L'Alpe d'Huez abrite un site archéologique majeur et méconnu, classé monument historique. Les Brandes, le plus haut village médiéval d'Europe, lié à l'exploitation d'une mine d'argent, assura la fortune de la dynastie des Dauphins.
C'est un voyage dans le temps qui remonte au XIIe siècle. Sur la montagne d'Huez, flotte le drapeau de la dynastie du Dauphin qui régna sur l'Isère, la Drôme et les Hautes-Alpes.
Le village de Brandes est le plus haut village médiéval d'Europe, perché à 1 800 mètres d'altitude. Il fit la fortune des seigneurs du Dauphiné pendant deux siècles. Ce sont les plus anciennes mines d'argent que l'on connaisse dans la région. Elles sont pourtant encore méconnues du grand public.
Un site archéologique exceptionnel
Les fouilles de ce site archéologique majeur, classé monument historique, ont démarré en 1977. Marie-Christine Bailly-Maître, historienne, auteure et archéologue directrice de recherches CNRS, en connaît les moindres détails et recoins.
"Chaque cuvette que l'on aperçoit correspond à un bâtiment de l'époque, à un atelier pour le travail du minerai d'argent extrait, ou encore aux habitations des mineurs et de leurs familles", explique-t-elle, en décrivant : "Il y a près de 80 fondations, vestiges ou murs étalés sur plus de 900 mètres de longueur, tous en cuvette".
Des constructions semi-enterrées dans la terre, du Nord vers le Sud, pour une bonne raison : se protéger de la rudesse du climat. L'architecture n'était pas sophistiquée, mais l'agencement astucieux. Faites de pierres empilées récoltées dans la montagne, elles étaient chapeautées de charpentes de bois, et d'une toiture de chaume de seigle, "excellent isolant thermique".
Une église dédiée à Saint-Nicolas, patron des mineurs
Le village de Brandes compta jusqu'à près de 250 habitants. Les familles y bâtirent même leur église dédiée à leur patron Saint-Nicolas. "Les gens se sont installés peu à peu dès les premières années du XIIe siècle, raconte notre guide historienne Marie-Christine Bailly-Maître. Ils ont édifié d'abord une petite chapelle".
Au fil du temps, entre le XIIe et le XIVe siècle, la population du village a grossi, et les mineurs ont même équipé leur église d'un parvis.
Pendant deux siècles, les mineurs ont creusé la montagne, jusqu'à 3 000 mètres d'altitude, à la recherche du précieux minerai d'argent. Il reste aujourd'hui les vestiges de leur labeur, des sites d'extraction à ciel ouvert, mais aussi des souterrains.
Las, leur histoire est doucement tombée dans l'oubli. Ce sont pourtant eux qui ont contribué à la richesse des seigneurs du Dauphiné, qui ont pu s'offrir à Grenoble la construction d'une chapelle monumentale, devenue l'église Saint-André.
Avec le précieux minerai, on frappait à l'époque le denier d'argent, monnaie de référence dans l’Occident médiéval. Les premiers travaux universitaires dédiés au site de Brandes datent de 1930, menés par le géographe de Gap André Allix.
A la même époque, l'historien Marc Bloch s'est aussi intéressé à ce qu'il considérait comme "l’histoire si curieuse des mines de Brandes" qui sont restées en activité en Oisans jusqu'au milieu du XIVe siècle. Depuis, les chercheurs poursuivent le travail de leurs prédécesseurs, et rêvent d'y découvrir encore "des trésors cachés".