En Auvergne, un camion médicalisé accompagne la grossesse des femmes enceintes dans les déserts médicaux

Dans les déserts médicaux, certaines femmes enceintes ne trouvent pas de professionnel de santé pour assurer leur suivi de grossesse près de chez elles. Une absence qui a des conséquences sur la santé de la mère et du bébé. Depuis le 3 octobre, un camion circule dans les départements auvergnats pour prodiguer des soins à ces futures mamans.

Le constat est sans appel : chaque année, quelque 400 femmes enceintes d’Auvergne ne bénéficient pas d’un suivi de grossesse adapté, faute d'accès aux soins. Cela engendre des répercussions sur la santé de la mère et de l'enfant à naître. Face à ce chiffre, un projet de recherche a été initié par le Réseau Santé en Périnatalité d’Auvergne dès 2019 : entré en phase de test le 3 octobre, un camion médical sillonnera 110 communes de l’Allier, du Cantal, du Puy-de-Dôme et de la Haute-Loire. Ces communes ont été tirées au sort pour faire partie de l'étude mais elles remplissent certains critères propres aux déserts médicaux, comme l’explique Isabelle Raimbault, sage-femme et cheffe du projet Opti’soins : “Ce sont des communes où on a déterminé qu'il s'agissait d'un désert médical, parce que le professionnel de santé qui était habilité à suivre une grossesse était à au moins 30 minutes de route ou bien parce qu'il y avait un seul professionnel de santé, ce qui fait que quand ce dernier était en congé ou absent, il n'y avait pas de remplacement. Cela mettait la patiente dans un contexte où elle avait des difficultés pour avoir accès à des soins.” Le Réseau Santé en Périnatalité d’Auvergne a alors fait appel au CHU de Clermont-Ferrand, la Région Auvergne-Rhône-Alpes et l'hôpital de Sainte-Marie, partenaires dans ce projet.

110 communes tirées au sort

Le but de ce camion médicalisé est de faciliter l'accès aux soins aux femmes isolées et de leur proposer des consultations directement sur le terrain. Le nom des 220 communes reste secret pour les besoins de l’étude, mais les patientes ayant des difficultés d’accès au suivi de grossesse sont invitées à appeler ce cabinet de consultation ambulant pour savoir si leur commune fait partie de la liste. “Il y a 220 communes qui ont été tirées au sort, il y en a 110 où on intervient avec le camion de santé et 110 communes qui sont dîtes “contrôle”, où les patientes, elles, auront un suivi de grossesse classique. Elles seront appelées 3 fois pendant la grossesse par des ingénieurs de santé publique, pour parler de leur ressenti par rapport à leur suivi de grossesse”, explique Isabelle Raimbault. Les zones ciblées se situent majoritairement dans le Cantal et l’Allier, indique la sage-femme : “Dès qu'on commence à s'éloigner des centres hospitaliers et des grandes villes, cela devient très compliqué de trouver des professionnels de santé qui font du suivi de grossesse.” Elle ajoute : “Le but, c'est de voir si ce qu'on fait est pertinent. Si les patientes qui sont suivies par le camion adhèrent au projet, si elles ont une meilleure issue pour le devenir de la grossesse et le devenir de l'enfant à naître… ça nous permet également de savoir, au niveau du budget, si c’est quelque chose qui peut être pérennisé.” 

Une équipe médicale complète

Pour informer les futures mamans dans ces déserts médicaux, le camion a commencé à rouler le 19 septembre dernier, renforcé par un travail de communication auprès des élus et des professionnels de santé pour leur présenter le projet, indique Isabelle Raimbault : “Le but, c'est vraiment de travailler en collaboration avec les professionnels de santé qui sont déjà sur le terrain. On ne veut pas du tout remplacer les professionnels de santé mais venir en soutien et travailler en collaboration avec eux.” Pour venir renforcer les effectifs de ces territoires, le projet mobilise une équipe de 3 sages-femmes qui proposent un suivi de grossesse classique correspondant aux recommandations : 7 consultations de suivi de grossesse et une visite postnatale après l'accouchement, mais pas seulement : “On propose de faire de la préparation à la naissance et à la parentalité. On propose également de faire les bilans biologiques directement dans le camion. On a également une infirmière qui est détachée du centre hospitalier de Sainte-Marie, qui va bientôt nous rejoindre, qui aura comme objectif de dépister les patientes vulnérables psychiquement ou qui sont atteintes de pathologies psychiatriques. Ce sera également un soutien pour les patientes qui ont des addictions.” Des sages-femmes échographistes renforceront également les effectifs par un système de vacation. 

Des consultations programmées

Ce camion est un véritable cabinet médical tout équipé : un échographe, une table d'examen classique, l'appareil pour écouter le cœur du bébé, un tensiomètre et même, en cas d'urgence, un pack d'accouchement, “si jamais on avait un accouchement inopiné dans le camion”, précise la sage-femme.

Les patientes, à n'importe quel stade de la grossesse, peuvent contacter ce cabinet ambulant et prendre rendez-vous : “On fait de la consultation programmée avec des dates à respecter pour avoir ces consultations. On essaye de se faire un parcours logique pour éviter d'avoir une consultation le matin tout au nord de l’Allier et le soir dans le sud du Cantal. En cas d'urgence, on invite les patientes à se tourner soit vers la maternité dans laquelle elles vont accoucher, soit appeler le 15 en cas d'extrême urgence”, ajoute Isabelle Raimbault.

"Il y a des patientes qui n'arrivent pas à avoir de rendez-vous" 

Elle se félicite de répondre à un besoin constaté chez certaines de ses patientes : “Ce n’est pas facile quand on habite dans des zones qui sont isolées. Les patientes disent que quand elles ont 1h30 de route pour faire une échographie, c'est vraiment un effort de se rendre à un examen médical. Quand elles doivent consulter parce qu'il y a un souci pendant la grossesse, ce n'est pas qu'elles ne veulent pas se rendre à ces rendez-vous, c'est qu'elles n'arrivent pas à avoir des rendez-vous. Il y a des patientes qui n'arrivent pas à avoir de rendez-vous et à avoir un médecin traitant parce qu’il n’y a pas de place. On se rend compte qu'on n’a vraiment pas tous la même égalité d'accès aux soins par rapport à l’endroit où on habite et c'est rageant parce que les mamans ont à cœur de faire suivre leur grossesse correctement". A bord de son camion, l’équipe médicale se rendra donc dans la commune où la future maman est domiciliée pendant 2 ans. Le Réseau Santé en Périnatalité d’Auvergne espère cibler 400 femmes par an, qui seront suivies avec le camion de santé.  

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