Implanté à Dreux depuis près de 90 ans, le groupe pharmaceutique est entré en négociations exclusives pour céder sa division "santé familiale", responsable notamment de la fabrication du Smecta.
Ipsen, troisième laboratoire pharmaceutique français, a annoncé vendredi qu'il était entré en négociations exclusives avec le laboratoire français Mayoly Spindle, pour se séparer de sa division santé familiale, basée en grande partie à Dreux. Ipsen devrait notamment céder le Smecta à Mayoly Spindle.
Cette opération devrait être finalisée avant la fin du troisième trimestre 2022, précise Ipsen dans un communiqué. Le groupe souligne que la cession de cette division - qui s'occupe de la production de médicaments sans ordonnance - pourrait lui rapporter jusqu'à 350 millions d'euros.
Une histoire née à Dreux
Né d'un petit laboratoire fondé à Dreux en 1929 par Henri Beaufour, Ipsen s'est développé pour devenir un groupe d'envergure mondiale. La division santé familiale compte trois sites dans le monde, dont deux en France, à Dreux et à L'Isle-sur-la-Sorgue dans le Vaucluse. Elle emploie 1200 employés, dont 520 dans l'Hexagone, 70% de la production mondiale provenant des deux sites français. La division santé familiale constitue une petite part des revenus du laboratoire, avec moins de 8% de son chiffre d'affaires.
Frappé par la crise du covid, notamment sur son produit phare le Smecta, le site drouais annonçait en 2020 la suppression possible de 33 postes au sein du laboratoire sur place. Pour le moment aucune information n'a transpiré sur la reprise des quelque 300 postes que compte l'usine si la cession venait à se confirmer.
"Ce n'est pas une logique de synergies mais une vision de croissance", a toutefois affirmé le dirigeant d'Ipsen, David Loew. En d'autres termes, l'idée n'est pas de supprimer des emplois, mais de recentrer l'activité du groupe sur la "médecine de spécialité" tout en permettant à la division santé familiale et à Mayoly Spindle "de créer une plateforme globale, avec une taille critique et les moyens de soutenir sa croissance". "Nous avons décidé d'investir en oncologie, en maladies rares et en neurosciences, nous n'avions pas la masse critique en santé familiale", a expliqué à l'AFP David Loew ce 11 février.
Ipsen fait donc le même choix stratégique que d'autres laboratoires avant lui, qui préfèrent se spécialiser dans quelques domaines thérapeutiques clés. Récemment, le laboratoire américain Johnson & Johnson s'est ainsi scindé en deux, avec d'un côté les produits d'hygiène et médicaments sans ordonnance et de l'autre le reste de ses activités.
Résistance de Somatuline
Le dirigeant du groupe a en outre indiqué que la trésorerie ainsi libérée allait permettre de continuer sa stratégie d'acquisitions de molécules en externe. En 2021, le groupe Ipsen a présenté des résultats en nette hausse, avec un chiffre d'affaires de 2,6 milliards d'euros en croissance de 10,7% et un bénéfice net de 646, millions, soit 17,8% de plus qu'en 2020. Après avoir dépassé les objectifs qu'il s'était fixés en 2021, Ipsen table sur une poursuite de la croissance en 2022, quoiqu'à un rythme plus modéré.
La médecine de spécialité a de nouveau servi de locomotive (+11% à 2,64 milliards d'euros). Sa division de santé familiale a également progressé (+7,1%) à 225,6 millions d'euros.
"Ipsen a gagné des parts de marché", s'est félicité David Loew, y compris pour son produit phare, le Somatuline, un anticancéreux qui a rapporté 1,2 milliard d'euros l'an dernier, malgré l'arrivée d'un médicament générique concurrent. Un fait "rassurant", pour le dirigeant, qui prévoit "une érosion très progressive de Somatuline dans les pays où il y a le générique, tandis que sur les autres marchés, on va continuer à croître".
Pour 2022, Ipsen table sur une croissance de ses ventes totales supérieure à 2% à taux de change constants, et une marge opérationnelle des activités supérieure à 35%. Il a en outre révisé ses objectifs financiers pour 2024, et anticipe une croissance annuelle des ventes comprise entre 4% et 6% à taux de change constants sur la période 2020-2024, avec une capacité d'investissement de 3,5 milliards d'euros d'ici à cette échéance.
L'annonce a en tout cas été très bien accueillie à la Bourse de Paris : aux alentours de 17h30 ce 11 février, le titre avait gagné plus de 6,5% à 96,6 euros.