Le Festival Berlioz lancera en août "de manière solennelle" les festivités du 150e anniversaire de la mort du grand compositeur romantique français, en s'intéressant à son rapport avec le sacré.
Le festival Berlioz, organisé depuis un quart de siècle dans sa ville natale de La Côte-Saint-André (Isère) et ses environs, présentera du 18 août au 2 septembre l'ensemble du répertoire religieux de Berlioz, à l'exception de son Te Deum.Inventeur de la formule "Chacun pour soi et Dieu pour personne", Hector Berlioz avait beau être fâché avec la religion, c'est bien à l'église, où il ira jusqu'à l'adolescence, qu'il connaîtra "son premier choc esthétique et émotionnel", raconte le directeur du festival Bruno Messina.
Mais il faudra attendre la fin de sa vie pour que le musicien, décédé le 8 mars 1869, compose l'essentiel de son répertoire sacré.
Grand berliozien, le chef britannique John Eliot Gardiner dirigera deux concerts et l'orchestre de l'Opéra de Lyon, qui n'avait plus fréquenté le festival depuis son transfert de Lyon à la Côte Saint-André, y fera son retour.
"En français et en anglais"
Comme chaque année, le festival comportera son lot de curiosités, comme ce "Temple universel" (le 30 août) qu'interprètera l'orchestre Les Siècles de François-Xavier Roth. Cet hymne "saint-simonien" et "européen" devait à l'origine célébrer l'Entente cordiale avec l'Angleterre, pays où Berlioz a toujours été reconnu et admiré, contrairement à la France.
Berlioz n'en a jamais achevé l'orchestration, que M. Messina a confiée au compositeur Yves Chauris. Et le texte a été traduit en anglais pour que, conformément à la volonté du compositeur, ses couplets soient alternativement chantés en français et en anglais.
Le Festival consacrera aussi une soirée aux fantômes et apparitions dans les oeuvres d'opéra. L'occasion de rappeler la traitrise du librettiste Eugène Scribe qui fournit à Charles Gounod la trame de sa "Nonne sanglante" (récemment ressuscitée par l'Opéra comique), alors qu'il l'avait promise à Berlioz. De dépit, "Berlioz balança son travail", dont il ne reste aujourd'hui que quatre extraits, à découvrir le 23 août.
Sa "Messe solennelle" (28 août) fut composée alors que Berlioz n'avait pas encore mis les pieds dans un conservatoire. "Ce ne fut pas le succès escompté. Il jette alors la partition au feu en oubliant qu'il en avait donné un exemplaire à un musicien belge mineur. Et c'est dans la bibliothèque d'une église d'Anvers qu'on la retrouvée en 1992", rappelle M. Messina.
L'incontournable Requiem (21 août) aura l'originalité d'être joué sur instruments d'époque, là encore sous la conduite de François-Xavier Roth.
Le festival aborde aussi la rivalité entre Berlioz et Wagner.
"C'est frappant le nombre d'idées "piquées" par Wagner à Berlioz, comme sa volonté "de réenchanter les mythes", relève M. Messina.Mais, "moins politiquement habile" que son cadet allemand, "Berlioz ne verra jamais montés ses "Troyens", inspirés de Virgile, alors que Wagner, lui, atteindra la consécration avec ses Nibelungen. Le Festival rappellera cet antagonisme avec deux soirées dédiées aux "légendes sacrées" du Nord et du Sud (22 et 31 août).
"Comme Romain Gary"
Avec "l'Enfance du Christ" (25 août), "Berlioz tente un coup à la Romain Gary/Émile Ajar" et présente cette trilogie sous un pseudo. Et c'est un triomphe, l'un de ses rares succès publics.
L'impie Berlioz y démontre "une générosité incroyable". En dépit de l'époque, "il n'y a pas une trace d'antisémitisme" dans son oeuvre, note M. Messina.
Comme chaque année, le Festival s'ouvrira par une grande fête populaire: une fête des moissons, avec reconstitution d'un village dauphinois du temps de Berlioz, qui se tiendra dans l'enceinte de la propriété familiale de l'un des meilleurs amis du compositeur.