Le 23 octobre 1943, le corps d'un homme est retrouvé sur la route de Feyzin. C'est celui de Jean Long. Le médecin est l'une des premières victimes de la répression milicienne dans le quartier de Monchat. Et depuis 75 ans, il existe dans le 3ème arrondissement de Lyon, le cours du Dr Jean Long.
Dénoncé, arrêté, supplicié à Montluc, Jean Long laisse deux enfants derrière lui, lorsqu'il est assassiné le 23 octobre 1943. Sa fille, Guetty est alors âgé de 8 ans. Son fils, Henry, n'a que 2 ans. Aujourd'hui, les deux enfants du docteur Long ont toujours en leur possession un classeur. À l'intérieur, nombre de photos de famille de l'époque, mais aussi et surtout, à l'abri dans des pochettes plastifiées, des documents attestant d'un engagement dans la Résistance.
Né en 1906 en Haute Savoie, diplômé de la faculté de médecine de Lyon en 1932, Jean Long s'installe avant la guerre comme médecin spécialisé en rhumatologie. Novembre 1941 : il participe à la Résistance.
Il a été un exemple pour toute ma vie. Il m'a permis de savoir ce qu'était l'engagement parce qu'il a consacré sa vie à la médecine, il était même à Montchat, le "médecin des pauvres". Et naturellement, quand cette abomination de guerre est arrivée, il s'est engagé. Pour servir cet idéal qui l'animait, c'est-à-dire servir l'Humain, servir la fraternité, servir la République, servir la laïcité.
"Choqué par la capitulation", Jean Long entre en résistance
L'historien Philippe Valode détaille le parcours du résistant. Jean François Long va appartenir à plusieurs mouvements. Les trois les plus connus sont : le Coq enchaîné fondé à Lyon par un médecin socialiste, Libération Sud, et enfin l'Armée secrète du général Delestraint, au sein de laquelle Jean Long va avoir un rôle important. Le service de santé.
Au sein de l'Armée secrète, Jean Long se charge de soigner les blessés, s'occupe de l'hospitalisation dissimulée de ceux qu'il ne peut pas prendre en charge lui-même. C'est un rôle décisif. Car pour être un bon résistant, il faut avoir la certitude que si on est blessé sur le terrain, on ne va pas y être laissé, mais que l'on va être soigné et sauvé. Il n'y a aucune armée au Monde qui ne marche sans cela.
Pour le compte de la Résistance, le docteur Jean François Long va aussi distribuer tracts et journaux, faire du renseignement militaire, fabriquer de faux papiers pour les Juifs, etc. Mais pour l'historien, Philippe Valode, le médecin n'était sans doute pas préparé à prendre toutes les précautions d'usage : "se dissimuler, coder des messages, être discret, ne jamais prendre le même itinéraire, éviter les lieux fréquentés par les Allemands... C'était très complexe tout cela. Et Jean Long était un docteur". Qui plus est, dans le département du Rhône, les Allemands et la Gestapo peuvent compter sur des effectifs importants : "la milice, au service de l'ennemi, y comptait 1.000 hommes".
Dénoncé, enlevé à son domicile du 18 cours Henri à Lyon, incarcéré et torturé à la prison Montluc, Jean François Long a été exécuté par balle et son corps retrouvé à Feyzin le 23 octobre 1943.
1945 : le cours Henri devient celui du docteur Jean Long
Henry Long, qui avait 2 ans à la mort de son père, ne garde que peu de souvenirs de cette époque. "Je me souviens des visites au cimetière tous les dimanches après-midi, et de mon instituteur qui me disait si tu ne travailles pas, ton père sera mécontent. Cela m'a stimulé". Henry Long a naturellement repris le flambeau comme il le dit lui-même : a fait médecine et s'y est consacré pendant 40 ans.
Je suis fier d'avoir eu un père comme cela, qui n'a jamais dérogé à son engagement, et qui l'a payé de sa vie. Un engagement total.
Avril 1945 : le cours Henri est rebaptisé du nom du Docteur Jean Long, dans le quartier de Montchat et le 3ème arrondissement de Lyon. En mai 1946, Jean François Long est décoré de la Légion d’Honneur avec la mention "Mort pour la France ". Juin 1950, il reçoit la Croix de guerre et la médaille de la Résistance.