Education à la sexualité à l'école : les enseignants sont-ils suffisamment formés ?

Un rapport de l'Inspection générale, remis en 2021 à Jean-Michel Blanquer mais jamais révélé jusqu'ici, pointe des manquements de l'Education nationale concernant l'éducation à la sexualité à l'école. Certains enseignants du Centre-Val de Loire, notamment, déplorent un manque de formation.

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Les enseignants sont-ils suffisamment formés pour l'éducation à la sexualité en classe ? La réponse n'est pas unanime. Un rapport de l'Inspection générale fait état de manquements du ministère à ce sujet. Ce rapport, intitulé "Éducation à la sexualité en milieu scolaire" et remis en 2021 à l'ancien ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer, n'a été révélé que ce mardi 20 septembre par nos confrères de Mediapart.

Selon ce rapport, et alors que la loi Aubry de 2001 prévoit trois séances d'éducation à la sexualité par an, seulement moins de 15% des élèves en bénéficient pendant l'année scolaire à l'école et au lycée, et moins de 20% au collège. Déjà, en février dernier, le collectif #NousToutes dénonçait un manque d'éducation à la sexualité à l'école, à la suite d'une enquête réalisée sur plus de 10 000 personnes. 

Les enseignants regrettent un manque de formation

Un rapport accablant, mais dont la problématique est un vrai sujet de questionnement sur le terrain, comme en Centre-Val de Loire. "C'est un sujet difficile, délicat. C'est un vrai problème, d'autant que cela dépend de la zone dans laquelle on travaille", explique Paul Agard, le secrétaire départemental du Snuipp-FSU de l'Indre-et-Loire.

Cet enseignant dans le premier degré estime que les professeurs manquent de formation pour dispenser cette éducation à la sexualité.

Certains collègues le font, d'autres pas, en fonction de leur sensibilité sur le sujet, mais il nous manque les clés pour l'aborder en classe

Paul Agard, le secrétaire départemental du Snuipp-FSU de l'Indre-et-Loire.

Des formations de 3 jours par le rectorat

Les clés, pourtant, existent selon le rectorat. Le docteur Sylvie Angel, médecin conseillère auprès du rectorat d'Orléans-Tours, anime un dispositif d'éducation à la sexualité depuis plusieurs années. Si la mise en place de trois séances par an et par groupe d'âge n'est pas forcément respectée, la médecin conseillère a mis en place des formations d'équipe d'établissement. "Nous sommes cinq formateurs académiques et nous formons les enseignants et autres personnes volontaires, comme infirmiers ou assistantes sociales", explique-t-elle. 

On n'aborde plus aujourd'hui la sexualité comme un facteur de risques et de maladies, mais de façon beaucoup plus positive.

Sylvie Angel, médecin conseillère auprès du rectorat d'Orléans-Tours

La formation, dispensée chaque année aux volontaires, dure trois jours. Elle permet de donner à ces enseignants, toujours formés en binôme, des techniques d'animation et des pistes de réflexion sur leurs limites. "L'idée, c'est de s'appuyer sur tous les temps d'échange qu'on a pu avoir avec les jeunes - en cours, lors de leur passage à l'infirmerie ou autre - pour être au plus près de leurs besoins sur la question de la sexualité", glisse Sylvie Angel. 

On donne une sorte de boîte à outils pour amener les jeunes à faire leurs propres choix.

Sylvie Angel, médecin conseillère auprès du rectorat d'Orléans-Tours

L'éducation à la sexualité est traitée sous différentes formes, relève la médecin conseillère : la notion psycho-affective, la relation aux autres, la prévention des violences et du harcèlement, mais aussi la question d'intimité et d'égalité femme-homme. "On adapte évidemment en fonction de l'âge et sans heurter le groupe d'enfants ou d'adolescents que l'on a en face de soi", indique le docteur Sylvie Angel.

"Si l'école ne le fait pas, qui le fera ?"

S'il estime être mal formé, Paul Agard est cependant convaincu que l'éducation à la sexualité doit se faire à l'école. "Si l'école ne le fait pas, qui le fera ? C'est un vrai choix de société qu'il faut renforcer", dit-il.

Un avis partagé par Elise Cherfix, responsable du suivi des enseignants du premier degré pour le Sgen-CFDT Orléans-Tours. "Il n'y a pas qu'à l'école, il y a aussi la sphère familiale, mais certaines familles sont plus pudiques que d'autres", note-t-elle. L'enseignante insiste également sur la nécessité, pour les élèves, de voir leur professeur comme une personne référente et sérieuse sur le sujet.

L'éducation à la sexualité est importante à cet âge là, car le corps change. C'est important d'expliquer.

Elise Cherfix, du Sgen-CFDT Orléans-Tours

Ces deux enseignants estiment qu'il est important de faire intervenir, en plus, des structures et des personnes spécialisées sur le sujet. "Parfois, nous avons des médecins ou infirmiers scolaires, cela permet d'avoir une approche complémentaire", souligne Paul Agard.

Elise Cherfix, elle, y voit l'opportunité pour les élèves de posséder des ressources sur la question à la maison. Cette membre du Sgen-CFDT Orléans-Tours pense notamment à des associations spécialisées, à l'image du Planning familial.

Un complément au programme scolaire

Le Planning familial intervient d'ailleurs dans différents établissements au cours de l'année scolaire. Principalement dans les collèges, pour les classes de 3ème, en ce qui concerne l'antenne d'Orléans. Une intervention qui complète le programme de sciences de la vie et de la terre (SVT) en 4ème sur la reproduction.

"Nous avons une approche différente, en prenant une classe pendant deux heures pour expliquer le fonctionnement du Planning", explique Vincent Raynaud, animateur au Planning familial d'Orléans. Il ajoute : "L'idée, c'est aussi que les jeunes sachent vers qui se tourner en cas de besoin, vis-à-vis de la contraception ou pour un test de grossesse, etc."

Nous sommes dans une démarche d'éducation populaire.

Vincent Raynaud, animateur au Planning familial d'Orléans

L'objectif du Planning familial, selon l'animateur, c'est aussi d'aborder les questions de genre, d'apporter aux jeunes des clés et des éléments d'analyse. "On veut les amener à développer un esprit critique sur l'impact des choix que l'on fait", précise Vincent Raynaud. 

Pendant ces heures d'intervention en classe, les filles osent davantage prendre la parole concernant ce qu'elles vivent dans la rue, dans la cour. Elles se sentent en confiance.

Vincent Raynaud, animateur au Planning familial d'Orléans

Et au-delà des associations, les enfants et adolescents disposent aussi de ressources dans les médias et sur les réseaux sociaux, à l'instar du blog et programme "Sexy Soucis" de Diane Saint-Réquier disponible sur la plateforme FranceTV, ou du compte Instagram "jemenbatsleclito" animé par Camille Aumont Carnel, qui a par ailleurs écrit un guide d'éducation sexuelle dédié aux adolescents.

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