Destiné à un acquéreur parisien, un squelette a priori complet de dinosaure a été retrouvé dans un coffre de voiture. Nous avons échangé avec le paléontologue qui l'a expertisé : c'est en fait une reconstitution grossière de mosasaure.
Découverte surprenante pour les gendarmes du peloton motorisé de Vierzon ce mercredi 27 mars. Lors du contrôle d'une Renault Clio, ils trouvent un fossile complet de dinosaure de plusieurs mètres, soigneusement emmailloté dans le coffre. Enfin, de ce qu'ils s'imaginent être un dinosaure. Car c'est en fait son colocataire de l'ère du crétacé supérieur, le mosasaur, un grand reptile marin, ancêtre de nos varans d'aujourd'hui. Notre Mosasaur, ou Mosasaurus pour son nom scientifique, peuplait une grande partie de l'océan Atlantique. Il a disparu lors de la 5ème extinction de masse, avec les dinosaures. Il a donc vécu entre 72 à 66 millions d'années avant notre ère.
"C'est une chimère, qui ne ressemble rien"
Mais notre mosasaur n'est pas un authentique. Jalil Nour-Eddine, paléontologue au Muséum national d'Histoire naturelle (MNHN), spécialiste des reptiles fossiles, est formel : "il n'a aucun intérêt scientifique". Le scientifique a été contacté avec sa consœur Nathalie Bardet, pour expertiser à distance le fossile. Et même sur photos, pas de doutes, "c'est un mélange de plusieurs individus" et "il y a de grossiers moulages pour combler les manquements (...) Le crâne était intéressant, mais il a été mal reconstitué. En gros, ils lui ont mis les dents d'autres individus", détaille-t-il. "C'est une chimère, qui ne ressemble rien (...) Il ne pouvait être destiné qu'à un amateur", conclut-il.
Des ossements qui proviennent d'un site de phosphates marocain
Pour lui, c'est un soulagement, "un moindre mal". Car il y a bien des squelettes de grand intérêt scientifique qui échappent à la vigilance et finissent chez des particuliers fortunés : "Là, il n'y a pas eu de perte pour la géologie, pour la connaissance". Le scientifique déplore qu'il y ait encore du trafic de fossiles, particulièrement depuis les sites riches en phosphates du Maroc. "Là-bas, toutes les conditions étaient réunies pour mieux conserver les squelettes de vertébrés", explique-t-il. Les gisements de phosphate du Maroc, composés de sédiments marin, regorgent en effet de squelettes de vertébrés marins, principalement de mosasaurs, mais aussi de quelques plésiosaures, leurs cousins à long cou. "Mais maintenant l'Office chérifien des phosphates en a conscience et en prend soin", note-t-il, "le Maroc a constitué une collection avec de très beaux spécimens".
Normalement, une fois saisis, les fossiles exportés illégalement retournent dans leur pays d'origine. On ne sait pas ce qu'il en sera de notre mosasaur reconstitué, mais il y a peu de chance qu'il finisse dans une salle de musée marocain.