"On ne venait pas pour en découdre" affirme Stéphane Nael, président du Syndicat Autonome des Sapeurs-Pompiers du Puy-de-Dôme. Pourtant, la manifestation des pompiers à Paris s'est terminée par des heurts avec les CRS. Stéphane Nael et Landry Damigon, son homologue du Cantal, étaient sur place.
"À la base, la manifestation était bon enfant", constate Stéphane Nael, président du Syndicat Autonome SPP (Sapeurs-Pompiers) du Puy-de-Dôme. Avec une trentaine d'autres sapeurs-pompiers puydômois, ils sont allés en train à Paris le 15 octobre, pour manifester dans la capitale. Dans le Cantal, ils étaient 4 à avoir fait le déplacement. "On était au moins entre 8 000 et 10 000 à défiler", dénombre Landry Damigon, président du Syndicat Autonome SPP 15. Une forte mobilisation, qui représente 25% de l'effectif total des pompiers en France.La manifestation se voulait placée sous le signe de l'apaisement et de la négociation : "Nous avions mis en place une charte de bonne conduite qui spécifiait qu'on ne devait pas être en tenue de feu. Presque tout le monde a joué le jeu", explique Stéphane Nael. De bonnes intentions qui n'ont pas suffit à éviter l'affrontement avec les CRS. Les pompiers cantaliens ont réussi à s'extraire avant le début des hostilités, essuyant au passage quelques tirs de lacrymogène, mais la délégation du Puy-de-Dôme a été moins chanceuse.
Une "fracture" entre pompiers et forces de l'ordre
"Arrivé à Nation, on a constaté que l'ensemble des artères de la place étaient bouclées par des CRS. On s'est retrouvé cadenassés, ça a fini par faire cocotte-minute. On s'est présentés devant un cordon de CRS pour partir rejoindre la gare. Ils étaient agressifs, ils avaient envie d'en découdre. On ne voulait pas aller à l'affrontement donc on a fait demi-tour, et c'est là qu'ils ont commencé à lancer des grenades", détaille Stéphane Nael.Aucun des pompiers auvergnats présents n'a été blessé, mais Stéphane Nael a eu connaissance de trois pompiers blessés hors de la région Auvergne. Au lendemain de la manifestation, les soldats du feu sont dans l'incompréhension face à ces violences : "On ne comprend pas, pourtant ils sont dans la même galère que nous", regrette Landry Damigon. Un avis partagé par Stéphane Nael, qui collabore au quotidien avec les forces de police et de gendarmerie : "Nous, on travaille avec eux, ils sont épuisés et on le sait, on ne venait pas pour en découdre. Cela a créé une fracture entre nous et eux, c'est sur. C'est honteux ce qu'il s'est passé."
Ce sont les conditions de travail de plus en plus difficiles qui ont poussé les sapeurs-pompiers à descendre dans la rue. "Nous ne sommes pas reconnus comme un métier à risque au même titre que les autres, alors qu'il y a de plus en plus d'agressions, qu'on a une espérance de vie de près de 10 ans de moins que la moyenne nationale, qu'il y a plus de risques de cancer à cause des fumées", déplore Landry Damigon. Au niveau du Cantal, les interventions ont augmenté de 12% (30% au niveau national) avec un effectif de pompiers volontaires en baisse. Les pompiers cantaliens font grève pendant 1 heure par jour, jusqu'au 31 décembre."Les pompiers sont usés"
Même constat au niveau du Puy-de-Dôme :"On a de plus en plus d'interventions qui ne sont normalement pas de notre ressort d'un point de vue légal, à cause du manque d'effectif dans la police et les urgences. On a les articulations bousillées, et rien n'est fait en amont pour traiter le problème", note Stéphane Nael. Face à toutes ces difficultés, ils ne comptent pas en rester là. Ils déplorent une indifférence des pouvoirs publics face à leurs revendications :"Ils attendent qu'on lâche, ils veulent noyer le poisson. Mais on est prêts à remonter à Paris bien plus nombreux", explique Landry Damigon. "Ça va chauffer, encore plus que ce qui s'est passé."