"Les choses n'auraient pas dû se passer comme ça" déclarent les vigiles jugés devant les assises du Rhône où ils sont jugés depuis jeudi 19 novembre. Ils sont accusés d'avoir, en 2009, provoqué la mort d'un jeune homme de 25 ans qui avait volé une bouteille dans le magasin.
En revoyant les images des caméras de vidéo surveillance, les quatre vigiles ont fait part de leurs remords et regrets face aux derniers instants de la victime, Michael Blaise.
Suspecté d'avoir volé une bouteille d'alcool, il avait 25 ans lorsqu'il est mort. C'est après avoir été maîtrisé et plaqué par quatre vigiles dans un local de sécurité de l'hypermarché Carrefour, du centre commercial de la Part-Dieu à Lyon, le 28 décembre 2009, que le jeune homme est décédé.
Comment ce petit larcin, "trois fois rien" selon un accusé a-t-il pu déboucher sur cette "tragédie"?
"Ce jour-là rien ne préparait à ce que ça se passe de la sorte, je suis consterné, je vis avec ça depuis cinq ans, je n'ai pas encore toutes les réponses à ce qui s'est passé", déclare Jean-Pierre Lops, l'un des quatre vigiles renvoyés devant les assises pour des violences volontaires commises en réunion
ayant entraîné la mort sans intention de la donner.
Captés par une caméra de vidéosurveillance, les derniers instants de la victime avant sa perte de connaissance ont été diffusés à la cour d'assises, jeudi 19 novembre en début de soirée.
Présenté à l'époque des faits comme "une mort en direct", ce film offre-t-il une réponse claire à la question posée à la cour d'assises?
Chaque séquence de la bande vidéo a en tout cas été décortiquée par les parties et l'accusation sous le regard digne de la famille de la victime.
Qu'ont vu les jurés? Michael Blaise accompagné d'amis qui traînent dans les allées bondés de l'hypermarché. Casse une bouteille. En manipule une autre qui disparait. L'a-t-il vraiment volée ? L'accusation et la défense se perdent en conjectures.
Puis vient son interpellation houleuse au niveau des caisses et son arrivée dans le local de sécurité.
Réveillez-vous
En une grosse dizaine de minutes, l'enchaînement des faits est tragique à l'intérieur de cette pièce de 2,35 mètres de long sur 1,8 de large, où alternent les moments de calme et de tempête.
Pour l'avocate générale, Fabienne Goget, ce sont les vigiles qui à deux reprises, viennent provoquer Michael Blaise, ce que contestent vigoureusement
les intéressés. Vient finalement la mêlée qui débouchera sur l'immobilisation fatale de la victime.
Les vigiles se mettent à deux, trois puis quatre pour plaquer l'infortuné qui hurle, crie, râle puis finalement suffoque. Mais personne ne l'entend. "Si on l'avait entendu s'étouffer, on ne l'aurait pas laissé comme ça", plaide un des vigiles, Hervé Sylvanise.
La victime est un gaillard et le passé pèse. Cinq jours plus tôt, une altercation avait déjà eu lieu à l'hypermarché.
Face à la cour, c'est l'ex-responsable de la sécurité, Jean-Pierre Lops, un solide quinquagénaire qui monopolise la parole. Qui assume les erreurs. Parle de "perte de notion du temps". De police qui n'arrive pas. Près de six ans après les faits, c'est encore lui le patron de ce quatuor hétéroclite qui depuis le box des accusés encourt jusqu'à 20 ans de prison.
Selon l'expert de la police scientifique venu commenter la vidéo à l'audience, la dernière respiration de Michael Balise est entendue à 18h27.
Trois minutes plus tard, M. Lops estime que la victime s'est calmée, juste avant que ne percent les premiers signes d'inquiétude des vigiles:
"oh, oh, jeune homme, réveillez-vous". Michael Blaise a perdu connaissance. Transporté à l'hôpital, il décédera le lendemain.
L'autopsie conclura à une asphyxie mécanique par compression et obstruction. D'importantes traces d'hématomes ont été retrouvées sur un bras et au niveau de la tête de la victime.
"Dévasté" comme les autres co-accusés, M. Lops avait plus tôt dans la matinée, confessé: "c'était une interpellation comme il y en a beaucoup dans ce genre de magasins" et "pour une bouteille, on aurait pu le laisser partir".