Le pape François a reçu lundi matin en audience privée le cardinal Barbarin, qui lui a remis sa démission. Rien n'a filtré de l'entrevue. Le pape va-t-il temporiser, attendre le procés en appel ou bien remplacer l'archevêque de Lyon dont l'autorité morale est affaiblie par sa condamnation ?
Le sort du cardinal Barbarin est désormais entre les mains du pape François. L'archevêque de Lyon, condamné à six mois de prison avec sursis pour "non-dénonciation d'agressions sexuelles sur mineurs", lui a remis sa démission lundi matin lors d'une audience privée. Il n'y a eu depuis aucune annonce officielle du Vatican. Tout donne à penser que le pape va s'accorder du temps pour examiner et trancher ce dossier ultra-sensible.
Plusieurs solutions s'offrent à lui. La première, accepter la démission d'une éminente personnalité de l'Eglise de France, dont il avait pris la défense en 2016. Mais le contexte a changé depuis. Le pape François est lui-même confronté à de multiples affaires de pédophilie qui minent l'autorité de l'institution.
Il a dû accepter en octobre, après trois semaines de réflexion, la démission du cardinal américain Donald Wuerl, soupçonné par un jury populaire d'avoir étouffé un vaste scandale d'agressions sexuelles dans l'état de Pennsylvanie. Or l'archevêque de Washington n'a pas été condamné par la justice, contrairement au cardinal Barbarin.
Le pape François peut-il durablement ignorer l'arbitrage de la justice française ? Peut-il maintenir en poste un cardinal dont l'image est altérée et l'autorité morale sapée depuis plusieurs années dans son diocèse ?
Deuxième solution. Le pape peut temporiser. Laisser la justice des hommes poursuivre son travail et donner au cardinal Barbarin une chance de se disculper lors de son nouveau procès, en appel.
Interviewé par Sylvie Cozzolio et Thierry Swiderski, le cardinal italien Angelo Beccio livre sa propre analyse. "Pour moi, il faut attendre la fin du procès. Et si l'appel le déclare innocent? En France, on nous enseigne qu'il faut respecter la loi, le droit. Je pense qu'il faut attendre. Maintenant, je ne sais pas ce que le pape va penser."
En s'accordant un nouveau délai, le pape François prend un risque, celui de voir cet attentisme interprété comme un signe de faiblesse. Fléchir, ce serait adresser à la communauté catholique un message contraire à la tolérance "zéro" qu'il affiche urbi et orbi. N'a t-il pas voulu lui-même placer les évêques devant leurs responsabilités personnelles, tout dernièrement, lors du dernier synode à Rome ?
Le reportage à Rome de Sylvie Cozzolino et Thierry Swiderski (Son : Loïc Favel) :