Une brocante géante dans une enceinte sportive. La traditionnelle vente solidaire du foyer Notre-Dame des sans-abri est de retour ce week-end au Palais des Sports de Gerland, à Lyon. Cette année, les dons sont en baisse, au grand dam des responsables de l'association et des bénévoles.
"Je n'achète jamais sur internet et les plateformes. Je suis un peu old school", explique une cliente qui vient d'enfiler un manteau de vison vintage. "Là, il y a des pièces inédites, qu'on ne trouve pas ailleurs. Ou bien, il faut chiner dans les magasins, mais je suis sûre que c'est plus cher. Là, c'est de la vraie fourrure", explique la dénicheuse de bonnes affaires, visiblement séduite par sa trouvaille.
Elle était venue, au départ, en simple accompagnatrice, pour déambuler dans les allées de la grande brocante annuelle du Foyer Notre-Dame des sans-abri. L'événement, comme chaque année, se tient durant deux jours au Palais des sports de Gerland et attire des milliers d'acheteurs potentiels. "J'en profite pour essayer et peut-être me faire plaisir. On se laissera certainement tenter", conclut la cliente.
Seconde main et solidaire
L'événement est un paradis pour les chineurs. Il attire notamment les habitués de vêtements de seconde main, des habitués des achats en ligne ou des friperies, "pour le plaisir de la chine". Ces amateurs qui arpentent les allées de cette vente éphémère, espèrent "tomber sur la pépite". Certains viennent pour la première fois dans cette brocante solidaire qui affiche des prix défiant toute concurrence. Le truc en plus : la possibilité d'essayer les vêtements ou les souliers avant l'achat.
"J'essaye d'acheter principalement en seconde main", explique une jeune femme venue dégoter des pièces originales à petits prix. Si la jeune acheteuse est décomplexée, c'est parce que ses emplettes vont permettre "d'aider des personnes dans le besoin". La jeune femme est séduite par la démarche solidaire de cette brocante. "J'ai l'impression de faire une bonne action, une action utile", ajoute-t-elle. Un bon argument pour dépenser, à bon escient. Un événement qui satisfait aussi les militants de la cause écologique.
Sensible baisse des dons
"Je viens chaque année, j'aime bien farfouiller, je passe toujours au stand des livres. C'est vraiment intéressant. On a l'impression d'être un peu dans la caverne d'Ali Baba", confie une habituée croisée dans les allées. Des vêtements, de la maroquinerie, des meubles, des jouets, des livres… La liste des produits donnés au Foyer Notre-Dame des sans-abri est incroyablement longue. La vente de ces articles participe au financement des actions sociales menées auprès des plus démunis par le Foyer. Tous les articles vendus à petits prix ont été soigneusement triés, vérifiés et remis en état, si nécessaire, par les bénévoles et les salariés en insertion professionnelle du Foyer.
Mais depuis ces dernières années, l'association est confrontée à une inexorable baisse des dons et, par ricochet, à une diminution des achats. Une véritable spirale sur laquelle l'association n'a pas de prise. "Quand on fonctionne avec les dons, il faut que les gens aient de quoi donner. Il faut qu'ils aient la volonté de donner, que ce ne soit pas déporté vers la vente de 2ᵉ ou 3ᵉ main", explique Philippe Flament, vice-président du Foyer Notre-Dame des sans-abri.
"Moins de dons, moins de produits à vendre. Donc, on est un peu moins intéressant. Donc, on a un peu moins de chiffre d'affaires. C'est un cercle sur lequel on ne peut rien. D'une façon générale, il y a moins de dons", constate Philippe Flament.
Les gens ne donnent plus, ou plutôt, ils donnent moins, et moins de produits de bonne qualité. Il n'y a plus la qualité.
BénévoleFoyer Notre-Dame des sans-abri
Cette baisse des dons, les bénévoles qui participent à la brocante sont les premiers à la constater. "Cette année, on fera moins de chiffre d'affaires pour les sans-abri, les gens vendent beaucoup sur internet. C'est une année difficile pour nous. Les gens ne donnent plus, on le ressent vraiment cette année", déplore une bénévole du rayon sacs à main et accessoires. Moins de quantités et moins de qualité. "On a quand même de belles marques, mais moins de quantités", précise une autre bénévole.
"Les principales concurrences que nous avons sur la partie vêtements et accessoires, ce sont les sites de vente de seconde main bien connus. Arrivent aussi aujourd'hui sur le marché les grandes marques qui font elles-mêmes leurs reventes", ajoute Philippe Flament. Une tendance qui tombe mal, alors même que le Foyer vient de lancer une activité de produits "grande marque vintage". Sur les meubles, la tendance est moins visible.
Quelles solutions ?
Pour enrayer cette inquiétante baisse des dons, l'association va augmenter les lieux où les particuliers pourront venir déposer leurs dons et trouver d'autres secteurs. Une structure de collecte va également être déployée. "Il faut qu'on fasse du sourcing. C'est à nous d'aller chercher les produits, plus qu'avant !" résume le vice-président de l'association lyonnaise. "On a encore beaucoup de dons, mais ce n'est plus suffisant par rapport à nos besoins. Des besoins qui augmentent (....) On ne vit que sur ce qu'on nous donne", ajoute-t-il.
Si les besoins des bénéficiaires sont croissants depuis plusieurs années, ceux du Foyer Notre-Dame des sans-abri ne le sont pas moins : "Nos investissements sont toujours aussi importants, nos frais de fonctionnement aussi : on a de la lumière, du chauffage, des salaires qui augmentent pour nos salariés… On est comme tout le monde", énumère Philippe Flament.
Créé à Lyon en 1950 par Gabriel Rosser, le Foyer Notre-Dame des sans-abri agit depuis plus de 70 ans auprès des personnes en grande précarité. Les missions de l'association lyonnaise sont l’accueil, l’hébergement, l’insertion et l’accompagnement. Elle aide 2000 à 2500 personnes et assure près de 500 000 nuitées par an pour ses bénéficiaires. Ce grand marché solidaire annuel permet de collecter environ 250 à 300 000 euros de vente, soit près de 10% de l'activité bric-à-brac de l'année pour le Foyer Notre-Dame des sans-abri.
Ranger, étiqueter, vendre… Plus de 300 bénévoles seront présents durant ce week-end pour participer à l'opération.
La vente solidaire se déroule le samedi 18 (9h-18h) et le dimanche 19 novembre 2023 (10h-18h) au 350 avenue Jean Jaurès, Lyon 7e.