciologues, et à Grenoble (France) par l'Institut des géosciences de l'environnement (IGE)".
Des glaciers de plus en plus difficiles à fréquenter
A cause du réchauffement climatique, les glaciers sont de plus en plus difficiles à fréquenter pour les alpinistes en été, notamment parce qu'ils sont très secs. "De grandes crevasses se sont ouvertes dans des voies normales qui étaient faciles avant. Ça pose des problèmes pour les guides et pour les autorités locales qui se demandent quelle attitude adopter, s'il faut les équiper ou les interdire" poursuit le scientifique.
Avant de conclure: "Plein de questions se posent à l'alpinisme actuel mais c'est un sport de danger qui demande une connaissance du terrain, qui s'adapte".