Pour l'association lyonnaise Et 6 C'était Vous, qui lutte contre la délinquance routière, la création d'un homicide routier est une première victoire. Mais, son fondateur Eric Moreno reste très vigilant sur les conséquences concrètes de cette nouvelle dénomination et ses implications en termes de peine encourue.
Anne Laure Moreno avait 28 ans. Il y a six ans, dans la nuit du 23 octobre 2016, elle est morte sur le trottoir d'une avenue du 6ᵉ arrondissement de Lyon, victime d'un chauffard ivre sans permis, qui roulait à tombeau ouvert en pleine ville et venait de griller un feu rouge. Une amie d'Anne Laure, très grièvement blessée dans l'accident, en gardera de profondes séquelles.
Lutter contre la délinquance routière
Ce drame avait marqué toute la ville. En novembre 2018, le tribunal correctionnel de Lyon condamnait le chauffard meurtrier à sept années de prison ferme. Une peine sévère, rarement prononcée dans ce type d'affaires.
Quelques mois après la mort de sa fille, le père d'Anne Laure, Eric Moreno, créait l'association Et 6 C'était Vous, pour lutter contre la délinquance routière et soutenir les familles de victimes.
L'objectif premier était clair : obtenir au plan légal la requalification des délits routiers mortels, et passer de l’homicide involontaire à la mise en danger délibérée de la vie d’autrui pour les conducteurs qui cumulent plusieurs circonstances aggravantes.
Ce lundi 17 juillet, la Première ministre Elisabeth Borne a annoncé la création d'une qualification d'"homicide routier". L'idée est de modifier l'article 221-6-1 du Code pénal pour que les faits d'homicide involontaire commis par le conducteur d'un véhicule à moteur puissent être qualifiés d'"homicide routier", que les faits soient aggravés ou non (avec ou sans circonstance d'alcool ou de stupéfiants).
Des associations, satisfaites mais vigilantes
"La qualification d'homicide routier, nous en sommes très satisfaits" réagit Eric Moreno, fondateur de l'association Et 6 C'était Vous. "Il s'insérera entre l'homicide involontaire et l'homicide volontaire. Cela dit, la grande question que se posent les associations et les familles de victimes, c'est de savoir ce qu'on met derrière. Si on ne change pas les peines (encourues par les délinquants routiers), ce sera beaucoup de bruit pour pas grand-chose."
Eric Moreno attend beaucoup plus. "Ce que nous demandons, c'est l'augmentation du plafond des peines. Aujourd'hui, quand vous avez deux circonstances aggravantes, vous encourez 10 ans de prison. Mais, en fait, cette peine n'est jamais prononcée, il n'y a quasiment jamais de prison. Le maximum, c'est entre 6 et 8 ans, mais dans les faits avec les aménagements de peine, au bout d'une trentaine de mois, les condamnés sont dehors". D'où l'importance de rehausser le plafond de la peine encourue à 15 années de détention.
Il faut que le délinquant routier qui a tué quelqu'un soit sûr d'aller en prison !
Eric Moreno, fondateur de l'association Et 6 C'était Vous
Pour Eric Moreno, il est très important également de créer une peine plancher pour les homicides routiers et de sanctionner plus lourdement les conduites en état d'ivresse, sous l'emprise de stupéfiants et sans permis de conduire. "Il faut aussi prendre en considération les "complices" du délinquant routier, par exemple ceux qui laissent les clés de la voiture à un mineur sans permis. Bref, après la création de cet homicide routier, nous allons rester extrêmement vigilants".