Départ vendredi 4 mars à 8 heures pour Bastien. Direction la frontière polonaise. Objectif: récupérer les parents d'un ami ukrainien de longue date. Les portes de l'abri haut-savoyard des Anselmo-Rosset sont grandes ouvertes pour accueillir la famille du "fils" ukrainien.
Devant la maison d'Arthaz-Pont-Notre-Dame, le van de sept places est arrivé cet après-midi de Thonon. "Cela n'a pas été facile d'en trouver un aussi grand et surtout disponible à la location", avoue Nathalie Anselmo-Rosset. Une première constatation: lorsque l'on se renseigne pour louer un véhicule, en ce moment, les loueurs ne vous ouvrent pas grand leurs bras quand vous ajoutez qu'il s'agit de se rendre à la frontière polonaise pour récupérer des réfugiés ukrainiens.
"Je ne vois pas pourquoi d'ailleurs", ajoute aussitôt Nathalie. "Je n'envoie tout de même pas mon fils Bastien et mon oncle en plein cœur des zones de combat". Car l'opération "sauver la famille de Yuri" est justement une affaire de famille.
"Mon second fils s'appelle Yuri"
"Yuri, on l'a accueilli en 1997 pour la première fois. Il avait 11 ans à l'époque et venait prendre l'air pur de Haute-Savoie pour changer, lui qui est né dans les environs de la centrale nucléaire de Tchernobyl. Ensuite, pendant cinq ans, il est venu chaque année chez nous pendant les deux mois d'été. Quand on l'a revu adulte, c'était pour son voyage de noces, pour nous présenter son épouse: alors, comment voulez-vous que je ne le considère pas comme mon fils", raconte Nathalie.
C'est donc son "frère" Français, Bastien, 32 ans, et Michel, (l'oncle de Nathalie) qui s'occupent cet après-midi de charger le van. À l'heure où des centaines de milliers de réfugiés ukrainiens quittent leur pays, il n'est pas question de rouler à vide. Médicaments, couches pour bébés...la famille a suivi scrupuleusement la liste édictée par la Croix-Rouge pour coller au plus près des besoins des réfugiés.
Mais l'objectif numéro un: c'est de retrouver les parents de Yuri. Après avoir quitté leur ville de Korosten, en Ukraine, ils ont passé la frontière polonaise et trouvé refuge dans une école. "Mais ce n'est pas là que Bastien et Michel iront les chercher. Yuri leur a trouvé un hôtel à Katowice. C'est là-bas qu'ils devront prendre en charge Vassyl et Maria, les parents de Yuri, ainsi que sa sœur Ludmilla et son fils de 7 ans, Wasa", explique Nathalie.
1800 kilomètres seulement entre la guerre et leur "refuge" haut savoyard
C'est de la lointaine Alaska où il travaille à bord d'un bateau de pêche usine que Yuri a tout organisé. Qu'il a réussi à convaincre sa famille de quitter la ville où elle a toujours vécu. " Yuri est le seul qui ait quitté l'Ukraine. Pour travailler. Il était pompier professionnel là-bas, mais il ne gagnait pas sa vie. Le but pour nous, c'est de mettre sa famille à l'abri, ici chez nous, dans un premier temps. Et puis, après, on verra. On se débrouillera", ajoute encore Nathalie.
"Et s'il faut qu'ils partent ailleurs, plus tard, on s'arrangera pour qu'il reste tout près de nous, dans les environs. Ce ne sont pas les propositions d'accueil qui manquent autour de nous", ajoute t-elle.
Pour conforter Nathalie dans sa foi en la qualité de l'accueil haut-savoyard, l'association "Arthaz Entraide" a même mis la main au porte-monnaie pour soutenir l'opération "sauver la famille de Yuri".