Parmi la cinquantaine d'écrivains invités à la 37e édition de la Fête du livre de Bron figurent des habitués et des poids lourds de la littérature contemporaine. On y fait aussi des rencontres et de belles découvertes. C'est le cas avec Polina Panassenko. D'origine russe, elle a grandi à Saint Etienne.
Son livre a reçu le Prix Femina des Lycéens en 2022. Polina Panassenko est l'une des invités de la 37e Fête du livre de Bron. Elle a rencontré ses lecteurs. Comédienne et traductrice, Polina Panassenko est désormais romancière avec "Tenir sa langue". Son premier roman. Avec des mots incisifs et un style percutant, elle parle de l'exil, de son histoire de petite fille russe qui a grandi à Saint-Etienne où elle a appris la langue française. Un récit intime.
Une enfance stéphanoise
De son enfance et de son adolescence passées à Saint-Etienne, elle explique : "C'était une découverte tout en contrastes. Mais famille arrivait de Moscou et c'était un contraste par rapport à la Russie des années 90, un contraste entre Saint-Etienne et Moscou". Et aujourd'hui ? "Je garde de très bons souvenirs de la ville de Saint-Etienne. J'y retourne de moins en moins souvent mais cette année, je suis allée à la fête du livre. C'est une ville qui m'est chère, j'ai le cœur vert !".
"C'est aussi un livre qui est parti de l'envie d'écrire sur l'accent, sur l'espèce d'entre-deux-langues, sur une zone grise qui n'est ni la langue maternelle, ni la langue étrangère, mais une zone transitoire," explique l'auteure,"et l'accent de Saint-Etienne est un accent que j'aime tout particulièrement".
Elle se dit "très heureuse" de la réception de son premier roman. Avec ce prix, Polina Panassenko a trouvé tout naturellement sa place sur la scène des festivals littéraires, dans les médiathèques ou dans les rencontres en librairies, faisant tomber au passage, quelques a priori.
"Rencontrer les libraires c'est une joie. C'était plutôt des gens qui me faisaient peur avant ça. J'avais le sentiment qu'il ne devait pas y avoir d'intermédiaires entre un livre et un lecteur ou une lectrice. Or en les rencontrant j'ai compris la force que représente ces passeurs de lecture", explique l'auteure.
Une histoire d'identité
Un livre sur l'exil ? Pas seulement. "Tenir sa langue" raconte l'histoire d'une fillette prénommée Polina en hommage à sa grand-mère Pessah, qui confrontée à l'antisémitisme, a dû prendre ce prénom russe. Au lendemain de la chute de l'URSS, la famille arrive en France. Un long voyage en train.
"De temps en temps je m'endors. A chaque fois je me réveille dans un nouveau décor. Puis le train ralentit. Cette fois, c'est la bonne. La vraie France s'appelle Saint-Etienne"
Et c'est dans la capitale ligérienne que la famille s'installe. Polina devient Pauline. Son prénom est francisé. S'impose aussi à l'enfant deux vies : celle à l'intérieur et celle du dehors, à l'école et avec les autres. Cette double vie qui rime avec double identité : Polina chez elle, Pauline à l'école. Ce changement de prénom cristallise sa quête d'identité entre ses deux langues et ses deux pays. Une quête qui débute par des démarches administratives pour récupérer le prénom donné à sa naissance.
"Tenir sa langue" n'est pas le premier livre de Polina Panassenko. En 2015, elle avait publié une enquête sur cinq femmes toutes prénommées Polina Grigorievna.
Propos recueillis par M.Figureau et B.Millaud