Alors que la gratuité des transports revient dans le débat public dans le contexte des élections municipales, un rapport sénatorial publié ce jeudi juge qu'elle n'est "pas une fin en soi" et reste un outil à manier avec précaution selon les territoires.
La question de la gratuité des transports publics revient sur le devant de la scène, notamment à Grenoble, à l'approche des élections municipales de mars 2020. C'est du moins le combat du Collectif pour la gratuité des transports en commun dans l'agglomération grenobloise qui veut faire de son cheval de bataille une question clé du scrutin.
Cet "élément intéressant de la politique de mobilité" fait l'objet d'un rapport sénatorial publié ce jeudi 26 septembre. Dans ce document, le rapporteur Guillaume Gontard (Communiste, républicain, citoyen et écologiste) estime que la gratuité ne doit pas être "une fin en soi". "(Elle) n'a qu'une capacité limitée à engager une transformation en profondeur de la société et de l'espace", juge le sénateur de l'Isère, ajoutant qu'il "n'est pas souhaitable de l'appliquer partout".
??A notre demande @senateursCRCE le Sénat engage une mission d’information sur la #gratuitédestransports dont je serai le rapporteur : « La gratuité des transports : fausse bonne idée ou révolution sociale et écologique des mobilités ?» https://t.co/komtzKxlJn … …
— Guillaume Gontard (@GuillaumGontard) March 6, 2019
L'essai transformé par Dunkerque (Nord), où les bus gratuits depuis septembre 2018 connaissent un très grand succès, montre qu'elle n'est pas réservée aux plus petits réseaux. Mais "elle paraît difficile à mettre en oeuvre dès lors que la pérennité des réseaux suppose des investissements lourds, voire peu souhaitable dans les villes dont les transports sont saturés", indique le rapport.
Dans ce cas, la priorité consiste "évidemment" à développer l'offre, souligne-t-il. Pour Michèle Vullien (Union Centriste), présidente de la mission et sénatrice du Rhône, le voyageur recherche "du service" de transport avant tout. Selon elle, "la gratuité totale est possible lorsque la demande est inférieure à l'offre de transports", ce qui est "la caractéristique commune à toutes les villes ou agglomérations qui l'ont mise en oeuvre en France".
"Ni une fausse, ni une bonne idée en soi"
Surtout, estiment les auteurs du rapport, la gratuité des transports publics "doit nécessairement s'inscrire dans un projet global". Elle n'est "ni une fausse, ni une bonne idée en soi", jugent-ils prudemment, notant que "tout dépend dans quel but elle est mise en oeuvre".
Si "la gratuité des transports collectifs ouvre la voie à une révolution sociale des mobilités", d'autres mesures simples peuvent selon eux avoir des effets importants, comme "une tarification solidaire fine" ou le décalage des horaires d'établissements scolaires ou d'institutions pour décharger certaines lignes aux heures de pointe.
Se pose plus généralement "la question de notre projet urbain, de la taille de nos villes, de l'étalement urbain, de la dissociation entre les zones d'activité économique et les zones d'habitat", les sénateurs pointant d'ailleurs le risque de friction avec les zones périurbaines, foyers des "gilets jaunes", si les transports deviennent gratuits en ville quand ces zones en sont privées.
Au total, la mission sénatoriales formule plusieurs recommandations, dont l'intégration des territoires ruraux et périurbains dans la réflexion, la création d'un observatoire de la tarification des transports et une réduction du taux de TVA à 5,50% pour les transports de voyageurs.