Une enquête administrative, diligentée par le ministre de l'Intérieur G.Collomb, doit faire toute la lumière sur d'éventuels dysfonctionnements internes qui ont abouti à la remise en liberté d'Ahmed Hannachi à Lyon, la veille de l'attaque en gare de Marseille. La préfecture du Rhône s'explique.
Comment Ahmed Hannachi, un tunisien en situation irrégulière, déjà signalé à sept reprises pour des faits de droit commun, et impliqué encore une fois dans un vol, a-t- il échapper à la justice ? Comment a -t-il pu ressortir libre d'un commissariat lyonnais, samedi en milieu d'après-midi, au terme de sa garde à vue ? Et se retrouver le lendemain, en gare de Marseille, pour commettre un double homicide revendiqué par l'Etat Islamique .... Un geste qui a couté la vie dimanche à deux jeunes filles de 20 et 21 ans, dont une éléve infirmière originaire de Rillieux-la-Pape.
C'est la question à laquelle la préfecture du Rhône doit maintenant répondre, sur l'injonction du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, qui a mandaté l'Inspection générale de l'administration pour juger d'éventuels dysfonctionnements. Hier déjà, lors de la conférence de presse du procureur de Paris, Francois Molins avait évoqué très sobrement l'affaire, expliquant que "les autorités locales n'ont pas été en mesure de prendre une mesure d'éloignement "à l'encontre du suspect.
La préfecture du Rhône avance, avec son langage bien à elle, quelques éléments d'explication qu'appréciera l'Inspection générale :
" En complément de la permanence assurée par un membre du corps préfectoral 24h/24, la préfecture du Rhône tient les samedi, dimanche et jours fériés une « permanence éloignement » de 9 h à 17 h, destinée à prendre les mesures nécessaires lorsque des étrangers en situation irrégulière (ESI) sont interpellés."
Une source proche de l'enquête traduit : "La personne de permanence à la préfecture du Rhône, ayant autorité pour signer l'obligation de quitter le territoire et le placement en centre de rétention (...) était absente.Le centre de rétention administrative de Lyon-Saint-Exupéry (112 places), où il aurait pu être conduit, était par ailleurs "plein", et deux autres admissions de migrants ont été refusées samedi matin,"
Les failles du dispositif
Une logique technocratique qui laisse perplexe, confrontée aux faits révélés par le procureur de Paris. Lors de ses arrestations pour des faits de droit commun, Ahmed Hannachi a berné la police, la justice, et l'administration par la force des choses, en utilisant des identités chaque fois différentes. Si bien qu'il n'avait jamais été condamné, ni même identifié comme un homme dangereux par les services de renseignement.
Selon nos confrères du Point, "l'homme avait déjà fait l'objet en 2005 d'un arrêté de reconduite à la frontière par le Préfet du Var, avant d'être remis en liberté au bout de deux jours , en raison du manque de places en centre de rétention administrative et faute de documents d'identité"
De la même façon, Ahmed Hannachi aurait de nouveau échappé à une procédure d'expulsion envisagée par la préfecture du Rhône samedi parce que le centre de rétention de Lyon était saturé. L' hebdomadaire "Le Point" confirme l'hypothèse selon laquelle "il y avait un problème de disponibilité de places en rétention le samedi matin".
Voilà qui pourrait constituer un début d'explication aux failles du système. Et voilà aussi pourquoi Ahmed Hannachi aurait pu si longtemps échapper à une mesure de reconduite à la frontière, qui était pourtant actée par les autorités préfectorales il y a déjà 12 ans ....
Le sujet d'Emilie Rosso présenté par Sylvie Boschiero dan sle 12/13 du mardi 3 octobre 2017.