Mourad Merzouki propose un nouveau spectacle en clôture des Nuits de Fourvière à Lyon, « Beauséjour ». Ce spectacle labellisé olympiade culturelle Paris 2024 joue le paradoxe. Mourad Merzouki met en scène des corps faussement vieillis, peu associés à l’image du hip-hop. Nous avons vu le spectacle en avant-première. On vous raconte.
Avec le chorégraphe originaire de Saint-Priest (Rhône), il faut suivre. Car le garçon n’est jamais là où on l’attend. Après avoir dirigé le Centre chorégraphique de Créteil, il reste le directeur de Pôle en scènes à Bron. Il a échoué dans sa candidature à la direction de la Maison et de la Biennale de la danse à Lyon, mais depuis 2023, il a passé le surmultiplié, comme s’il avait peur du vide. Entre la reprise de spectacles passés un peu partout en France et à l’étranger, un flirt avec l’opéra aux côtés du chef William Christie ou la chorégraphie pour l’équipe de France de natation artistique pour les JO Paris 2024, il propose avec ce fameux « Beauséjour » une nouvelle chorégraphie en grand format, pour 15 danseurs.
Et quoi de mieux comme écrin que le théâtre antique de Fourvière. Ce lieu a toujours porté chance à ses grandes créations. Le souvenir de « Folia », spectacle baroque hip-hop sur cette scène est resté dans beaucoup de mémoires.
Avant-première
Alors pour marquer un nouveau grand coup dans sa désormais longue carrière, Mourad est allé se roder avec les danseurs pour une soirée sur la Scène de Bayssan dans l’Hérault. Et c’est là, qu'on a pu parler du temps qui passe. Cinquante ans et déjà 30 ans de carrière. Le corps ressent la fatigue. Non seulement Mourad l’avoue bien volontiers, mais il le met en scène. C’est le thème de ce spectacle : le vieillissement des corps est au centre de cette chorégraphie. Mais comme toujours avec lui pas de dramatisation.
Hip-hop et tango
Dans un décor de guinguette défraîchie, deux groupes de danseurs évoluent : les jeunes et les « faux vieux ». Huit aînés signifiés par leurs costumes d’un autre temps et leurs corps déformés et grossis par des prothèses de mousse. Le travail de costumes, de faux corps, de perruques et de maquillages campe des personnages tous droits sortis d’une BD comme les vieux fourneaux . En revanche dans le jeu plus que les gestes c’est la marche traînante qui fait le contraste. Dans la danse elle-même, le hip-hop reprend ses droits. Et tous, jeunes et vieux personnages développent une énergie commune. Les mouvements se débrident sous la musique de Muller et Makaroff, les fondateurs du groupe Gotan Project. Leur électro tango donne des ailes aux personnages imaginés par Mourad Merzouki.
Jeunes et vieux dans une même danse
Le groupe des jeunes face aux vieux. Les vieux défient les jeunes. Tous se mélangent, se portent, forment des couples éphémères intergénérationnels, le temps d’une esquisse de pas de deux. Le public rit. Porté par le tango, un petit vent de tendresse nostalgique traverse la scène. Et le solo en popping (gestes saccadés debout) d’un « petit vieux rondouillard » emporte la mise.
Mourad Merzouki flirte avec un univers de music-hall. L’effet de troupe ravit les spectateurs. En clin d’œil le soir de la première, la veille du premier tour des élections législatives, au moment des saluts, le chorégraphe montre ses danseurs très divers et dit au public debout : « C’est ça la France ! ».
Petite précision : Le titre du spectacle « Beauséjour » est le nom d’un quartier de Saint-Priest en banlieue lyonnaise dont est originaire Mourad.
Beauséjour, chorégraphie Mourad Merzouki aux Nuits de Fourvière du 23 au 25 juillet. Spectacle labellisé Olympiade culturelle Paris 2024.