Le Musée de Grenoble expose jusqu'au 30 janvier 2022 cent-trente tableaux, dessins, affiches et photographies de Pierre Bonnard (1867-1947), avant-gardiste inclassable aux couleurs irradiantes
De ses premières toiles aux aplats décoratifs inspirés des estampes japonaises, achevées à partir des années 1890 dans sa maison familiale du Grand-Lemps, près de Grenoble, à "L'Amandier", ultime chef-d'oeuvre qu'il rectifia jusqu'à son dernier souffle au Cannet, en 1947, l'exposition "Bonnard, les couleurs et la lumière" retrace son parcours artistique.
"Sa capacité à transfigurer le réel et à le rendre féérique fait de Pierre Bonnard l'un des grands magiciens de la peinture", souligne Guy Tosatto, le directeur du Musée de Grenoble.
"Son travail est une ode à la lumière et aux couleurs. C'est l'un des grands visionnaires de la peinture du XXe Siècle", abonde Sophie Bernard, chargée des collections du musée et commissaire de cette exposition imaginée avec le Musée d'Orsay, avec des prêts exceptionnels de plusieurs autres musées français.
Le parcours se découpe en six thématiques reliées au fil rouge de la lumière, des couleurs ou des lieux - de la Normandie au Midi - qui ont innervé le style lumineux de ce peintre, dans le sillage du mouvement post-impressionniste Nabi.
Une des sections consacre son travail somptueux autour du nu féminin, thème récurrent souvent inspiré par Marthe, la femme qui partagea sa vie et devint sa muse.
Aux 80 tableaux réunis à Grenoble, s'ajoute une quarantaine de dessins, d'affiches et de photographies - que l'artiste pratiqua surtout dans le cercle familial des années 1890 aux années 1910.
"Le théâtre, la photographie et le cinéma ont marqué l'oeuvre de Pierre Bonnard, qui est une forme d'expression du plaisir", analyse Guy Tosatto. Selon lui, le peintre a "une vision du tableau comme un petit théâtre, où il est question organiser la lumière et de fomenter des scénarios", une forme de "théâtre pictural".
La visite s'achève avec une série de clichés pris en 2020 par le photographe Bernard Plossu dans la maison du peintre au Cannet, restée intacte depuis sa mort.
De son vivant, Pierre Bonnard avait espéré que "sa peinture tiendrait sans craquelures et arriverait devant les jeunes peintres de l'an 2000 avec des ailes de papillon".
"Quand on couvre une surface avec des couleurs, il faut pouvoir renouveler indéfiniment son jeu, trouver sans cesse de nouvelles combinaisons de formes et de couleurs qui répondent aux exigences des émotions", expliquait-il deux ans avant son décès.