De nombreuses exploitations arboricoles et viticoles en pleine floraison ont été touchées par le gel la semaine dernière. Malheureusement, de nouvelles gelées sont attendues ces prochains jours dans les Alpes, au grand désespoir des agriculteurs.
"On appréhende les gelées annoncées cette semaine. S’il fait très froid, avec cette humidité, ça risque de griller les bourgeons". Béatrice Magnin, viticultrice dans la vallée de la Combe de Savoie, commence à s’inquiéter.
Ses trois hectares de vignes cultivées en agriculture biologique ont été épargnés par le premier épisode de gel début avril. Grâce à "une taille tardive", seuls "quelques bourgeons ont gelés". Mais si la température chute encore cette semaine, les dégâts pourraient être bien plus sérieux.
Encore des températures négatives
Malheureusement, Météo France confirme les craintes de Béatrice. Selon les prévisions établies jusqu’au 16 avril, des gelées tardives devraient survenir toutes les nuits. Mardi matin, les températures devraient osciller entre 0 et -2 degrés dans les Alpes, avec un temps très froid en Nord-Isère.
"Dès mercredi, il fera encore plus froid avec -3 degrés vers Saint-Etienne-de-Saint-Geoirs ou encore Albertville, ajoute Sophie Tessier, directrice adjointe du centre Météo France Alpes du Nord. On aura aussi -1 à -2 du côté des vignobles dans les avants pays savoyards, et -2 à Annecy. De manière générale, les températures oscilleront entre -1 et -3 degrés toute la semaine".
"J’ai déjà 100% de pertes"
Si ces gelées tardives inquiètent encore de nombreux agriculteurs comme Béatrice Magnin, d’autres ont carrément arrêté de regarder la météo. "De toute façon s’il gèle à nouveau, ça ne pourra pas faire plus de dégâts. J’ai déjà 100% de pertes", souffle Jérôme Jury, arboriculteur près de Vienne, en Isère.
Cerisiers, abricotiers, pommiers : ses 65 hectares de cultures fruitières sont quasiment détruites à 100%. Seuls les fraisiers, sous tunnels, ont été un peu moins touchés. "Sur 2,5 millions d’euros de chiffre d’affaires, on a perdu 2 millions", ajoute l’arboriculteur.
Désormais, il se tourne vers l’Etat pour une "prise en charge des salaires" et un "dédommagement des charges pour les exploitations". Pour lui, c’est le seul moyen d’éviter "une catastrophe économique".
La semaine dernière, il a pourtant passé sept nuits à essayer de sauver son exploitation. Bougies anti-gel, poêle à bois, chaudières embarquées sur des tracteurs, tour anti-gel : Jérôme s’est démené, en vain. "On arrive à lutter jusqu’à -3 degrés. Mais là, on a enregistré -8 degrés ! En 34 ans d’activité, je n’ai jamais vu ça", reconnait-il.
Malgré ses efforts, toutes ces technologies n’ont pas suffi à réchauffer les vergers. De son côté, la viticultrice Béatrice Magnin a fait le choix de ne pas sortir l’artillerie lourde. "Les braséros et les hélicos anti-gel coûtent très chers sans aucune garantie. Rien n’est miraculeux" explique-t-elle.
Pour protéger ses vignes biologiques, elle se tourne plutôt vers des huiles essentielles de sarriette, thym et origan. Mais là encore, rien ne dit que Mère Nature n’aura pas le dessus.
"On n’a aucune idée des dégâts possibles, admet-elle. Si on protège un secteur, c’est un autre qui va être touché. Les courants d’air froid sont difficiles à anticiper".
A cause de la chaleur précoce du mois de mars, de nombreux bourgeons sont déjà sortis. Inquiète, la vigneronne essaye de faire confiance à ses vignes, qu’elle juge "bien alimentées" et "moins fragiles" que dans la viticulture conventionnelle. Mais elle gardera tout de même un oeil sur les bulletins météo.