Trop-perçus, salaires manquants, Louvois, le logiciel de paie des militaires leur a mené la vie dure pendant de nombreuses années. Officiellement, le problème est contenu, mais certains soldats continuent d'en ressentir les effets. Un ancien du 92ème RI de Clermont-Ferrand raconte son quotidien.
Le calvaire semble sans fin pour Sébastien, ancien militaire du 92ème Régiment d’infanterie. Près de 600 euros en 2014, plus de 150 euros en 2016 et, dernièrement, un peu plus de 1200 euros en 2018 : des sommes que lui réclame l’armée. Depuis des années, les erreurs du logiciel Louvois rythment sa vie. Selon les mois, il a touché trop ou pas assez d'argent. Avec sa conjointe, ils ont dû vivre avec ces dysfonctionnements : un véritable casse-tête à gérer au quotidien.
‘Bien évidemment cela devenait source de conflits avec ma conjointe parce que je n’étais pas payé ou parce que je devais rembourser des sommes conséquentes », explique-t-il.
J’ai un camarade qui a eu une paie de moins de 10 euros sur un mois
Les erreurs de Louvois pèsent sur le quotidien. D'autant plus qu’elles sont, le plus souvent, indétectables sur les fiches de paie. « Il s’agissait souvent de petites sommes qui se sont accumulées sur plusieurs années. Comme notre paie n’était jamais égale, cela n’était pas forcement flagrant. Mais lorsque le cumul se fait sur plusieurs mois, voire plusieurs années, les sommes deviennent très conséquentes. On ne pense pas forcément à mettre de l’argent de côté parce qu’on pense que c’est normal et au final on doit les rembourser », déplore-t-il.
Son couple finit par voler en éclat. Sébastien, lui, décide de changer de vie. En 2017, il quitte l'armée pour tourner la page. Mais s'il a accepté de témoigner aujourd'hui, c'est pour porter la voix de ses anciens frères d'armes qui ont longtemps subi en silence. « J’ai un camarade qui a eu une paie de moins de 10 euros sur un mois. Grâce à la solidarité entre camarades, on a tous donné un peu de notre argent pour qu’il puisse payer ses factures, son loyer et pouvoir donner à manger à ses enfants à la fin du mois », raconte-t-il.
Salarié dans le privé aujourd'hui, Sébastien n'a plus de problèmes de paie… Mais il continue toujours de rembourser les erreurs passées. Près de 3000 euros depuis son départ de l'armée. Et il se demande combien de temps encore il devra payer… De son côté, l'armée assure que la majorité des dossiers sont maintenant réglés et que les difficultés des militaires sont traitées au cas par cas. Près de 190 000 personnes ont été concernées par des défaillances à partir de 2012.