"250 appels par jour", "refus de nouveaux clients" : submergés, les fournisseurs de granulés bois craignent une pénurie

Alors que les prix de certaines énergies explosent, d’autres menacent de manquer à l’approche de l’hiver. Dans les Alpes, les fournisseurs de granulés bois sont submergés par les demandes, mais la production ne suit pas.

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Pour joindre un vendeur de granulés bois, il faut s’armer de patience. Ce mardi 6 septembre, nous avons contacté treize entreprises installées en Isère, Savoie et Haute-Savoie. Seules quatre ont décroché leur téléphone.

Pour les autres, ce sont les répondeurs automatiques qui ont pris le relais. "Désolés, nous sommes en rupture de stock" invoque-t-on à Chuzelles, "Nous ne sommes plus en mesure d’accepter de nouveaux clients" précisent les messageries à Oytier-Saint-Oblas tout comme à Domène.

Et lorsque nous parvenons à joindre quelqu’un, la conversation tourne court. "Le téléphone sonne sans arrêt, impossible de répondre à vos questions" lâche une commerciale du Sud Isère avant de raccrocher. "La responsable est submergée, elle a déjà deux clients au téléphone sur deux lignes différentes", s’excuse une secrétaire dans le nord du département.

 

"On reçoit 250 appels par jour"

Mais que se passe-t-il dans le secteur des pellets et des granulés bois ? "Les gens s’affolent, ils ont peur de ne pas pouvoir se chauffer cet hiver, s’agace un ouvrier de Bois Energie, qui fournit différents combustibles dans le bassin annécien, en Haute-Savoie. On reçoit 250 appels par jour, ça appelle de partout, de Lyon jusqu’au Nord-Isère".

Pour éviter les ruptures de stock, l’entreprise doit limiter les ventes à 10 sacs de granulés par mois et par foyer. "Du jamais-vu" pour ce professionnel, qui ajoute qu'un sac de 15 kilos coûte 11,50 euros aujourd'hui, contre 8 euros en juillet. 

D’autres ont déjà épuisé leur stock dès le mois de septembre. "On a énormément de demande, et on est en rupture de pellets", confirme un responsable de MP Bois, un revendeur haut-savoyard installé près de la frontière suisse.

Mon prochain camion de livraison arrive en octobre donc jusque-là, je n’ai rien à vendre.

Guillaume Taupin, gérant de Le Bon Bois

"Moi, j’ai plus de 200 appels par jour. Je ne peux plus gérer mon téléphone pour dire que je suis en pénurie, c’est impossible ! J’ai même des clients italiens qui passent le col et viennent voir en France s’il reste des granulés, souffle Guillaume Taupin, gérant de l’entreprise Le Bon Bois à Saint-Marcel, en Savoie. Mon fournisseur maintient mon volume mais ne peut pas m’en donner plus. Mon prochain camion de livraison arrive en octobre donc jusque-là, je n’ai rien à vendre.". 

Tous les professionnels s'accordent sur un point : jamais ils n’avaient vu une telle demande aussi tôt dans l’année.

Comment expliquer ces ruptures de stock ?  

Les tensions dans le secteur des combustibles bois s'expliquent d'abord par plusieurs facteurs conjoncturels : 

  • Des tensions sur le marché de l’énergie : alors que les prix du gaz et de l’électricité flambent dans toute l’Europe, certains pays ont fait le choix d’intensifier l’usage de centrales électriques au granulé. Aujourd’hui, la consommation globale des centrales électriques fonctionnant au granulé représente 17 millions de tonnes de la consommation totale en Europe sur 35 millions.
  • La panique des particuliers : les propriétaires de chaudières et poêles à bois craignent une pénurie de combustibles d’ici l’hiver et une augmentation des prix. Beaucoup ont préféré anticiper dès le mois d’août, contribuant malgré eux aux ruptures de stock actuelles.
  • Le délai de fabrication : les fabricants sont confrontés à un délai de fabrication incompressible et ne peuvent pas produire plus vite pour répondre à l'explosion de la demande. 

A ce contexte s’ajoute un changement plus structurel dans les modes de chauffage. Les aides financières mises en place par l’Etat ont entraîné une forte hausse de la demande d’appareils au bois. "Entre 2020 et 2021, les ventes de poêles à granulé ont augmenté de 41 % et les ventes de chaudières à granulé de 120 %", précise Propellet - association française des professionnels du chauffage au granulé - dans un communiqué. 

 

Doit-on craindre des pénuries ?

Forcément, plus il y a d’appareils, plus les demandes de combustibles dédiés augmentent. "Le marché en volume des granulés bois était de 1,8 million de tonnes à l’hiver 2020-2021. Il est estimé à 2,4 pour l’hiver 2022-23. Ça donne une idée de l’augmentation de la demande", confirme le porte-parole de la FF3C, la Fédération française des combustibles, carburants et chauffage.

 Il y a des gens qui ne pourront pas se chauffer avec leur poêle à granulés cet hiver.

Guillaume Taupin, gérant de l’entreprise Le Bon Bois

"Il y a des gens qui ne pourront pas se chauffer avec leur poêle à granulé cet hiver, prévient le vendeur Guillaume Taupin. La hausse des prix va limiter la demande mais, à mon avis, ça ne suffira pas".

Afin de limiter la flambée des prix, la Fédération des professionnels recommande de différer les projets d’installation neuve qui n’ont pas encore été concrétisés. Mais l’organisme reconnaît que l'offre "pourrait ne pas satisfaire intégralement la demande" cet hiver, et prédit même un déficit de 5 à 15 %. 

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