Alors que François Bayrou, ministre de la justice, vient d'annoncer la suppression programmée de la réserve parlementaire, nous nous sommes penchés sur l'utilisation qui en est faite par les députés de la région Auvergne-Rhône-Alpes. Les bénéficiaires sont très variés et parfois inattendus...
Souvent accusée de servir d'outil clientéliste, la réserve parlementaire vit peut-être ses derniers jours puisque François Bayrou, ministre de la justice vient d'annoncer sa suppression prochaine.
La réserve parlementaire, c'est un ensemble de subventions que chaque parlementaire peut proposer d'octroyer à des associations ou à des collectivités. Elle n'est pas négligeable puisqu'elle représente un montant moyen de 130.000 euros par parlementaire, et même 260 000 euros pour les présidents de commission, voire 520 000 pour le Président de l’Assemblée nationale.
Depuis janvier 2014, l'Assemblée nationale publie la liste des organismes qui reçoivent les subventions en question. Voici par exemple les chiffres 2016 parmi lesquels vous pouvez chercher votre parlementaire. Nous avons donc décidé de nous plonger dans ces milliers de données pour voir qui a été aidé par les députés de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
D'abord, on constate que parmi les grands bénéficiaires de cette réserve, on trouve des communes et quelques communautés de communes. Il s'agit souvent de financer la construction ou la rénovation de locaux ou de voirie. On retrouve beaucoup de rénovation d'églises ou de châteaux. Ainsi, Odile Saugues (63) a octroyé 54.000 euros à la commune de Malintrat pour construire sa salle polyvalente, Philippe Cochet (69) 80.000 euros à la commune de Caluire-et-Cuire pour aménager une maison de la parentalité. Certains, comme Yves Nicolin (42) n'ont apporté leurs subventions qu'à des communes.
A l'inverse, certains députés privilégient le monde associatif. Les organisations caritatives sont particulièrement choyées. Ainsi, les trois députés de l'Allier subventionnent l'association nationale des visiteurs de prison. Le Secours Populaire de Villeurbane a pu récupérer 23.000 euros grâce à Pascale Crozon (69). Quant à Alain Calmette (15), il a permis de subventionner à la fois le Secours Populaire, le Secours Catholique, Emmaüs, les Restaurants du Coeur et la Banque Alimentaire.
Les structures sociales ou d'insertion sont aussi nombreuses à bénéficier de ces subsides. Bernadette Laclais (73) a ainsi permis de verser 15.400 euros au centre intercommunal d'action sociale de la région de Frontenex, alors que Michel Issindou (38) a octroyé 25.000 euros à l'oiseau bleu (association d'insertion et d'hébergement).
Les comités des fêtes et associations sportives sont aussi extrêmement nombreux à bénéficier de la réserve parlementaire. Pas un député ou presque n'oublie de fournir un coup de pouce financier aux clubs de sa circonscription.
Les festivals et associations culturelles sont aussi très nombreuses à recevoir une partie de ces subventions. Ainsi, Pascal Terrasse (07) offre 20.000 euros pour l'association de la scène de musiques actuelles ardéchois, Danielle Auroi (63) 2.000 euros pour le festival du carnet de voyages de Clermont-Fd et Marc Francina (74) 24.000 euros pour le spectacle de Noël du Théâtre la Toupine.
Moins nombreuses mais présentes dans les listes, les associations qui oeuvrent dans la santé sont aussi concernées. Ainsi la fondation Neurodis, l'association "services et soins infirmiers" et l'association "Hôpital 2000" ont reçu 6000 euros chacune grâce à Jean-Louis Touraine (69)
En dehors de ces grands traits, la liste se lit comme un inventaire à la Prévert. Morceaux choisis :
- 30.500 euros au comité départemental de fleurissement des Pays de l'Ain de la part de Xavier Breton (01)
- 3.000 euros pour le syndicat étudiant UNEF de la part de Michel Destot (38)
- 2.500 euros pour les jeunes agriculteurs de la part de Virginie Duby-Muller (74)
- 5.000 euros pour l'association de préservation de la locomotive à vapeur 141R420 de la part d'Odile Saugues (63)
- 10.000 euros pour l'institut d'études politiques de Grenoble de la part de Michel Issindou (38)
On n'oubliera pas les médias associatifs locaux, les écoles privées via leurs OGEP, les "sous des écoles", les amicales laïques, les clubs de retraités, les amicales de sapeurs-pompiers, les très nombreuses fanfares ou encore les associations de commerçants ou d'anciens combattants.
On notera qu'en zone rurale, les députés ont tendance à choyer les associations de chasseurs (Alain Marleix, dans le Cantal permet à une douzaine d'entre elles d'obtenir 1000 euros chacune, générosité partagée par Jean-Pierre Vigier en Haute-Loire) ou de pêcheurs (10.000 euros pour l'AAPPMA du Faucigny grâce à Martial Saddier en Haute-Savoie).
Enfin, certains députés choisissent de donner un coup de pouce à des associations qui exercent bien au delà de leur circonscription. Ainsi, le "French Institute of Pondicherry" récupère 5.000 euros grâce à Danielle Auroi (63), et la chambre de commerce Franco-Islandaise, basée à Reykjavik peut compter sur 10.000 euros votés grâce à Lionel Tardy (74)
On notera pour finir que le nombre de structures subventionnées varie grandement d'un parlementaire à l'autre. Si certains répartissent de petites sommes entre plusieurs dizaines de structures (plus de 70 pour Patrice Verchere (69); prés d'une centaine pour Bernard Perrut (69)), d'autres se concentrent sur une petite dizaine de projets ... Sur le papier, le plus extrême dans ce domaine semble être Jean-Louis Gagnaire (42) qui a consacré ses 130.000 euros à une seule association, ASSO42. Mais dans les faits, il ne s'agit pas d'un seul bénéficiaire : cette union des associations de Saint-Etienne a en réalité été chargée de redistribuer ces fonds à plusieurs dizaines d'associations locales.