L'homéopathie est dans la tourmente. La ministre de la santé Agnès Buzyn a demandé à la Haute Autorité de Santé de se prononcer sur son efficacité. Les professionnels lancent une pétition pour se défendre, mercredi 10 avril. Le leader mondial Boiron nous a ouvert ses portes.
Les partisans de l’homéopathie lancent une campagne de mobilisation, "Mon Homéo Mon Choix" pour maintenir son remboursement, avec une pétition en ligne.
De leur côté, l'Académie de Médecine et l'Académie de Pharmacie affichent leur opposition à l'homéopathie. Dans un rapport commun, les deux instances préconisent "qu’aucune préparation homéopathique ne puisse être remboursée par l’assurance maladie tant que la démonstration d’un service médical rendu suffisant n’en aura pas été apportée."
Déjà en mars 2018, un collectif publiait une tribune engagée contre l’homéopathie et les autres "médecines alternatives". En août, le ministère de la Santé a saisi la Haute autorité de Santé (HAS) pour connaître son avis "quant au bien-fondé du remboursement des médicaments homéopathiques".
Son avis est attendu pour le mois de juin.
Pour Valérie Lorentz-Poinsot, Directrice Générale de Boiron, la Haute Autorité "nous a demandé de répondre en décembre à un dossier, pour évaluer l'homéopathie. Nous avons rendu un dossier conséquent le 7 janvier, dont nous sommes assez fiers. Nous avons sélectionné plus de 80 études. Maintenant nous sommes dubitatifs quant à l'analyse de ces éléments, puisque la Haute Autorité a l'habitude d'évaluer des médicaments avec indications thérapeutiques, mais ils n'ont pas l'habitude d'évaluer des médicaments homéopathiques qui ont une spécificité (...). Mais c'est une bonne chose, si la Haute Autorité est indépendante, et totalement honnête. Elle ne pourra pas balayer d'un revers de main toutes les études que nous avons menées. Elle n'a pas interrogé les patients, c'est pour cela qu'ils veulent prendre la parole et dire qu'ils ont besoin de ce traitement. "
Concernant les études scientifiques, la Directrice précise : "Il faut arrêter de dire qu'il n'y a pas d'études scientifiques. Il y a de nombreuses études qui concernent le médicament homéopathique. Ceux qui disent cela ne prennent pas le temps de regarder les études, il y en a beaucoup." Et de rajouter : "Il y a du rationnel dans l'homéopathie. Dans notre laboratoire, on fabrique des choses qui sont totalement rationelles. Il y a les enjeux de santé publique, auxquels répond l'homéopathie, et il y a les enjeux économiques et les enjeux sociaux. Un déremboursement va à l'encontre de la liberté de choix des patients, et va à l'encontre aussi du maintien du pouvoir d'achat. Nous soutenons les Français : ils sont 77% à se soigner avec l'homéopathie."
Certains médicaments homéopathiques sont remboursés à hauteur de 30% par l'Assurance maladie. Selon la Sécurité Sociale, en 2017, leurs remboursements représentaient 129,6 millions d'euros, sur un total de 19,9 milliards pour l'ensemble des médicaments.
Plus de 1000 emplois menacés ?
Les laboratoires Boiron emploient directement 3.600 personnes dans le monde, 2.600 en France. Pour Valérie Lorentz-Poinsot, "nous avons regardé l'impact d'un déremboursement sur les emplois. Il est majeur. On fabrique tout en France. 90% de notre production est destinée au marché français. 60% du chiffre d'affaire est réalisé en France. Donc la menace sur l'emploi est réelle. Plus de 1.000 emplois seraient menacés sur nos 34 sites."
C'est le Ministère qui décidera en juin, après l'avis scientifique de la Haute Autorité de Santé. En cas d'une annonce de déremboursement, le laboratoire Boiron envisage plusieurs recours.