Plus de 30 kg de stupéfiants, 128 litres d'alcool et 738 téléphones saisis en un an au centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier

Le centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier (Isère) est en proie, selon un syndicat, à de nombreuses projections de marchandises illicites : des produits stupéfiants, de l'alcool, des armes blanches, des téléphones portables. Les professionnels alertent sur les conséquences de ces saisies.

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"La prison de Saint-Quentin-Fallavier est un immense 'coffee shop'", annonce un communiqué du syndicat UFAP-UNSa Justice, publié ce mercredi 23 novembre. Dans ce document, les agents du centre pénitentiaire isérois s'inquiètent de l'augmentation des "projections" : des colis destinés aux détenus envoyés depuis l'extérieur des murs.

Le contenu de ces colis est aussi varié qu'impressionnant selon le syndicat : des produits stupéfiants, de l'alcool, mais aussi des armes blanches, de la nourriture… En 2022, le personnel du centre pénitentiaire est parvenu à mettre la main sur 33 kg de stupéfiants, 128 litres d'alcool, 738 téléphones, 37 couteaux et armes artisanales, ainsi que de l'acide ou encore du white spirit.

Les agents qui tentent de récupérer ces colis sont parfois la cible de tirs de mortiers ou de jets de cailloux.

Un responsable local de l'UFAP-UNSa Justice

Ces saisies inquiètent, et ne représentent que la partie émergée de l'iceberg : ces marchandises ont été récupérées au cours de 2 239 opérations au bas des bâtiments, depuis le 1er janvier 2022. Mais beaucoup de ces projections n'ont pas pu être récupérées à temps. "Les agents qui tentent de récupérer ces colis sont parfois la cible de tirs de mortiers ou de jets de cailloux de la part des personnes à l'extérieur du bâtiment. L'année dernière, un gardien a échappé de peu à un tir de mortier. Le projectile est arrivé tout près de son visage. Il en garde encore des séquelles avec une diminution de son audition. Certains gardiens n'osent plus y aller, par peur de se mettre en danger", explique un responsable local du syndicat UFAP-UNSa Justice, qui souhaite garder l'anonymat dans "un contexte actuel extrêmement chaud".

Au total, 5 467 projections ont été comptabilisées au cours de l'année. Le responsable syndical dénonce ainsi une importante quantité de produits illicites, qui parviennent à s'immiscer entre les barreaux. "Avoir autant de stupéfiants dans un milieu de près de 550 détenus, cela donne une consommation extrêmement importante par personne. Ca sent le cannabis dans les couloirs, dans les cellules, un peu partout", regrette-t-il.

Un problème d'effectif ?

Des fouilles sont donc menées quotidiennement pour mettre la main sur ces produits. Mais la découverte de produits passe parfois mal. "Des agents se sont fait agresser alors qu'ils tentaient de récupérer ces marchandises. Il est arrivé qu'un détenu ait tenté d'étrangler un gardien sur le lit de sa cellule. Il a échappé au drame grâce à l'intervention des collègues. D'autres agents se sont pris des 'directs'. Il y a aussi les menaces de mort qui pèsent : certains détenus racontent aux gardiens qu'ils savent où ils habitent, qu'ils connaissent leur plaque d'immatriculation… Ca pèse aussi pour les familles", poursuit la source syndicale.

Le climat d'insécurité est important parmi le personnel. "Abimés, incompris, maltraités, les agents sombrent les uns après les autres", indique l'UFAP-UNSa Justice, qui fait état de 30 à 40 arrêts de travail en continu depuis le mois de juin.

Les gens n'ont plus de vie. Ils n'ont qu'une envie, c'est de se barrer avec l'espoir de trouver mieux ailleurs.

Un responsable local de l'UFAP-UNSa Justice

"Des agents sont rappelés sur leurs repos. Quand on a près de 40 absents sur un personnel de 135 personnes, c'est énorme. Les gens n'ont plus de vie. Ils n'ont qu'une envie, c'est de se barrer avec l'espoir de trouver mieux ailleurs. Le turn-over est impressionnant", raconte le délégué syndical.

La direction conteste ces chiffres, même si elle accorde qu'une trentaine d'agents est actuellement indisponible, mais pour différentes raisons. "Douze agents sont, en effet, en congé maladie. Trois autres sont absents suite à un accident de travail. Deux autres agents sont absents pour différentes raisons inexpliquées. Le reste du personnel est, en réalité, en congé annuel", explique Richard Boulay, directeur du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier.

"Nous avons un effectif théorique normal. Au niveau de l'administration, on ne peut être légitime à demander davantage de moyens humains alors que la situation est plus mauvaise dans d'autres centres pénitentiaires", poursuit-il.

"Un contexte général difficile"

Richard Boulay admet une "situation difficile" due à un "contexte général difficile". "L'administration pénitentiaire peine à recruter depuis de nombreuses années. Elle n'arrive pas à attirer, et c'est dommageable. Certes, ce métier n'est pas fait pour tout le monde, mais des agents s'épanouissent dans ce travail. Le personnel de Saint-Quentin-Fallavier est extrêmement mobilisé."

Le directeur de l'établissement regrette notamment "un tableau noirci dressé par le syndicat et les médias, alors que de nombreuses actions sont mises en place". Pour remédier au problème des projections, il évoque notamment un système "efficace de grillage penché pour intercepter les colis" (une innovation du centre pénitentiaire de Saint-Quentin-Fallavier), ainsi que le remplacement d'une trentaine de caillebotis fixés aux fenêtres pour empêcher le passage des mains.

Face aux difficultés rencontrées au sein de la prison, Richard Boulay évoque également la surpopulation carcérale avec 39 détenus qui dorment sur des matelas au sol, la dégradation des cellules par les détenus et certains profils de surveillants pénitentiaires trop "jeunes" ou "peu préparés" au travail. Mais, il insiste : "Nous menons une vraie politique pour améliorer les choses."

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