Située à 30 minutes d’Annemasse, la cité médiévale d’Yvoire témoigne du riche passé de la Haute-Savoie. Classé parmi les plus beaux villages de France, le lieu attire chaque année des milliers de visiteurs. Outre ses remparts et son château, la ville intrigue aussi par son patrimoine culinaire.
Près d’un million de visiteurs viennent chaque année flâner dans la cité surnommée la perle du Léman. Yvoire a tout pour offrir une balade bucolique et historique. "C'est un village qui a été fortifié au début du XIVe siècle par l'un des comtes de Savoie qui s'appelait Amédée V. Nous nous trouvons au bord d'un lac qui est une véritable autoroute à cette période", raconte Fabienne Baillif, guide touristique à Yvoire depuis 30 ans.
"C'est aussi l'époque à laquelle les Savoie sont en train d'étendre toute leur hégémonie autour du Léman, poursuit la spécialiste. Et ils ne vont avoir de cesse de construire des châteaux dont le but est la surveillance par rapport au lac."
Une place unique sur le Léman
En 1655, la famille Bouvier devient propriétaire du château d'Yvoire. "C'était la tour de garde du village dans laquelle on se réfugiait en cas de danger, rapporte la châtelaine Anne-Monique Bouvier d’Yvoire. Il y a encore les restes d'une cave qu'on appelait 'la cave à Mandrin'. Mandrin se serait caché là très souvent, quand il faisait son commerce de sel, pour éviter aux gens de payer la gabelle."
Lors des guerres de religion, le toit de la citadelle médiévale part en fumée. Il lui faut attendre 300 ans pour le retrouver. La mystérieuse sentinelle du Léman est finalement rénovée en 1939. À cette même époque, elle devient le domicile de la famille Bouvier d’Yvoire, qui l'habite toujours aujourd'hui. Raison pour laquelle le château ne se visite pas.
"Ce n'est pas d'un confort extrême. Il n'y a pas de déco, c'est très sobre, c'est un peu militaire. Mais c'est une maison agréable quand même, pour laquelle nous sommes tous assez passionnés", sourit la châtelaine Anne-Monique Bouvier d’Yvoire.
Autour du château se trouvent les anciens espaces alloués aux domestiques, aujourd’hui réhabilités en un jardin à l'esprit médiéval. Le lieu est ouvert au public. "On devait pouvoir y trouver de quoi se nourrir, de quoi se soigner. Il y avait un côté ludique, indique Fabienne Baillif, guide touristique. Et on pouvait y pratiquer l'amour courtois."
Un patrimoine culinaire transmis par les pêcheurs
Autre témoignage du passé : le port initial de la cité d’Yvoire. "À l’époque, il devait y avoir un superbe panorama sur le lac", s'enthousiasme la spécialiste. Un point de vue imprenable d'où les châtelains "pouvaient visionner les éventuels ennemis et intervenir quand c'était nécessaire". "D'autant plus que le village d'Yvoire se trouve à l'endroit où le lac est le plus étroit, donc on comprend mieux sa position stratégique."
À la fin des guerres de Savoie, le village perd son caractère militaire. Le port subsiste grâce aux pêcheurs. Ils créent une coopérative pour se restaurer et écriront la nouvelle tradition locale : la perche du lac, sauce beurre citron. Une recette née il y a 70 ans, transmise de propriétaire en propriétaire.
"Alice Duchêne, avec deux de ses amies, trouvait que le filet de perche était un peu sec, qu'il manquait de quelque chose pour l'agrémenter", raconte Luz Victoria Dufour, responsable de salle et présidente du restaurant des pêcheurs. L'ancienne propriétaire du site élabore alors "le fameux beurre-citron", "né dans ce restaurant, il y a 70 ans".
"C'est ce qui fait la réputation du village, ça fait partie du patrimoine aujourd'hui", abonde Richard Dufour, chef cuisinier du restaurant des pêcheurs. Le secret du succès : une dose de jus de citron pour deux doses de beurre. La délicieuse authenticité de la cité d’Yvoire n’a pas fini de charmer.