Depuis 25 ans, une association de médecins retraités font bénévolement des expertises médicales pour les migrants à qui on a refusé une demande d'asile. Ils les consultent pour prouver les violences qu'ils ont subies. Médecins retraités sans frontières : une association unique en France.
« C’est presque un sauvetage. C’est porté secours à une personne en péril, c’est du même type », témoigne Joseph Biot, un des médecins de l’association. Pour un autre, Blaise de Pury, « ceux qui prennent le risque de les renvoyer chez eux prennent le risque d’être complice d’assassinats, de viols et de torture ».La consultation commence toujours par un entretien. Une heure en moyenne. Le médecin refait l'histoire du demandeur d'asile. Une histoire la plupart des fois marquée par la violence et la souffrance.
« On voit bien s’il y a une vraie conviction, avec l’émotion que cela entraîne pour une femme, non pas de raconter son viol, mais de donner des indices. En disant "J’ai été violé par deux, par trois, par cinq personnes, après j’ai perdu connaissance". On ne va pas lui demander une description anatomique alors que l’OFPRA aurait souvent envie que l’on la lui donne. Donc il y a des moments, on est obligé de faire confiance », raconte Joseph Biot, 88 ans et Président de Médecine et droit d'asile (MEDA).
Syndromes post-traumatiques
Pour prouver des violences passées, les médecins recherchent des traces, visibles, cliniques. Mais pas seulement. Une grande partie de la consultation est consacrée à l'expertise psychologique du patient.
« Il y a tous types de syndromes post-traumatiques qui peuvent être regroupés avec la dépression et surtout, les reviviscences. Ce qui obsède, tous les souvenirs obsédants. Les gens ont l’impression de le revivre. Ce n’est pas qu’un souvenir, c’est revécu », affirme Blaise de Pury, 80 ans et obstétricien retraité. L'examen clinique : c'est toujours la dernière phase de la consultation.
Cette association lyonnaise est unique en France. En 25 années d'existence, elle a reçu 12.000 demandeurs d'asile. Mais aujourd'hui, ces médecins bénévoles ont tous plus 80 ans. Et pour l'instant, aucun confrère retraité ne s'est engagé à assurer la relève.