"Je gagne 40 euros par jour", "nos conditions de travail sont déplorables" : des livreurs Uber Eats en grève à Grenoble

Ce samedi 2 décembre, des coursiers des plateformes de livraison ont manifesté dans les rues de Grenoble en Isère, afin de dénoncer une baisse de leur rémunération et des conditions de travail jugées "difficiles et dangereuses". Pour se faire entendre des différentes plateformes de livraisons, ces coursiers et plusieurs syndicats appellent à la grève jusqu’à dimanche.

"Je gagne en moyenne quarante euros par jour" confie un coursier qui travaille pour plusieurs plateformes de livraison telles que Uber Eats, Deliveroo ou encore Stuart. Chaque jour, il effectue des dizaines de kilomètres à vélo, livrant des repas ou des paniers de courses à domicile. "Même en travaillant 7 jours sur 7, même en restant connectés jusqu’à tard dans la nuit, on n’arrive pas à gagner suffisamment pour payer un loyer, le chauffage, nos équipements, nos assurances, nos abonnements téléphoniques ou encore l’entretien de nos vélos" dénoncent les travailleurs, en grève pour dénoncer leurs conditions de travail et la baisse de leur rémunération.

Nos conditions de travail sont déplorables.

Un coursier qui travaille pour plusieurs plateformes de livraison

Alain Lavy, militant de l’Union locale CGT, explique que "les plateformes considèrent que les livreurs sont des travailleurs indépendants. Elles ne paient aucune cotisation, aucune couverture sociale et ne leur fournissent aucun matériel".

Les plateformes ne rémunèrent que la course, pas le temps de travail.

Alain Lavy, militant de l’Union locale CGT

En avril dernier, un premier accord avait été signé entre les plateformes et les représentants des livreurs pour garantir à ces derniers un revenu minimal horaire fixé à 11,75 euros "ainsi qu'un meilleur encadrement des désactivations de compte". "Ce n’était qu’un leurre puisque les temps d’attente entre deux commandes ne sont pas retenus comme temps de travail" regrette la CGT Livreurs.

"Lorsque la société Uber Eats a mis en place, il y a quelques semaines, cette nouvelle tarification, soi-disant plus ‘juste’, cela s’est traduit par une chute brutale de la rémunération de la plupart des courses. Certaines sont passées en-dessous de deux euros" poursuit le syndicat, qui met en cause un nouvel algorithme de la part de la plateforme Uber Eats.

"On travaille pour ne pas quémander"

Près de 900 livreurs arpentent les rues de la capitale des Alpes et de son agglomération. "La plupart d’entre nous sont sans-papiers" explique Mamadou, en France depuis sept ans, effectuant des livraisons "pour s’en sortir".

On travaille pour ne pas voler, pour ne pas vendre de drogues, pour ne pas quémander.

Mamadou, livreur deux-roues

Caroline Audric, secrétaire générale de l’Union locale CGT à Grenoble, affirme que "l’auto-entreprenariat est un modèle qui favorise ce type de nouvel esclavagisme". "On pense que c’est la liberté alors que pas du tout. Les livreurs sont soumis à des contrôles et doivent systématiquement rendre des comptes" poursuit la syndicaliste.

"Un moment historique"

Pour Mohamed Fofana est persuadé que la plateforme va "désactiver certains comptes" suite à la mobilisation. Mais ce livreur syndiqué, cette grève est "un moment historique" car elle se déroule simultanément dans plusieurs villes en France, pour la première fois. A 33 ans, Mohamed livre des repas à domicile tous les jours, "sans horaires fixes" et dans des conditions difficiles, "surtout quand il fait froid".

"C’est la première fois à Grenoble que des livreurs forment un tel cortège" témoigne Allan Confesson, adjoint au maire de Grenoble en charge du commerce, venu soutenir les grévistes et qui souhaite "une prise de conscience de la part de l’opinion publique".

Ce système et cette précarité ne peuvent pas perdurer.

Allan Confesson, adjoint au maire de Grenoble en charge du commerce

"On appelle les consommateurs à ne plus commander en ces jours de grève" continue l’élu, "et à arrêter d’alimenter le fonctionnement de ces plateformes qui sont totalement cyniques aujourd’hui d’un point de vue social dans leur fonctionnement".

Depuis quelques mois, la mairie met à disposition des livreurs "des salles de réunion afin qu’il puisse se retrouver et s’organiser collectivement". "On leur dispense des formations au code de la route avec notre police municipale" ajoute l’élu qui annonce l’ouverture prochaine d’un local destiné aux livreurs, "afin qu’ils puissent se mettre à l’abri si besoin".

La CGT Livreurs, et les syndicats Union-Indépendants et Solidaire-Livreurs appellent les coursiers de toutes les plateformes à faire deux jours de grève, ce samedi 2 et ce dimanche 3 décembre.

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