A Lyon, une start'up juridique s'est donné pour mission de coordonner des actions collectives conjointes, dans le domaine de la consommation, de l'environnement ou du numérique... Rencontre avec Elisabeth Gelot, avocate et co-fondatrice de la plateforme internet "V pour Verdict".
C'est une innovation dans le monde juridique, qui se met à l'heure du numérique. Créé en juillet 2018, V pour Verdict fait partie de la "legaltech", ce domaine d'activité à cheval entre la justice et le net. Sa spécialité : les actions collectives conjointes, lancées et suivies en ligne. Cousins des "class actions" américaines, ces recours sont encore rares en France. La crise du Covid-19 leur a toutefois donné un coup d'accélérateur.
C'est Elisabeth Gelot, qui le constate : avocate, elle a cofondé cette plateforme internet en juillet 2018. A l'issue du confinement, de nouveaux litiges sont venus grossir le contentieux habituel. A titre d'exemple : des commerçants qui se retournent contre leur assureur pour obtenir l'indemnisation de leur perte d'exploitation, des consommateurs qui réclament aux chaînes Canal+ ou BeIn Sport le remboursement d'une partie de leur abonnement pour cause d'interruption des championnats sportifs...
Il faut dire que V pour Verdict fait tout pour favoriser le développement des démarches collectives devant la justice. Son levier : des appels lancés sur son site à partir d'un premier plaignant - ou groupe de plaignants - afin de réunir un maximum de personnes autour d'un projet d'action.
Mutualiser les coûts
L'idée est née de l'expérience de la jeune juriste : "Je suis avocate en Droit de l'environnement, et j'ai d'abord travaillé du côté des entreprises et de l'Etat", raconte Me Gelot. "Je me suis rendu compte qu'en face, on avait beaucoup de citoyens qui n'avaient pas les moyens de prendre un avocat spécialisé et de tenir le temps de la procédure."Du coup, l'intérêt, pour les justiciables, c'est avant tout de mutualiser les coûts : "Il y a les honoraires d'avocats, les frais d'huissiers, les rapports d'expertises,... des dépenses qui peuvent être nombreuses dans des dossiers concernant l'environnement, notamment", explique l'avocate. "Quand il y a plusieurs centaines ou plusieurs milliers de requérants pour les partager, chacun paie en moyenne 20 à 30 euros."
Le "téléversement" des pièces
Pour la vingtaine d'avocats partenaires de la plateforme, il ne s'agit pas de philanthropie, même si Elisabeth Gelot rappelle que le devoir d'humanité figure dans le serment du barreau : "Les affaires de consommation, notamment, sont rarement rentables, s'il n'y a qu'un seul plaignant ; notre modèle permet de concilier viabilité économique et défense des causes qui nous tiennent à coeur".Autre élément décisif pour permettre aux avocats de plaider ces affaires : la digitalisation des dossiers. Ceux-ci sont gérés en masse et en ligne : beaucoup de démarches sont automatisées et les plaignants peuvent eux-mêmes "téléverser" leurs pièces. Une prestation essentielle lorsque l'on traite conjointement des centaines de dossiers.
Depuis un an, V pour Verdict a un petit frère au nom tout aussi accrocheur : Cessez-le-feu. Il s'agit toujours d'actions collectives, lancées en ligne, mais cette fois, on ne va pas au procès, c'est une médiation qui est proposée.