Comment l'École peut-elle jouer un rôle pour sensibiliser aux inégalités entre les femmes et les hommes ?

Alors que l'égalité entre les sexes reste un problème au sein de la société, le système éducatif essaye d'y remédier. S'ils mettent du temps, des changements s'observent. Mais ils restent bien souvent trop dépendants d'enseignants volontaristes. 

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La question de l’égalité entre les femmes et les hommes reste, plus que jamais, d’actualité. Au fil des années, si la prise de conscience est plus globale, la société accuse toujours, à bien des égards, un retard en la matière. Pour faire bouger les choses, beaucoup voient l’éducation comme le meilleur des outils. L’école a son rôle à jouer pour faire naître cette prise de conscience. Mais en 2021, que s’y passe-t-il ? Les questions d’égalité entre les filles et les garçons au sein des collèges et lycées sont abordées afin d’éduquer les futures générations. À l’image de la société, certaines choses évoluent, mais peut-être encore trop lentement. 

La convention interministérielle face à la réalité

L’école comme levier d’action, c’est du moins ce qu’espère le gouvernement. En novembre 2019, une convention interministérielle pour l’égalité entre les filles et les garçons, les femmes et les hommes dans le système éducatif a été signée. L’objectif est de donner à l’ensemble des enseignants, chefs d’établissements et parents d’élèves, les outils pour aborder ces questions. "Il y a la parité dans les élections de représentants d’élèves, des actions auprès des parents pour prévenir le cyber-harcèlement, la nomination de "référents égalité"", énumère non-exhaustivement Fabienne Colboc, députée LREM d’Indre-et-Loire. Une palette de mesures qui sont censées faire bouger les choses. 

Après presque un an et demi de mise en œuvre, dans les faits, ce n’est pas aussi simple. Laétitia Atlan, porte-parole et fondatrice du collectif #NousToutes dans le Cher y voit surtout la manière de se vanter "d’une question noble" mais en réalité, "c’est du saupoudrage". Un sentiment qui s’apparente à celui de Marie-Anne Clément, professeure d’Histoire en lycée professionnel, et déléguée syndicale à la CGT. "Ça reste un petit peu de la poudre aux yeux, mais c’est bien que cela existe", juge-t-elle.

C'est surtout au bon vouloir de l’équipe enseignante et de l’établissement.

Malika Conan, professeure de français

"Les objectifs sont inscrits dans les textes, mais dans les faits, ce sont les enseignants qui s’adaptent en s’emparant ou non de la question", avoue Fabienne Colboc. C’est ce que fait Marie-Anne Clément. Dans ses cours, la professeure d’histoire "essaye de saisir toutes les occasions" pour éduquer ses élèves aux questions d’égalité entre les femmes et les hommes. Elle choisit des figures féminines pour illustrer son cours, des écrivaines et personnalités ayant porté la cause féministe ou des documents qui vont dans ce sens. Dans son collège de l’Indre où elle y est "référente égalité", Malika Conan fait de même dans ses cours de français. Une évidence, quand on est "engagé dans la vie personnelle". Marie-Anne Clément l’avoue : "Ce sont des choix pédagogiques très personnels, nous avons une certaine liberté, et beaucoup ne saisissent pas ces occasions pour ces questions-là." Ce que constate également Malika Conan, tout en expliquant que certains enseignants utilisent ces occasions pour mettre en avant d’autres causes. "Souvent, ce n’est pas la priorité, regrette Laétitia Atlan de #NousToutes 18. Quand il y a des retards dans les programmes ce sont des choses qui sautent"

Au sein de son collège de l’Indre, Malika Conan essaye de mener des projets, en dehors des cours, qui vont permettre d’aborder les questions de discrimination de genre d’une autre manière. Expositions, interventions d’associations comme "Le planning familial", participation à des concours sur les thématiques de l’égalité entre les filles et les garçons, diffusions de playlists engagées sur la question pendant la récréation avec le professeur de musique, … "Il faut concerner tout le monde car tous les professeurs sont censés faire ce travail d’éducation, et pas seulement les professeurs d’histoire", explique Malika Conan. Bien souvent, elle constate que les élèves en sont très demandeurs. Mais il faut de la volonté pour les mettre en œuvre. "Je crois que ça dépend du bon vouloir de l’équipe enseignante et de l’établissement. Par exemple, c’est inscrit dans la ligne directrice de notre établissement", souligne la professeure de français indrienne. 

