Les jeunes et le suicide : ces signes qui doivent alerter et les moyens de prévention, les conseils d'une spécialiste

C'est un véritable enjeu de santé publique. Les pensées suicidaires chez les 15-20 ans sont en augmentation, notamment depuis la crise sanitaire liée à la Covid-19. Voici les signes qui doivent vous alerter et les bons gestes à adopter pour accompagner un proche.

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La prévention du suicide devient un véritable enjeu de santé publique, en particulier chez les plus jeunes. Le docteur Julie Geneste-Saelens est psychiatre et cheffe de service des urgences psychiatriques du CHU de Clermont-Ferrand.

Si les statistiques concernant les suicides en France montrent plutôt une baisse depuis quelques décennies, on observe depuis 3 ans, de façon conjoncturelle et contextuelle, une augmentation des idées suicidaires chez les Français, particulièrement chez les 15-20 ans, selon la spécialiste : “On a le sentiment que le COVID a quand même joué beaucoup sur la santé psychique des adolescents, des jeunes adultes et des étudiants. Il y a une nette cassure à la hausse au moment du COVID, après les premiers confinements, surtout à partir de l'année 2021.”  

Des professions plus à risque

Certaines professions sont plus à risque, explique le docteur Geneste-Saelens : “Les professionnels qui sont souvent les plus impactés sont ceux qui ont une relation avec un public parce qu’il peut y avoir une forme d'épuisement professionnel qui s'installe à force d'être en contact avec l'autre et toujours avoir besoin de prendre soin de l'autre.” Mais le premier facteur, selon elle, à l'origine des idées suicidaires demeure la rupture sentimentale. 

Des signes qui donnent l'alerte

Le signe principal de pensées suicidaire est souvent un changement brutal de comportement, “notamment au niveau social d'une personne : elle s'isole de plus en plus, elle parle de moins en moins, on ne la voit plus dans les soirées, il y a un isolement qui s'installe progressivement”, explique Julie Geneste-Saelens.

La spécialiste recommande également d’être particulièrement attentif aux personnes qui sont déjà passées à l’acte : “Il ne faut pas oublier qu'elles ont été en souffrance et il faut penser à prendre de leurs nouvelles régulièrement. Parce qu'à un moment donné, s'il y a une crise suicidaire, c'est qu'il y a eu souvent un isolement social et que la souffrance n'a pas pu être partagée à ce moment-là.” 

Des stratégies de prévention

Du 11 au 17 septembre, une semaine de prévention du suicide était organisée au CHU de Clermont-Ferrand. Les stratégies de prévention du suicide y étaient développées, indique le docteur Geneste-Saelens : “C’est une stratégie multimodale avec plusieurs points d'impact. Il y en a qui sont très fortes, c'est le souci de l'autre et l'accessibilité à des professionnels de santé ou des partenaires sociaux avec un lien social 24 heures sur 24. C'est pour cela que les lignes d'écoute ont beaucoup d'importance. Il y a toujours eu des lignes d'écoute en France : SOS Suicide, SOS Amitié... Depuis octobre 2021, en plus, on a la ligne du 31 14.”  

Les lignes d'écoute et les médecins

Selon elle, toutes ces lignes d’écoute peuvent être bénéfiques : “Le plus important est de pouvoir avoir accès, à ce moment-là, à quelqu'un au bout du fil, de re-rentrer dans un lien avec l'autre. C'est fondamental. Toutes les lignes d'écoute, qu'elles soient bénévoles ou professionnelles, ont cette qualité d'écoute, cette qualité d'empathie, de non-jugement, de confidentialité et ont des outils pour évaluer les choses.” Si la situation semble urgente, avec une personne qui est sur le point de se faire du mal, la réponse doit être médicale et sanitaire, par exemple en appelant le SAMU ou en conduisant la personne chez un médecin le plus rapidement possible. 

Le dispositif Vigilance

Julie Geneste-Saelens gère également un dispositif de rappel téléphonique des personnes suicidantes appelé Vigilance. Le dispositif Vigilance va vers les personnes qui ont fait un passage à l'acte suicidaire. “On les rappelle une dizaine de jours après et dans les mois qui suivent. Si on n'arrive pas à les avoir au téléphone, on leur envoie une carte postale pour leur dire qu'on ne les oublie pas. Les personnes qui sont incluses dans le dispositif Vigilance peuvent aussi nous rappeler. Mais l'idée c'est plutôt, pour nous, de ne pas les oublier.” 

Recréer du lien social

Les professionnels développent aussi la formation de tous ceux qui sont en contact avec des populations vulnérables, par exemple les professeurs, pour les collégiens et lycéens, mais aussi celles et ceux qui travaillent avec les personnes âgées. Ces professionnels apprennent à repérer la crise suicidaire, les facteurs de risque mais aussi l'envahissement des idées suicidaires.

“Il faut oser poser la question à quelqu'un sur les idées noires ou les idées suicidaires, ce qui n'est pas forcément simple. Souvent, on a peur de poser la question parce qu’on ne sait pas quoi en faire. On a peur de la réponse et on ne sait pas comment on va pouvoir orienter la personne. Dans ces formations, on donne aussi quelques conseils pour essayer de limiter les passages à l'acte. La solution n'est pas toujours d'envoyer vers un service de soins, mais ça peut l'être s'il y a urgence. Les services de soins sont parfois engorgés.”

En tant que proche d’une personne concernée, le docteur Geneste-Saelens conseille de remobiliser la famille ou les personnes proches, recréer du lien social, redonner les numéros des lignes d'écoute et enlever les moyens de suicide à disposition. Ces facteurs permettent parfois d’éviter un drame.

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