Le film "C’est pour la vie" de Laurent Boileau ou le quotidien de 11 trisomiques en quête d’autonomie et d’autodermination. Pour tordre le cou aux idées reçues. Un film jubilatoire tourné à l’Îlot Bon Secours à Arras, première expérience d’habitat inclusif en France.
Ils s’appellent Robin, Eléonore, Elise, Gilles-Emmanuel, Mario, Stéphanie. Ils ont entre trente et quarante ans et sont tous porteurs de trisomie 21. Ils ont aussi tous la même adresse : l’îlot Bon Secours à Arras. Une ancienne clinique transformée en logements où se côtoient une centaine d’habitants autour d’un idéal de convivialité partagée sous trois formes : la mixité sociale avec des logements sociaux et des lofts spacieux, la mixité inter-générationnelle (un tiers des appartements est occupé par des retraités) et la mixité "fonctionnelle" avec 11 appartements réservés à des personnes trisomiques autonomes et actives.
Ce projet a été porté par un bailleur social et une association de parents qui souhaitent voir vivre leurs enfants handicapés en milieu ordinaire, les voir acquérir de l’autonomie et ainsi envisager plus sereinement "l’après parents".
Le film a nécessité 15 jours de repérage et 32 jours de tournage pendant lesquels le réalisateur, Laurent Boileau, s’est installé à l’îlot Bon Secours. "Il a fallu que j’accepte de changer ma façon de faire, confie Laurent Boileau. Ça a été une grande leçon d’adaptation pour moi. Avec les porteurs de trisomie 21, la notion du temps n’est pas la même, l’oralité n’est pas toujours facile. Le monde dans lequel on vit ne leur laisse pas de place pour s’exprimer et moi je voulais vraiment leur donner la parole et que personne ne parle à leur place. Ni aidant, ni parent".Je voulais vraiment leur donner la parole et que personne ne parle à leur place. Ni aidant, ni parent.
Pour recueillir ces paroles, Laurent Boileau suit ses personnages dans leur quotidien au travail, au marché, dans leurs appartements et parfois les place face caméra pour des moments de paroles plus intimes. La caméra est derrière un miroir sans tain ce qui offre un double regard : celui du personnage qui se trouve confronté à sa propre image et le nôtre qui sommes interpellés directement. La parole en est que plus forte. Les regards et les émotions aussi parce que : "Je ne voulais pas que ce film soit un catalogue d’apprentissage de l’autonomie. Je voulais aussi montrer le savoir-être et les ressentis".
Ce film sur la tolérance et la différence pose la question de l’identité. Qu’est-ce que le "normal" ? Qu’est-ce que le "pathologique" ? La trisomie 21 renvoie à une anomalie chromosomique mais "l’anomalité" n’est pas l’anormalité. Les personnages du film sont faits de la même humanité que tout un chacun … Avec leurs forces et leurs faiblesses.
(Le long métrage de Laurent Boileau "J’irai décrocher la lune" sortira en salle dès la fin du confinement. On y retrouve les personnages du documentaire)
Ils ont vu le film
- Laurent, papa de Louis 19 ans porteur de trisomie 21 (Saint-Etienne)
- Gérard, père d’un adulte handicapé et diacre en charge du handicap (Saint-Etienne)
- Stéphanie, psychomotricienne ( Lyon)