Où sont les femmes dans les manuels scolaires ?

Si la volonté est primordiale, les connaissances le sont aussi. "On ne peut pas demander aux professeurs d’enseigner quelque chose qu’ils ne connaissent pas", soulève Laétitia Atlan. Pourtant à en croire la convention interministérielle et la députée Fabienne Colboc, les professeures bénéficient, depuis 2019, de formations sur le sujet. Dans les faits, c’est encore une fois différent. Selon Malika Conan, il y a bien une formation pour les CPE et les "référents égalité" mais pour les autres professeurs, la question de l’égalité entre les hommes et les femmes est traitée plus à la marge, à l’occasion de formations générales sur les discriminations. "Rien n’est proposé et c’est dommage, lorsque nous en avions eu sur le handicap cela avait modifié nos pratiques", se souvient-elle. Une des clés se trouve peut-être là. "Il faut admettre que certains collègues ne sont pas très à l’aise avec la question", déplore Marie-Anne Clément. 

Mais le souci n’est pas uniquement là. "Il faut apporter plus de visibilité aux personnages féminins dans les manuels scolaires", propose la députée LREM Fabienne Colboc. Longtemps, les manuels d’histoire ont fait la part belle aux hommes, en oubliant presque systématiquement les femmes ayant composé l’Histoire de France. Mais pas seulement : "En SVT nous avons des représentations très précises du pénis mais le clitoris reste oublié, ce n’est plus possible", alerte Laétitia Atlan. De son côté, Malika Conan abonde dans ce sens mais observe tout de même des petits changements dans sa matière. "Dans les nouveaux manuels de français, il y a beaucoup d’écrivaines et d’autrices, ça y est ! On a l’impression qu’ils les découvrent", ironise-t-elle.

L'espoir d'un changement avec les nouvelles générations

"On a l’impression de ne jamais en faire assez !" Chacune de leur côté Malika Conan et Marie-Anne Clément perçoivent des changements sur les élèves, mais la route est longue. La professeure d’histoire questionne : "Est-ce à l’école de tout prendre en charge ? La société est pleine de signaux contraires." Elle évoque notamment les publicités sexistes dont sont inondés les élèves dès qu’ils sortent de cours. "Ce doit être une continuité dans la société, le discours d’égalité doit avoir lieu également au sein du cercle familial et dans les activités périscolaires", estime Fabienne Colboc qui souhaite avant tout développer l’esprit critique des plus jeunes. 

Cet esprit critique, Malika Conan l’observe au quotidien : "On sent qu’il y a une prise de conscience qu’il n’y avait pas avant. Je sens les élèves très attentifs à ces questions et souvent on en discute à leur initiative." Optimiste, la professeure de français a confiance dans les prochaines générations pour faire bouger les choses, sans pour autant voir tout en rose. "On reçoit un soutien de plus en plus jeune, la prise de conscience de la problématique se fait plus tôt", constate également Laétitia Atlan qui avec son collectif #NousToutes est très active sur les réseaux sociaux. "On parle plus des questions de sexisme et d’égalité que quand j’ai débuté, se souvient Marie-Anne Clément. C’est plus facile de s’en emparer maintenant. J’ai des jeunes collègues, j’espère qu’elles y sont sensibles." Si l’espoir se trouve dans les jeunes générations, la société dans son ensemble conserve son retard. "Quand je vois les débats sur les tenues vestimentaires des jeunes filles qu’il y a eu en septembre, je me dis que c’est plutôt au niveau des adultes qu’il y a un souci", désespère Malika Conan. Mais elle reste positive et croit que les nouvelles générations peuvent faire changer les choses. Reste à savoir combien de générations seront nécessaires pour acquérir l’égalité entre les femmes et les hommes. 

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