Du Moyen-Âge à l'ère du punk, le Musée des tissus de Lyon propose un voyage spacio-temporel autour d'une collection de Vivienne Westwood. L'exposition se tient jusqu'au 17 janvier.
La styliste Vivienne Westwood investit le musée des tissus à Lyon. Cette reine du punk et militante écologiste puise sa mode subversive dans le patrimoine dès le Moyen-Age.
C'est ainsi qu'une veste cintrée à manches "assiettes" s'expose à côté du pourpoint de Charles de Blois du XIVe siècle. Ce chef-d'oeuvre du musée lyonnais est taillé de la même façon. Cette coupe permet de libérer le mouvement. Elle a inspiré Vivienne Westwood, ancienne institutrice et grande technicienne de la mode autodidacte. Elle a même enseigné cette coupe à ses étudiants parmi lesquels celui qui deviendra son mari, Andreas Kronthaler. De 25 ans son cadet, il dessine actuellement les collections pour sa maison.
Un dialogue entre Londres la punk et Lyon la traditionnelle
L'exposition "Art, mode et subversion" accueille le public du 10 septembre au 17 janvier. C'est la première en France consacrée à Vivienne Westwood. A 79 ans, elle n'a rien perdu de son militantisme. Elle s'est mise en cage cet été pour manifester contre l'extradition de Julian Assange ou a posé à moitié nue pour son projet "climate revolution".Les pièces de la collection Lee Price, prêtées pour l'exposition, dialoguent avec celles du musée lyonnais. "Nous avons cherché à convoquer le musée imaginaire de Vivienne Westwood et restituer ses références", explique Julie Ruffet-Troussard, commissaire de l'exposition.
Pour cette raison, le visiteur peut découvrir une robe chemise moderne de face se transformant de dos en une robe à plis du 18e siècle. Le galon d'une veste à motif d'ailes d'ange et de grappes de raisin reproduit celui créé à Lyon au 18è siècle pour l'Eglise catholique. L'arrière de cette veste est coupé comme le col des chasubles.
"Vivienne Westwood résume tout: du punk, du nouveau romantisme, de la couture. Chacun peut s'identifier avec ses vêtements. J'espère qu'il y a quelque chose que tout le monde peut comprendre et aimer", déclare à l'AFP le Britannique Lee Price. Il a travaillé onze ans dans les boutiques de la créatrice. Il continue de vibrer pour son univers. Il porte d'ailleurs un pantalon "entravé" Westwood pour présenter les vêtements. Ce passionné collectionne habits, chaussures ou invitations aux défilés comme des oeuvres d'art.
Une styliste toujours dans le coup
L'exposition retrace le parcours de près d'un demi-siècle de cette créatrice inclassable. Des Sex Pistols aux campagnes écologistes en passant par les défilés parisiens, avec des collections détournant les codes de l'aristocratie anglaise ou jouant avec le savoir-faire du 18è siècle, l'âge d'or de l'artisanat."Vivienne Westwood est éminemment moderne, parce qu'elle s'ancre dans le passé. Elle n'a pas du tout d'estime pour ces artistes contemporains qui veulent faire table rase du passé et créer à partir de rien", explique à l'AFP Esclarmonde Monteil, directrice du musée et commissaire de l'exposition.
Une salle flanquée de photos de défilés a été arrangée comme un podium. Elle invite à réfléchir à la façon dont on s'habille et "regarder la fast fashion d'un autre oeil" dans un musée où des tissus "qui ont des milliers d'années" sont conservés, souligne la directrice. "Le mantra de Westwood «achetez moins, choisissez mieux et faites durer», c'est aussi ce qu'on veut transmettre au musée", ajoute-t-elle.
Une prise de position plus que jamais dans l'air du temps. La crise de la Covid-19 bouscule le milieu de la mode: Louis Vuitton recycle ses collections, Gucci et Saint-Laurent renoncent à la frénésie des Fashion weeks et des centaines de maisons plus modestes s'engagent à produire moins, réduire les voyages et revisiter les défilés.
Dans ce même esprit, les scénographes du Musée des tisuus ont recyclé au maximum les installations de la précédente exposition consacrée à Yves Saint Laurent. Pour le reste des matériaux, ils les ont commandés dans la région.
Une exposition détonnante, comme l'illustre le reportage de Sandra Méallier et Eloïsa Patricio: