Pour André Chassaigne, député communiste du Puy-de-Dôme, la démission du ministre de l'écologie Nicolas Hulot n'est pas une surprise, même s'il la regrette. Il fait part de ses inquiétudes quant à l'avenir des enjeux environnementaux dans la politique du gouvernement.
La décision est tombée alors que le pays était encore à moitié endormi. Au cours de la matinale de France Inter, le 28 août, Nicolas Hulot a décidé et annoncé en direct sa démission du poste de Ministre de l'écologie. Un nouveau coup porté à la crédibilité du gouvernement d'Emmanuel Macron, mais aussi eux enjeux environnementaux majeurs que nous connaissons aujourd'hui. André Chassaigne, député du Puy-de-Dôme (PCF) et président du groupe Gauche démocratique et républicaine à l'Assemblée Nationale, nous fait part de son inquiétude suite à ce coup de tonnerre.
Est-ce que cette démission vous a surpris ?
Pour moi ce n'est pas une surprise, mais je la craignais et je la regrette. Parce qu'au sein de ce gouvernement extrêmement libéral, auquel je suis un opposant déterminé, Nicolas Hulot portait une voix différente sur les questions environnementales. Il avait la volonté de faire avancer la transition écologique, et représentait une éthique opposée à cette dérive libérale totalement contradictoire avec les grandes questions environnementales.
Nicolas Hulot a fait part de sa frustration face à la nécessité de "s'accommoder des petits pas". Selon vous, ses quinze mois au gouvernement ont-ils été utiles ?
Je pense tout de même qu'il a limité la casse, il a fait avancer certaines questions. Notamment avec ses interventions au niveau européen sur l'usage des pesticides, avec l'interdiction à terme d'exploiter des hydrocarbures sur le territoire français. Il a aussi porté une voix forte sur les questions liées au réchauffement climatique et à la biodiversité.
Même si son action n'a pas été à la mesure de ce qu'on aurait pu attendre, je pense qu'il a vraiment fait le maximum qui était en son pouvoir, engoncé dans le carcan du gouvernement Philippe, avec sa politique en faveur des marchés, des groupes financiers, des multinationales, sous la pression des lobbies. Il avait une tâche extrêmement compliqué, il l'a conduite au plus loin et a fini par se rendre compte qu'elle était fondamentalement incompatible avec les orientations du gouvernement.
On sait quel ministre on perd, on ne sait pas lequel on va retrouver
Selon vous, qu'est-ce que tout cela dit de la manière dont ce gouvernement considère l'écologie et l'environnement ?
Sur les questions écologiques et environnementales, il y a d'une part les discours, les effets d'annonce, et de l'autre côté, une contradiction fondamentale. À savoir, l'incompatibilité entre une politique toute tournée sur les intérêts financiers, des multinationales, des premiers de cordées, et ce qu'exige une politique en faveur de la transition écologique, de la protection de l'environnement. Le réchauffement climatique est un véritable échec, la France recule et ne tient pas ses engagements. Il y a des abandons vis-à-vis de la biodiversité, trop peu de moyens sont accordés. Sur les questions qui touchent à l'eau, l'argent des agences est aspiré par l'État par exemple.
Vous êtes inquiet pour l'avenir de l'écologie au gouvernement ?
La crainte que j'ai, c'est qu'on sait quel ministre on perd, on ne sait pas quel ministre on va retrouver. Je ne vois pas quelle personnalité aujourd'hui pourrait porter les grands enjeux contemporains que sont le réchauffement climatique, la biodiversité, la transition énergétique, etc. Nicolas Hulot n'est pas arrivé à obtenir ce qu'il souhaitait, et je ne vois pas qui aurait l'envergue, la détermination et l'expérience suffisantes pour faire davantage. Je crains donc que le résultat soit finalement l'accentuation de l'abandon des questions environnementales par le gouvernement.
Vous vous attendez donc à ce que l'écologie soit au point mort pour les trois années à venir ?
Non, car si le gouvernement est une composante importante, les questions environnementales reposent aussi sur la mobilisation de la société toute entière. Je pense que Nicolas Hulot lui-même participera, en dehors du gouvernement, à mobiliser sur l'enjeu des grandes questions environnementales